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Pharmacie - Page 27

  • Tout va pour le mieux

    ferme animaux.jpgLa ferme des animaux, Georges Orwell

    Avis Chrono'

    Un classique facile d'accès! Des passages amusants et une dénonciation des régimes totalitaires que même une ignare comme moi a réussi à comprendre.


    Ma dernière lecture 2010.

    Un jour, les animaux de la ferme de M. Jones en ont assez: ils prennent le pouvoir. Ils chassent les humains, votent démocratiquement les décisions et s'occupent eux-mêmes des champs en chantant comme autant de Blanche-Neige et de Sept nains. Mais cette belle cohésion ne tarde guère à avoir du plomb dans l'aile.

    Je vais passer rapidement sur la référence à la révolution russe. L'histoire n'est pas ma tasse de thé et ce soir, je n'ai vraiment pas besoin de me retrouver sur les bancs de l'école. En plus j'ai une soirée raclette qui m'attend.

    5d7cf8ac96f244f6bc970a6c056d9.jpgPlus que le renvoi - assez évident - à une ou deux pages de l'histoire de l'humanité, j'ai aimé le ton caustique dont use Orwell pour nous dépeindre l'évolution du groupe. Au début, tout est parfait, idéal. Utopique. L'entente, l'abondance, le travail sans pression... J'ai adoré la manière dont les règles, peintes sur le bâtiment sont peu à peu dévoyées. Chacun se dit bien qu'il avait de la loi un souvenir différent, mais comme il y a toujours un mouton pour dire que non non, c'était bien comme ça et que le chef a toujours raison, tout passe, tout est gobé. La héros de guerre, le camarade, devient un couard puis un terroriste dans la mémoire collective.

    Excellent guide pour apprendre à manipuler les masses crédules. Comment entuber vos semblables en quelques leçons efficaces: Comment crier au loup et à l'insécurité, comment bien choisir son bouc émissaire, comment faire accepter violences et répressions d'état...

    Atelier pratique: prenez une vessie, faites-en une lanterne. Ce passage avec le fourgon de l'équarrisseur qu'on leur fait prendre limite pour le carrosse de Cendrillon... Délicieux!

    Je ne sais trop ce qu'il faut en déduire... Seuls ceux qui abusent de la crédulité et des rêves de la foule s'en sortent...

    C'est l'antichambre du cynisme, ce bouquin. Depuis que je l'ai lu, je rêve de fonder ma colonie de braves types avec pour devise "vous en avez marre de travailler plus pour gagner moins"? et de me la couler douce au soleil en les laissant bosser pour moi et m'aduler.

    On peut faire faire n'importe quoi à presque n'importe qui en le caressant dans le sens du poil, Orwell le pensais, je le pense aussi.

    Pas un hasard si une certaine chaîne de TV hautement intellectuelle se plaît à envoyer de petits groupes dans des fermes.

    A lire pour l'humour, si vous êtes d'humeur joyeuse. Ou pour cette vision pessimiste d'un monde dans lequel la meilleure intention ne peut que mener à la catastrophe, si vous préférez.

     

    Ce livre pour...?

    Ce livre pour votre voisin, qui vous retient chaque soir 20mn devant la porte sous la pluie pour râler contre le gouvernement.

    Ce livre pour votre autre voisin, qui vous retient chaque soir 20mn devant la porte sous la pluie pour dire amen aux décisions du gouvernement.

    Ce livre pour votre ado, qui crie à la révolution dès que vous tentez de comptabiliser les caleçons qui tapissent les meubles de sa chambre.

    Et vive le bonheur, la paix dans le monde, Pocahontas (et les miss France)!


  • Bon débarras!

    Hop hop je me depêche, je n'ai plus que deux articles à écrire et je pourrai boucler le bilan. Comme me le disait tout à l'heure un charmant agent comptable, le 1er janvier, ce n'est pas vraiment le 1er janvier, vous voyez?

    Vous ne voyez pas? Moi non plus. Je n'ai rien compris. Mais avec un grand sourire, j'ai obtenu qu'il m'avance son 1er janvier fantôme au 3 janvier et non pas au 8 ou 9 comme il en avait l'intention. Ce monde est fou.

    Vous êtes donc en droit d'attendre que j'en finisse moi aussi au plus vite avec mes lectures de l'année révolue. (Mon premier roman 2011 est juste génial, mais chuuut je n'en dis pas plus...)

    colonel_chabert_balzac.jpgLe colonel Chabert, Honoré de Balzac

    Avis super chrono'

    S'il vous faut un Balzac court, celui-là fera l'affaire. Pas trop de personnages, un brin de grands sentiments.

    Les vingt premières pages peuvent faire peur, mais ça s'arrange ensuite.


    Pffff ça m'ennuie terriblement de devoir donner mon avis parce que j'ai bien trop hâte d'en venir au moment où je vais vous détailler tout ce que le papa noël avait dans sa brouette pour moi cette année! Uniquement des titres piqués sur vos blogs! Vous allez tous les reconnaître! Et je...

    Balzac? Ah oui. Je suis donc devenue très pâle à la lecture des 20 premières pages, ayant conseillé (comprenez: imposé) cette lecture à d'aucuns... un peu inconsciemment! Eu peur qu'ils partent en courant, en hurlant, en me maudissant... (tiens, non, en fait ils font ça tout le temps).

    Je vous résume le :passage initial, un peu ardu:

    2351699391.jpgDes clercs qui dans leur étude tiennent plusieurs conversations à la fois, l'une portant sur la copie d'un texte juridique, avec abondance de termes spécialisés, l'autre sur la visite d'un vieillard. Plusieurs voix, plusieurs thèmes mêlés, un vocab' hard... Une fois forcé le passage, ça roule comme sur des bigoudis pur beurre et ça ressemble exactement à tous mes souvenirs de Balzac! Ouf.

    Ce roman-ci est court. Le colonel Chabert, qui se présente lui-même à Maïtre Derville comme "celui qui est mort à Eylau" expose son petit problème: on le croyait mort au champ d'honneur, il a mis suffisamment de temps à trouver le panneau exit de la fosse aux soldats pour que sa femme se remarie à un beau gosse, bon parti. Sa fortune éparpillée, Chabert n'est plus qu'un clochard nostalgique de sa gloire passée. La donzelle feint de ne pas le reconnaître, bien sûr, et ce pauvre vieux traîne sa misère sur tous les pavés, le nez pointé vers ses godasses, à la recherche de son honneur.

    Pas de rebondissement surprise, rien qu'un déluge de bassesses humaines: cupidité, mépris, tromperies, rejet...

    Un classique qui se laisse lire.

     

    Ce livre pour...?

    Les petits frères et les petites soeurs, qui sortent du collège ou entrent au lycée, avec l'envie de découvrir un grand auteur français. Marche aussi avec un adulte, mais seulement s'il est pressé, sinon, Le père Goriot me semble un meilleur choix. Ou même Illusions perdues (je n'ai pas encore lu les Chouans). Un autre billet, sur le Chef d'oeuvre inconnu, par là.

    Et vous, vous l'avez conseillé à quelqu'un?

     

    (C'est bon?

    Je peux te montrer mes livres maintenant, dis???)

     

    Une lectrice incommodée m'impose ce correctif: le tutoiement ci-dessus n'est pas un manque de respect! Je peux vous montrer mes livres quand même?

  • De la froideur des belles femmes

    princess_glaces_camilla_lackberg.jpgLa princesse des glaces, Camilla Läckberg

    Avis chrono'

    Un polar suédois qui marche, sauf qu'on ne sait pas comment. Prenez une fille morte, une enquêtrice qui n'en est pas une, un enquêteur qui lui en est bien un et... euh... euh...

    C'est bien ce que je disais. Un polar sans rien d'original, mais qu'on aime quand même. Allez comprendre!


    Vous pensez beauté fatale? Femme qui vous regarde de haut parce que vous avez osé la trouver belle et d'agréable compagnie? Vous imaginez des regards glacés, du dédain, le silence réprobateur de la princesse devant son soupirant transi?

    Vous n'y êtes point du tout, mes amis, ces choses là sont bonnes pour la réalité. Dans ce roman, la princesse est un cadavre, elle roupille pour toujours dans sa baignoire,  et si elle est "des glaces" c'est juste parce que la chaudière est en panne. Quant à son mari, il n'est visiblement pas le seul prince charmant de l'histoire.

    Le corps est comme par hasard découvert par une vieille amie d'enfance, Erica, romancière qui flaire un bon filon et se met de façon presque désintéressée à la recherche du coupable, rapidement relayée par un flic, un vrai, parce que quand même on ne fait rien de mieux que la police en matière d'enquête.

    Semaine agréable passée en compagnie de cet audio livre qui laisse tout de même une curieuse impression!

    Comme l'auteur se plaît à nous l'exposer dans le premier tiers du roman, par l'entremise d'Erica, ce qui fait un bon roman policier, c'est la profondeur des portraits psychologiques des personnages.

    Mme Lackberg applique si bien ses propres conseils, sans aucun dosage, que le dernier des témoins à droit à un examen approfondi de sa vie, de ses attentes, de ses loisirs, de son bonheur conjugal, à la limite de la fouille au corps.

    Et pour gagner en efficacité, sans doute, pour que l'image nous parle tout de suite, c'est bourré de clichés! Je n'ai pas cessé de me bidonner toute seule derrière mon volant, quitte a me répéter toute seule les répliques les plus ahurissantes.

    copyright.jpgAnou: Un truc qui m'a gênée également, c'est quand les personnages découvrent quelque chose, un indice super important (le brouillon du testament, l'article de journal sur Nils...), qu'ils se disent en eux-mêmes "Oh la la, quel indice ! Ça change vraiment tout..." et qu'ensuite ils nous plantent là avec le suspense et qu'ils mettent 4 ou 5 pages à relancer le sujet.

    J'en suis arrivée à la conclusion qu'un être facétieux devait rôder autour du pc de la romancière, attendre qu'elle aille se servir un café et en profiter pour ajouter aux portraits des personnages toutes les niaiseries imaginables. C'est cela, ou bien la schizophrénie...

    Je sais, je n'utilise pas le terme exactement comme il faudrait et schizo ne signifie pas double personnalité... (Ce paragraphe vous est présenté par Talememore, le blog spécialisé dans les affections cérébrales et autre dérèglements psychiatriques) ...

    Mais enfin, avouez que c'est étrange: vous êtes plongé dans un suspense intense, les mains crispées sur le volant et brusquement, il est question pendant 3 pages d'une petite vieille qui collectionne les pères noël. Des personnages sont longuement introduits... puis disparaissent. D'autres arrivent comme un cheveu sur la soupe et rendent sans sourciller et sans poser de question un énorme service qui fait basculer l'intrigue

    Erica semble être l'enquêtrice désignée, officieuse, ce qui n'est pas rare dans les polars.

    copyright.jpgJe trouvais qu'il y avait beaucoup de ressemblance avec les "Millenium" de Laarson d'ailleurs: la Suède évidemment, la grande famille que tout le monde respecte dans le village parce qu'elle possède l'entreprise de la ville, mais que finalement personne n'aime, le héros qui n'est pas de la police mais qui finalement enquête quand même, la disparition du fils ou de la petite-fille du patron de l'entreprise, bref plein de ressemblances...

    Erica occupe le devant de la scène. Elle fouille en douce la maison, interroge les protagonistes, se planque comme il se doit dans les placards... Puis hop, Patrick, le policier, arrive et reprend l'enquête, on ne s'occupe plus que de lui et Erica en est réduite à l'attendre sous la couette et à cuisiner pour l'homme.

    copyright.jpgJ'ai trouvé que la police était particulièrement lente à montrer qu'elle avait compris. En fait, régulièrement pendant le livre je pensais aux solutions quelques pages avant Patrick (sauf à la fin où là on s'en prend un peu plein la gueule d'un coup!), et ça m'a beaucoup déçue au début... Après ça allait mieux.

    Beaucoup d'autres intrigues secondaires se développent ou avortent, sans aucune logique. Chaque instant on croit que l'on va faire le lien avec l'affaire principale... Et puis, non, rien à voir.

    Les traits comiques prometteurs ne sont pas poussés jusqu'au bout.

    Le plus étrange, c'est que j'ai beaucoup aimé! Mais je ne suis p'têt pas très nette... D'ailleurs j'entends des voix!

    La voix qui nous accompagne dans cet article est celle d'Anou (j'ai pensé au copyright!). Je la remercie pour nos échanges, très enrichissants, et pour m'avoir permis de la citer! 

    Anou a une mémoire du détail hallucinante, elle n'hésite pas à chercher la petite bête dans son analyse et sa plume est très agréable! J'espère avoir très rapidement le plaisir d'une autre lecture en commun puisque nos wish-list s'accordent!

  • Cuisine maison

    "Presque 15 jours de retard sur la troisième échéance du challenge Jonathan Coe,  une liste de lecture comme figée dans la neige tombée la semaine dernière, un blog en hibernation qui ronfle auprès du radiateur, un vote ouvert depuis trop longtemps sur la P.A.Léatoire... et elle vient nous parler de cuisine?" Se plaindront les lecteurs les plus assidus, les fidèles, les rescapés de mes longs silences, ceux qui commencent (et s'arrêtent? Bouh, que vous êtes méchants) à mes titres.

    Je vais de suite vous rassurer, non, je n'ai pas remplacé la lecture par la confection de gâteaux au chocolat et encore non, je n'ai rien à écrire sur les bûches de Noël et même, troisième non, pour obtenir un compte rond et équilibré, symbolique, je ne dirai rien, ou presque, sur ma cuisine en tant que lieu de vie. Non, parce que si je me lance là-dedans, il va falloir que j'explique pourquoi on y trouve ces jours-ci plus de tubes de dentifrice et de serviettes de toilette que de condiments et de torchons.

    Contre vents et marées (comme la Bretagne me manque... j'ai le mal du pays.), je lis toujours, quitte à utiliser une lampe torche, je lis exactement la même chose qu'il y a quinze jours, c'est dire si je suis obstinée et fidèle!

    J'exagère un tout petit peu, j'ai tout de même avancé, puisque je vais pouvoir présenter enfin:

    pepins_pommeLe goût des pépins de pommes, Katharina Hagena

    Avis chrono'

    Une histoire très tendre, qui brasse à feu doux, sans remous, l'histoire d'une famille sur trois générations de femmes. Un récit sans rebondissement ni longueur, qui a la douceur de ce qui est préparé maison, avec amour.


    J'aime beaucoup cette couverture. Je l'aimais déjà de loin, sur les rayons de la bibliothèque. Vous ne trouvez pas qu'elle donne envie de toucher? Les français (oui, je rattrape une semaine de silence forcé, de silence lourd, je suis pleine à ras bord de mots et j'ai du temps, avant de rentrer chez moi. Alors, aujourd'hui, c'est digression en promo. Dix pour le prix d'une. Pour la version courte, voir plus haut.). Nos français, donc, en avalent 20 kilos par an. Je laisse ma part, je dois dire, mais tout de même, c'est un beau fruit, je comprends qu'il vole un peu pour une fois la vedette aux nanas en cuir moulant des livres jeunesse et j'apprécie qu'on en revienne finalement où tout a paraît-il commencé, au péché (d'ailleurs, la pomme, c'est la version imberbe de la pêche, non?) à la tentation et à l'arbre aux pommes sous sa forme épurée, sobre, mais diablement tentatrice et tout aussi efficace en définitive... Comparons.

    mercy.jpg  fascin.jpg 

    Je conçois tout de même que ça reste une question de goût. Sans doute, certains préféreront ceux qui brillent davantage.

    J'ai cédé, tendu la main, cueilli le fruit. De près, c'est encore meilleur. Fantasmer n'est rien, je suis partisane d'une consommation immédiate, tactile, qui se doit de commencer par un examen minutieux du corps du délit. Minutieux, pas patient. Au risque de choquer, je pense que les préliminaires ne valent que dans l'incertitude d'être aimé. Traîner n'est légitime que si l'on redoute l'absence de réciprocité. La laideur s'accommode de temporiser, de faire durer, terrifiée à l'idée de plus voir revenir des instants volés. Là où le bonheur et la beauté courent à l'essentiel et à la franchise. Ce qui est laid et monstrueux se complaît dans l'ombre, le silence et la lourdeur.

    La lourdeur des mots, des phrases, de la syntaxe aussi... vous voyez, je ne suis pas  perdue, dans mes pensées, pas totalement... Mon écriture me ressemble. Elle s'étrangle où je m'étrangle.

    Au lit avec un livre, donc, je touche, mais seulement quand j'aime et quand je sens qu'il va se passer quelque chose d'intense et d'important. C'est rare. Je me souviens de mon premier soir et de l'attention prétée aux détails, de l'examen minutieux de ces croquis qui évoquent les cours de biologie, les coupes à reproduire. J'ai observé les petits numéros qui accompagnent, ici la pomme, là, la fleur, ou le pépin fendu dans sa longueur.

    J'ai lu très lentement. Deux, trois, peut-être quatre semaines. Je n'ai pas lu seule mais je n'ai pas non plus été gênée de partager.

    La narratrice hérite de la maison de famille, à la mort de sa grand mère. La petite tension provoquée en moi par l'association des thèmes "famille", "héritage", "souvenir", "maison" (voir Une promesse, ou Val-de-grâce lus cet été) a été rapidement dissipée.

    Les transitions sont impeccables, on passe avec fluidité d'une anecdote à l'autre, par petits bonds, de l'évocation tendre d'une grand-mère qui perd la tête et évolue dans le potager au beau milieu de la nuit aux plaies vives d'une tante qui a perdu son amour et sa fille.

    Sans parler de véritable suspense, quelques pistes s'ouvrent au début du roman et serpentent jusqu'à la fin. Chaque personnage est attachant. Y compris le grand père un peu rude qui adhéra en son temps au parti nazi.

    Et si j'ai ricané tout d'abord de ce pommier nimbé de sagesse, aux manifestations quelque peu surnaturelles, j'ai fini par accepter l'étrange poésie de sa présence. Il est le fil conducteur de la narration, un instrument littéraire, une image.  Mais elle n'est pas si mal menée, ça tient la route, au fond, cette histoire du goût des pépins de pomme. Le goût du détail, de l'infiniment petit. De ce qui n'était pas destiné à la consommation et qui s'est révélé, au final, meilleur que ce qu'on en attendait. L'ingrédient infime qui fait toute la différence. Et s'il me plaît, à moi, de penser que ce n'est pas un hasard s'il s'agit d'un fruit symbole de désir?

    Voilà. Je continuerais bien, mais pas seule. ça manque un peu de dialogue, tout cela, et d'échange.

    _________________________

    M****. est gravement malade et lutte pour sa vie. J'ai sûrement été maladroite en lui parlant ces derniers jours. Je le suis toujours quand je suis émue. Que dire? Comment adoucir? Comment aider? Comment consoler?

    M****. me recommande, à raison, de profiter à fond de ma vie, avant qu'on ne me l'écourte à coup de diagnostique et de pinces de crabe. Je lui dédie, comme je le fais parfois, cet article. Pour le bon goût de la compote. Parce que nous avons parlé de nos familles.

    Profiter, j'y songe. Simplement c'est plus simple à dire qu'à faire. On rencontre parfois un peu de résistance.

    Ce que j'aime, c'est écrire. Ce qui me rendrait heureuse, ce serait de savoir tellement bien le faire, que ça donnerait envie de me répondre. ça me fait une boule au ventre, ce désir là. C'est un pouvoir qui m'échappe et dont je suis avide.

    En attendant de m'améliorer, les brouillons, c'est ici. C'est chez moi. Ici je peux encore m'autoriser à dire "j'aime".

  • C'est idiot de s'en tenir là!

    on_juste_embrasses_pandazopoulos.jpgTéléthon.jpgOn s'est juste embrassés, Isabelle Pandazopoulos

    Avis chrono'

    Un roman jeunesse à destination des adolescents : vie dans une cité où tout se sait trop vite, échec scolaire, racisme, premiers émois, disputes entre amies, amour/haine de la mère, père disparu, fugue, dépression. Je crois que je n'oublie rien. C'est plutôt bien fait, mais c'est surtout super triste! A mettre entre les mains de vos hyperactifs hyperplaintifs. "Tiens, arrête de râler, ça pourrait être pire, tu pourrais t'appeler Aïcha".


    L'héroïne, Aïcha, se définit elle même comme une française qui porte un nom arabe. Elle habite juste à côté de la cité Paganini, où vivent tous ses amis. Un jour, elle embrasse le frère de sa meilleure amie. Le lendemain, la rumeur a fait d'elle la pute du quartier. Plus personne ne lui parle.

    Mais les soucis d'Aïcha ne font que commencer: sa mère, qui l'élève seule depuis le départ de son père, tombe dans une profonde dépression. Aïcha ne se connait pas d'autre famille, même si elle devine de sombres secrets derrière les silences de sa mère. Entre fuite et rage, elle ne sait plus où elle en est...

    Je suis entrée en possession de ce roman jeunesse par un acte délibérement autoritaire que je nommerai pudiquement "prélèvement". Concrètement, cela consiste à observer, intriguée, sur quelques mois la circulation de ce livre à la couverture si triste. Puis, à être témoin de l'un de ces échanges. Et à tendre la main pour intercepter l'ouvrage avant que l'ado suivant dans la liste d'attente ne le fourre dans son sac.

    Ce qui est bien, c'est qu'ils sont dociles, à cet âge et attendent de nous, sans en avoir l'air, que nous gardions un oeil sur leurs trafics divers et variés et pas toujours illégaux. Personne n'a protesté, même pas celle qui tendait déjà la main pour le récupérer, tant mon interception a eu l'air naturelle et oui... légitime! Voilà, pour la lecture, je suis l'autorité incontestée. Pour une fois, ils veulent bien partager. J'en profite.

    Mon avis, donc. (D'un coup, je me sens importante).

    Côté écriture, c'est correct. Je peux même être plus précise dans ma critique: ça remue beaucoup trop pour moi. Cela colle parfaitement à l'intrigue, mais Aïcha passe son temps à aller ici ou là puis retour, puis re-départ... Pas top pour mon mal des transports.

    En revanche, côté émotion, je pense que les adolescents doivent s'y retrouver. C'est brut, souvent, tulmultueux, tout en hésitations puis en nuances, on passe en deux phrases de la colère aux larmes.

    J'ai grandi à côté d'un foyer pour travailleurs immigrés. Mais je crois pas avoir été confrontée avant ma majorité à des problèmes "d'identité nationale". Ni à l'école, ni ailleurs. Du racisme, oui, un peu. Mais tout ce cirque, ce battage, autour des origines des autres, de leur religion... ça me laisse perplexe. Je ne suis même pas certaine, à vrai dire, qu'il y aurait un problème si on arrêtait d'en chercher un à tout prix... M'enfin, suis pas là pour parler politique. Et puis paraît que je suis un bisounours.

    Bref. Tout ça pour dire que je trouve ça triste, ce bouquin, pas vraiment optimiste de grandir dans un tel climat. Et le fait que je sache qu'on est pas loin de la réalité et que mes ados, là, ceux qui se le passent, adorent et s'y retrouvent, je trouve ça encore plus déprimant.

    Le thème de l'amour et de la sexualité est présent, dans le roman, mais c'est celui qui est traité le plus rapidement, en dépit du titre.

    Cela veut dire qu'ils aiment surtout cette narratrice qui ne sait plus où elle vit, ni avec qui, qui ne trouve pas sa place, sa culture, sa famille...

    Quand ils m'ont demandé si Madame il en existe d'autres des livres comme ça, j'ai songé "Mais qu'est ce que je lisais moi à leur âge?" ensuite "Ah oui... ça... qui ne colle pas trop avec leur demande" puis j'ai répondu que oui (parce que tout existe, suffit de chercher). A présent je suis dans la m....  et pour m'aider, je vais faire appel à mes copines expertes en littérature jeunesse et aux bibliothécaires qui bloguent dans le coin!

    Si vous avez des titres à conseiller dans les mêmes tons sombres, je note, je note!

    En attendant, je vais réinjecter ce petit livre dans le circuit, avec ma bénédiction, suis sûre que ça leur fera plaisir. (leur f'ra surtout une belle jambe, pour être réaliste...)

    Téléthon.jpg

    C'est aussi l'occasion pour ceux qui me lisent mais n'écrivent pas souvent de commentaires de laisser un petit mot. A l'occasion du téléthon, j'ajouterai un euro à mon propre don pour chaque commentaire laissé sur une de mes chroniques ce weekend.

    Dans la limité de l'élasticité de mon portefeuille, bien entendu!