Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Tale me more - Page 19

  • Etat second

    Qui c'est qui a réussi à se faire confiner juste au moment où la longueur de ses cheveux devenait inconvenante ? Qui a de la purée d'épinards sur ses plans (mais de la purée maison donc ça va) ? Qui n'a d'ailleurs plus de table de cuisine - devenue un bureau - et devra manger sur ses genoux dans le canap' pour les x prochains mois ? Qui bosse même le dimanche parce qu'elle a beaucoup moins envie de jouer à la console quand elle le peut davantage? Esprit de contradiction de m**** . Qui bosse en apparence plus que sa part, car sa femme, qui s'ennuie, a eu envie d'apprendre le métier et sort à présent tranquillement elle aussi son petit quota de plans ? 

    Et qui fait sa maligne alors que bon... elle flippe quand même ... Pour la famille, pour ceux qui sont loin, parfois pas tout jeunes, parfois malades et auxquels elle tient ?

    Bienvenue dans le grand confinement 2020. J'attendais plutôt les J.O. cette année. Et mes vacances en Bretagne. ça sent le roussi , hein ? Quand on nous laissera sortir, ce sera pour retourner au bureau...

    On pourrait croire le moment propice à une débauche de lectures. C'est sans compter sur le monstre aux dents qui poussent, qui œuvre surtout la nuit. Mais j'ai quand même concocté un programme, au cas où mon boss n'aurait plus d'imagination pour me télé-commander des trucs à distance. Si ça arrive, ne comptez pas sur moi pour rejoindre les profs dans un champ de patates. Ce sera chaise longue sur le balcon.

    Parlons lecture maintenant.

    Lire la suite

  • Northanger Games

    jane austen, la mère des sarcasmes, classique recommandé, litt anglaiseNorthanger Abbey, Jane Austen

    Petit cadeau surprise du book club de Noël durant lequel le sort m'a favorisée, c'était un vrai régal (sur les 85 premiers pourcents, autant le dire de suite la fin n'a aucun intérêt). 

    Héroïne de ce court roman, Catherine est une jeune femme (aujourd'hui ce serait une ado) prête à faire son entrée dans le monde. Elle quitte ses parents pour Bath, lieu mondain par excellence, où elle va résider avec des amis de la famille, danser et faire semblant de connaître du monde, ce qui n'est pas le cas. Heureusement elle fait rapidement la connaissance d'une autre jeune fille comme il faut et de sa profusion d'amitié ainsi que de son frère d'une galanterie inégalable tant que vos poches sont pleines.

    Sa naïveté est confondante et son imagination, nourrie de ses lectures, n'est pas sans évoquer le personnage de Mme Bovary.

    "Elle avait lu trop de livres pour ignorer combien il est facile de mettre dans un cercueil une figure de cire et de mener un faux enterrement."

    Parodie de toute la littérature de son époque, romans noirs, romans sentimentaux, et texte bourré de sarcasmes sur l'hypocrisie des relations humaines, Northanger Abbey est un petit bijou pour qui sait apprécier les sous-entendus. Je me suis bien amusée, voilà un classique comme je les aime.

     

     

  • Juge et partie

    couverture, harari, yuval, sapiensSapiens : Une brève histoire de l'humanité, Yuval Noah Harari

    "On n'a aucune raison de penser que les cultures qui ont le mieux réussi dans l'histoire soient nécessairement les meilleures pour Homo Sapiens."

    Ouvrage très intéressant qui retrace le parcours de l'humanité en mélangeant des notions d'histoire, de sociologie, d'économie, d'histoire des sciences et techniques, de philosophie (et j'en passe) en nous invitant à examiner d'où nous venons et à nous interroger sur la suite.

    C'est très bien posé dès le départ, nous sommes en tant qu'espèce un cas unique : du genre homo, il ne reste plus que nous, les sapiens. Toutes les autres espèces se sont éteintes. Nous sommes sans concurrence et sans point de comparaison. De quoi prendre la grosse tête. 

    Le livre fourmille de petits détails, de virages, c'est ça qui est magique et vertigineux il s'en est fallu d'un milliard de petits riens pour que nous ne soyons pas nous. Ainsi avec la domestication du feu, la digestion est facilitée, des intestins plus courts font l'affaire. Mais il n'est pas seulement question de l'évolution au sens biologique. Plus largement, ce livre est une histoire de la pensée.

    Pourquoi est-ce l'Europe et non l'Asie qui a essaimé ses colonies partout? L'Asie dominait à l'époque. En technique, en nombre. C'étaient les Etats-Unis d'alors. Puis il y eut 35 000 km de voies ferrées en Europe avant que l'Asie ne s'y mette. Ce n'était pas dans leur mentalité. 

    Et tant d'autres questions... Pourquoi cet engouement mondial pour le capitalisme ? Comment une petite plante de rien du tout comme le blé a-t-elle asservi l'homme au point de se servir de lui comme agent pour proliférer dans le monde entier ? 

    On apprend que ce n'est pas seulement le langage qui permet de constituer de grands groupes sociaux, mais la particularité du langage humain de décrire des choses imaginaires. On ne désigne ainsi plus seulement un troupeau, ou des noisettes. On peut évoluer vers des concepts sans existence matérielle - et qui ne tiennent d'ailleurs que grâce à un aveuglement mutuel et consenti - tels que l'argent, la nation, l'entreprise. 

    On y traite encore de la fondation des préjugés raciaux ou de genre. L'idée que le patriarcat s'est développé parce que physiquement, dès le départ, l'homme avait l'avantage de la force physique est balayée en deux lignes :  les exemples ne manquent pas d'hommes soumis à d'autres alors qu'ils sont plus forts individuellement ou collectivement. L'esclave qui travaillait rudement au champ vingt heures par jour avait plus de force que son maître bien gras. La main d'oeuvre est souvent plus forte que le patron. La chair à canon que son capitaine. Le pouvoir est assis davantage par une domination intellectuelle, morale ou sociale que par la force pure. 

    "Bref, la recherche scientifique ne saurait prospérer qu'en alliance avec une idéologie ou une religion. L'idéologie justifie les coûts de la recherche. En contrepartie, elle influe sur l'ordre du jour des chercheurs et détermine l'usage fait des découvertes."

    La partie presque finale sur l'articulation entre science et technique était tout aussi passionnante. Il n'y a que la fin qui m'a déçue mais c'était prévisible. L'avenir de l'humanité est un gigantesque point d'interrogation. L'auteur n'est ni optimiste ni pessimiste. Il aborde (trop) succinctement la quête de l'immortalité par la médecine, le transhumanisme, les enjeux écologiques etc. 

    En résumé, je conseille. C'est par manque de temps non par manque d'intérêt que j'ai traîné à le finir ! 

  • Le chemin des dames

    ronde nuit, waters, roman LGBT, couvertureRonde de nuit, Sarah Waters

    Je voulais choisir ma dernière lecture de l'année avec soin. C'est symbolique. J'ai pris le dernier Sarah Waters, autrice qui a déjà fait quelques apparitions sur ce blog, avec Affinités , Caresser le velours ou Indésirable. Dernier au sens où il ne m'en reste plus, j'ai tout lu d'elle. Il faut dire que c'est une incontournable - en qualité - de la culture LGBT.

    Je me suis plongée dedans comme ça ne m'est guère arrivé dans l'année. Plongée par petites apnées, souvent interrompue par les devoirs sociaux des fêtes de fin d'année. Mais même pour une page, même pour deux minutes, je me sentais descendre et complètement m'extraire de la réalité. Elle a une façon de rendre vivante n'importe quelle période historique que j'ai saluée même dans ceux de ses romans qui ne m'ont pas emballée.

    Pour le suspense, c'est maîtrisé à l'aide de techniques éprouvées. Un peu comme un Stephen King. Ici on se place d'abord quelques années après la seconde guerre mondiale. On découvre les personnages. Un garçon, qui a passé la guerre en prison. Deux femmes qui travaillent ensemble dont l'une a une liaison avec un homme marié et quelques autres secrets. Une autre qui était ambulancière. Puis les deux parties suivantes nous font faire chacune un bond en arrière, jusqu'à nous plonger au cœur des bombardements à Londres. Et jusqu'à ce qu'on comprenne le fin mot de chacune des histoires individuelles, toutes liées. Le fin mot ayant l'originalité d'être le début, chronologiquement. C'est bien trouvé.

    C'est une ambiance que je ne peux vous décrire, faite de minuscules détails. Les églises éventrées. Les gens qui courent aux abris à chaque alerte et ceux qui en ont marre à force et restent dans leur lit. Les panneaux qu'on enlève dans les rues pour que les allemands ne puissent pas s'y retrouver s'ils arrivent. La haine à laquelle doivent faire face les objecteurs de conscience.

    Je me suis sentie amoureuse. (C'est normal, c'est plein de femmes) En proportion, c'est comme un roman hétéro, mais inversé. C'était très étrange de lire des passages sur l'amour, le couple, le coup de foudre, l'après rupture, si proches de ce que j'ai pu vivre. Il y a de ces passages sur la jalousie... ça sent le vécu. Et puis c'était marrant, cette scission entre les lesbiennes masculines et les autres. Au début j'ai pris ça pour une caricature et puis en y réfléchissant, c'est une vraie question, très intéressante. Voilà, ça c'était le bonus juste pour mon plaisir personnel.

    Mais surtout, le roman parle des femmes, de la condition des femmes, de tout ce que la guerre a engendré de transformations. Du rôle qui n'est plus le même, des habits qui ne sont plus les mêmes, de l'impossibilité de retourner à la vie d'avant. Il parle aussi de l'opprobre jeté sur les liaisons hors mariage. Des avortements clandestins au péril de la vie des jeunes femmes.

    C'est un des plus réussis. Peut-être le plus réussi, allez, j'ai un attachement sentimental à Affinités mais je pense que celui-ci est objectivement meilleur.

  • Teubés or not teubés

     

    girafe sophie, couverture, philo, forum le mondeTous philosophes, Collectif

    Et voilà, à force de lire des bluettes pour ado et des romans lesbiens j'ai perdu tout mon lectorat intellectuel ! Est-il encore temps de redresser la barre? J'ai eu envie de tenter le coup avec ce petit recueil qui retranscrit les interventions de divers·es philosophes lors du forum annuel organisé par le journal Le Monde et la ville du Mans.

    Cette année-là, le thème était donc "Tous philosophes ?".

    Moi qui ai complètement raté l'épreuve de philo au bac et qui cherche encore ce qu'on pouvait bien y attendre de moi... j'ai enfin pu lire tout un tas de dissert' et les comparer !

    Et je me suis sacrément amusée à essayer d'imaginer les différent·es locuteurs et locutrices. C'est très politique ces machins là - non seulement le domaine de la philo, mais le fait de venir se montrer et échanger dans un forum. D'ailleurs ma chouchoute, c'est celle qu'on sent un petit peu aigrie et dont le texte contient surtout des allusions perfides à des collègues et des règlements de compte. J'ai beaucoup ri. Ambiance profs d'université garantie !

    Qui sont nos autres candidats ?

    Les tenants de la tradition qui déroulent tranquillement des propos intéressants mais convenus.

    L'érudit qui cite davantage d’œuvres que les autres et délaisse Socrate pour des noms plus exotiques.

    Des femmes. On y veille soigneusement. D'ailleurs elles se saisissent de leurs jupons pour argumenter sur un "toutes philosophes ?" .

    Un abscons qui ne maîtrise pas son plan et qui m'a égarée en cours de route.

    Un malin qui s'est trouvé une niche avec la figure du philosophe chinois.
    Un autre malin qui s'est quasi glissé dans la niche du précédent.

    Un autre auquel j'aurais bien collé un "hors sujet" en haut de la copie.

    Au total une quinzaine d'intervenants qui, à eux tous, vous triturent le philosophe, l'examinent sous toutes les coutures. Dans l'espace, dans le temps, en jouant sur le mot, en sondant les masses et les élites. Certains sont scolaires dans leur exposé, d'autres moins.

    Je pense que j'aurais encore plus apprécié l'expérience si le sujet avait été autre que la philosophie elle-même. C'est comme quand les écrivains parlent d'écriture, je me lasse rapidement.

    Et pis d'abord j'en connais un en vrai, un philosophe. Il est cool et il cuisine des lentilles.