Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Pharmacie - Page 31

  • Retombée en enfance

    Espions_frayn_couverture.jpgEspions, Michael Frayn

    Le second tome de ma pochette surprise. Un titre vers lequel je ne me serais pas dirigée spontanément, qui s'est révélé très bon!

    Le narrateur est un vieil homme chez lequel un parfum de fleurs va faire revivre des souvenirs d'enfance, au point de le pousser à retourner dans la rue où il vécut, durant la guerre, dans une banlieue anglaise.

    Stephen et Keith étaient deux copains, à l'imagination débordante, qui comme tous les enfants s'inventaient des jeux. Un jour, les deux garçons vont se persuader que la mère de Keith est une espionne allemande et le jeu cessera d'en être un.

    Davantage que le thème de la jeunesse en temps de guerre, ce roman s'attache à nous décrire cet instant insaisissable: la sortie de l'enfance. Les derniers jeux, dans lesquels on fait semblant de croire encore à l'impossible, mais sans plus être dupe. Quand ce qui n'était qu'imagination se met à avoir des conséquences réelles.

    «  Dans la vie, il y a tant de choses qui ressemblent à une sorte d'épreuve. Dix fois par jour, si on est un garçon qui espère devenir un homme, on doit ramasser son énergie, s'imposer un effort supplémentaire, montrer un courage qu'on ne possède pas vraiment. »

    Le mystère annoncé par le narrateur âgé perdure jusqu'aux toutes dernières pages puisqu'il s'applique à retracer les évènements avec les yeux de Stephen, à travers son regard et ses pensées d'autrefois, quand Stephen sentait confusément que ce jeu là était différent des autres mais sans comprendre.

    Un joli roman-énigme, roman d'apprentissage, aussi, pour ceux qui acceptent de temps à autre de se passer de vampires, de serial-killer, de psychotiques de tout poil.

  • Celui qui avait peur de s'engager

    Une_saison_blanche_et_seche.jpgUne saison blanche et sèche, André Brink

    Second livre de ma trilogie estivale, dont vous trouverez la présentation ici!

    Des trois, sûrement celui qui s'avérera coller le mieux à ma demande. Roman interdit à sa publication en Afrique du Sud en 1979 – l'Apartheid agonise, mais il faudra attendre 85 pour voir abrogé l 'Immorality Act , interdisant mariages et relations sexuelles entre personnes de couleurs différentes. Et encore quelques années pour la libération de Mandela.

    Une saison blanche et sèche relate l'entêtement d'un professeur Blanc à découvrir la vérité sur la mort de Gordon Ngubene, balayeur Noir de son école.

    Le fils de Gordon disparaît durant des émeutes. Deux mois plus tard, la police lui annonce que son fils est mort et enterré depuis des semaines. Cependant, Gordon reçoit de troublants témoignages... Jonathan aurait passé ces derniers mois en détention, torturé. Le père fait alors appel à Ben pour l'aider à découvrir la vérité. Peu après, c'est au tour de Gordon d'être emmené par la police de sureté, accusé de terrorisme.

    Un roman très prenant, très sombre, ce qui a constitué le seul obstacle à ma lecture. J'ai beau savoir qu'il s'agit là du passé, de l'Histoire, que l'Afrique du Sud est aujourd'hui une puissance importante, parfois même plus en avance que la France sur certains sujets de société, cette période me semble trop proche pour lire de façon détachée. Je me suis sentie pensive et triste durant toute ma lecture.

    J'ai particulièrement aimé la manière dont Ben nous est présenté. Son évolution. Sa nonchalance, son paternalisme inconscient du début face à Gordon. Oui, il veut bien l'aider, mais il n'y a pas à s'inquiéter, tout va rentrer dans l'ordre. Sa foi aveugle, sa confiance totale en la justice, car la justice est sienne, au fond, une justice de sa couleur, blanche, donc infaillible. Puis, le temps qu'il lui faut pour comprendre, pour se réveiller et se révolter. Le combat qu'il mène ensuite, que l'on devine voué à l'échec, qui va l'arracher à toutes ses certitudes, à son équilibre.

    « Vous pouvez toujours voir les autres; vous échangez des sons, mais tout n'est que coïncidence et tromperie. Vous êtes de l'autre côté. »

    « J'ai toujours considéré « mes frères » comme une chose allant de soi, et maintenant il faut que je reprenne tout à zéro. »

    Tandis qu'il ouvre les yeux, il regarde autrement son entourage, dont il s'attire le mépris. Trahisons des collègues, des amis, de sa propre famille... Galerie interminable de ceux qui le soutiennent, bien sûr, mais pas trop, pas longtemps. Qui préfèrent ne rien voir. Trouvent des excuses.

    «  Le prêtre secoua sa tête grise.

    - Je vous répète qu'ils ne savent pas. Vous ne me croyez pas? Je sais que c'est une chose terrible à dire, mais c'est vrai. Ils ne savent pas. Même quand ils tuent nos enfants, ils ne savent pas ce qu'ils font. Ils croient que ça n'a pas d'importance. Ils ne croient pas que nos enfants soient des êtres humains. Ils pensent que ça ne compte pas. »

    D'un bout à l'autre, un livre douloureux, dérangeant, qu'il est difficile de parcourir sans se demander à un moment ou à un autre: mes yeux, à moi, ouverts ou fermés?

  • Gros sur le coeur

    Coetzee_coeur_pays.jpgAu coeur de ce pays , J.M. Coetzee.

    J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce roman, très éloigné de mes précédentes lectures. Une écriture austère, compacte. Une forme pour le moins singulière: l'oeuvre n'est pas découpée en chapitres mais en 266 « blocs » de paragraphes (sur 186 pages) que j'aurais tendance à qualifier de versets mais cela n'engage que moi.

    Comme je peinais à atteindre les trente pages lues, l'idée m'a traversée, chose rarissime, d'abandonner et de passer à autre chose. Puis vint ce moment où je ne compris plus rien du tout: un personnage mort à la page précédente, qui se promenait comme si de rien n'était trente lignes plus loin..

    Je vérifiai que je n'étais pas revenue en arrière sans y prendre garde. Que je n'avais pas mal lu... Non. Je devais vraiment être stupide.

    Petit coup d'oeil sur la biographie de l'auteur. Prix Nobel de littérature (oups, ah bon?). Tout s'expliquait. Résignée à une lecture sans doute résistante jusqu'à la dernière ligne, je décidai néanmoins de persévérer mais sans aucun entrain. Mécaniquement.

    Il fallut attendre un soir de déprime particulièrement intense, pour comprendre que ce qui résistait le plus, dans cette histoire, c'était moi, par crainte de m'identifier à quelque chose dans ce récit sombre et pessimiste, par refus de me laisser porter. Le moral déjà dans les chaussettes il me fut bien plus facile d'entrer cet l'univers inconfortable et je dévorai en une nuit d'insomnie l'intégralité du roman.

    La narratrice se nomme Magda. Elle vit dans une ferme isolée d'Afrique du Sud, avec son père qui ne lui prête guère attention et quelques serviteurs Noirs. Les 266 passages constituent un monologue, une sorte de journal de sa souffrance: solitude dévorante, délires autour de l'image de son propre corps et surtout de son sentiment d'être incomplète, vieille fille laide et mal aimée, vierge.

    Se déroulent ainsi des fantasmes sexuels incestueux, des scènes de violence sauvage, de meurtres, de viols, sans que le lecteur ne puisse jamais distinguer ce qui est rêvé de ce qui est vécu par la narratrice puisqu'au terme de longs développements de plusieurs dizaines de pages, des contradictions apparaissent qui nous font douter de la « réalité » du récit. Le père mort est à nouveau vivant. Il n'est plus fait mention de la femme arrivée au début du texte, etc...

    Roman de l'incohérence, c'est une plongée finalement assez fascinante dans les rouages de la folie. Au huis-clos géographique répond un huis-clos littéraire: ce récit au point de vue unique se referme peu à peu sur lui-même, en étau, broyant au passage toutes les certitudes du lecteur qui referme le livre en se demandant si finalement quelque chose d'autre est arrivé dans la vie de Magda que simplement mourir de solitude, de manque d'amour et de frustration.

    Extrait:

    " Nous ne sommes qu'un tissu de caprices: un caprice succède à l'autre. Pourquoi ne reconnaissons-nous pas que nos vies sont vides, aussi vides que le désertque nous habitons, acceptant dès lors de les passer à compter des moutons ou à laver des tasses, le coeur joyeux. Je ne vois pas pourquoi il faudrait que l'histoire de nos vies soit intéressante. "

    Littéraires: Voir ici pour les références à Kafka.

    Ce roman est le premier titre de ma trilogie estivale :

    voir l'article de présentation.

     

  • Plus près de toi mon père

    Azzeddine.jpgMon père est femme de ménage, Saphia Azzeddine.

    Encore un roman à mille lieues de mes habitudes. Je le reconnais, je suis perturbée ces derniers temps.

    Choix sur un coup de tête, à la médiathèque. Juste parce qu'il était tout neuf. C'est maigre comme critère. Bon, le titre aussi avait un petit quelque chose d'intrigant.

    Le narrateur, Paul, est un jeune garçon de 14 ans. D'origine bretonne, il vit en banlieue parisienne, se trouve moche, se pose pas mal de questions sur la vie, sur les filles, sur l'avenir.

    Jusque là, un ado banal. Mais le reste du portrait est chargé.

    Un oncle qui a abusé de lui sexuellement, une soeur stupide qui ne rêve que d'être Miss mirabelle, une mère handicapée...

    Et ce fameux père qui est femme de ménage.

    Paul aime les mots. Il tente de s'en servir pour plaire à Priscilla, qui est d'une autre école, d'un autre monde et qui peut s'acheter du Babybel. Il les dévore dans le dictionnaire quand il accompagne son père qui nettoie les locaux de la bibliothèque.

    Ce père qu'il a du mal à aimer, parce que, dit-il, il le voit si souvent à quatre pattes.

    Tout le récit oscille entre un léger mépris pour lui et des bouffées d'amour.

    Une belle histoire (réaliste? Brrr quel monde...) que je trouvais vraiment très sombre et déprimante, au début, mais la fin m'a plu ainsi que le traitement du thème des relations père/fils.

     

  • Cujo à toutes jambes!

    Cujo_Stephen_King.jpg

    Cujo, Stephen King

    Dans le cadre du challenge proposé par Neph, retrouvailles (timides au début), avec Stephen King, qui a beaucoup marqué mon adolescence. Mon « choix », si l'on peut dire, s'est porté sur Cujo car c'était le seul des titres disponibles à la médiathèque que je ne connaissais pas encore.

    Rien à voir avec ce que j'attendais du titre (pas grand chose, à vrai dire). Et tout à voir avec mes souvenirs de cet auteur: des débuts très très lents, une mise en place méticuleuse, qui laisse deviner toute la suite sans pour autant nous gâcher le suspense. Comment fait-il cela? Aucune idée.

    Quelques familles dans l'état du Maine. Je n'irai pas jusqu'à dire « vie banale ». Je suis toujours un peu mal à l'aise face aux personnages peints par King. Des hommes rustres et brutaux qui battent leur femme résignée et sont incapables de leur donner du plaisir ou simplement un peu d'amour. Je trouve que chez lui, tout ce qui a trait à la sexualité est toujours malsain ou inquiétant. Mais je suis loin d'être une experte, mes souvenirs me trompent peut-être.

    Dans Cujo, deux familles principales. Dona et Vic, dont le couple subit quelques remous. Et les Cambers, heureux propriétaires de Cujo, un énorme et inoffensif Saint-Bernard qui, un jour, attrape la rage.

    Toute la tragédie est là, il n'y a plus qu'à laisser dérouler comme dirait un auteur que j'affectionne.

    Le tout extrêmement plausible, c'est sans doute là que réside l'horreur, même si ce n'est pas exactement ce que j'ai ressenti à la lecture. Du suspense, oui, mais pas de terreur. Un chien, même malade, reste un chien. J'aime les chiens.

    Un peu de surnaturel mais pas trop. Une pincée de rêves prémonitoires, de troublantes coïncidences...

    Challenge_king.jpg

    Je pensais valider une partie de mon challenge A vos Masques, mais finalement, non. Je n'ai pas eu peur, j'ai simplement été très très tendue, tenue en haleine, au point de ne pas pouvoir lâcher le livre alors que les heures dévolues au sommeil défilaient sur mon réveil. Mais quand j'ai éteint vers 2h, une fois la dernière page tournée, je n'ai pas eu de mal à m'endormir.

    Je pense que je peux faire mieux côté peur, mais j'ai aimé Cujo!

    Qui ne compte donc que pour le challenge Stephen King. Je vais tâcher de voir le film rapidement.

    Un bon site: Club Stephen King