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amour - Page 3

  • C'est idiot de s'en tenir là!

    on_juste_embrasses_pandazopoulos.jpgTéléthon.jpgOn s'est juste embrassés, Isabelle Pandazopoulos

    Avis chrono'

    Un roman jeunesse à destination des adolescents : vie dans une cité où tout se sait trop vite, échec scolaire, racisme, premiers émois, disputes entre amies, amour/haine de la mère, père disparu, fugue, dépression. Je crois que je n'oublie rien. C'est plutôt bien fait, mais c'est surtout super triste! A mettre entre les mains de vos hyperactifs hyperplaintifs. "Tiens, arrête de râler, ça pourrait être pire, tu pourrais t'appeler Aïcha".


    L'héroïne, Aïcha, se définit elle même comme une française qui porte un nom arabe. Elle habite juste à côté de la cité Paganini, où vivent tous ses amis. Un jour, elle embrasse le frère de sa meilleure amie. Le lendemain, la rumeur a fait d'elle la pute du quartier. Plus personne ne lui parle.

    Mais les soucis d'Aïcha ne font que commencer: sa mère, qui l'élève seule depuis le départ de son père, tombe dans une profonde dépression. Aïcha ne se connait pas d'autre famille, même si elle devine de sombres secrets derrière les silences de sa mère. Entre fuite et rage, elle ne sait plus où elle en est...

    Je suis entrée en possession de ce roman jeunesse par un acte délibérement autoritaire que je nommerai pudiquement "prélèvement". Concrètement, cela consiste à observer, intriguée, sur quelques mois la circulation de ce livre à la couverture si triste. Puis, à être témoin de l'un de ces échanges. Et à tendre la main pour intercepter l'ouvrage avant que l'ado suivant dans la liste d'attente ne le fourre dans son sac.

    Ce qui est bien, c'est qu'ils sont dociles, à cet âge et attendent de nous, sans en avoir l'air, que nous gardions un oeil sur leurs trafics divers et variés et pas toujours illégaux. Personne n'a protesté, même pas celle qui tendait déjà la main pour le récupérer, tant mon interception a eu l'air naturelle et oui... légitime! Voilà, pour la lecture, je suis l'autorité incontestée. Pour une fois, ils veulent bien partager. J'en profite.

    Mon avis, donc. (D'un coup, je me sens importante).

    Côté écriture, c'est correct. Je peux même être plus précise dans ma critique: ça remue beaucoup trop pour moi. Cela colle parfaitement à l'intrigue, mais Aïcha passe son temps à aller ici ou là puis retour, puis re-départ... Pas top pour mon mal des transports.

    En revanche, côté émotion, je pense que les adolescents doivent s'y retrouver. C'est brut, souvent, tulmultueux, tout en hésitations puis en nuances, on passe en deux phrases de la colère aux larmes.

    J'ai grandi à côté d'un foyer pour travailleurs immigrés. Mais je crois pas avoir été confrontée avant ma majorité à des problèmes "d'identité nationale". Ni à l'école, ni ailleurs. Du racisme, oui, un peu. Mais tout ce cirque, ce battage, autour des origines des autres, de leur religion... ça me laisse perplexe. Je ne suis même pas certaine, à vrai dire, qu'il y aurait un problème si on arrêtait d'en chercher un à tout prix... M'enfin, suis pas là pour parler politique. Et puis paraît que je suis un bisounours.

    Bref. Tout ça pour dire que je trouve ça triste, ce bouquin, pas vraiment optimiste de grandir dans un tel climat. Et le fait que je sache qu'on est pas loin de la réalité et que mes ados, là, ceux qui se le passent, adorent et s'y retrouvent, je trouve ça encore plus déprimant.

    Le thème de l'amour et de la sexualité est présent, dans le roman, mais c'est celui qui est traité le plus rapidement, en dépit du titre.

    Cela veut dire qu'ils aiment surtout cette narratrice qui ne sait plus où elle vit, ni avec qui, qui ne trouve pas sa place, sa culture, sa famille...

    Quand ils m'ont demandé si Madame il en existe d'autres des livres comme ça, j'ai songé "Mais qu'est ce que je lisais moi à leur âge?" ensuite "Ah oui... ça... qui ne colle pas trop avec leur demande" puis j'ai répondu que oui (parce que tout existe, suffit de chercher). A présent je suis dans la m....  et pour m'aider, je vais faire appel à mes copines expertes en littérature jeunesse et aux bibliothécaires qui bloguent dans le coin!

    Si vous avez des titres à conseiller dans les mêmes tons sombres, je note, je note!

    En attendant, je vais réinjecter ce petit livre dans le circuit, avec ma bénédiction, suis sûre que ça leur fera plaisir. (leur f'ra surtout une belle jambe, pour être réaliste...)

    Téléthon.jpg

    C'est aussi l'occasion pour ceux qui me lisent mais n'écrivent pas souvent de commentaires de laisser un petit mot. A l'occasion du téléthon, j'ajouterai un euro à mon propre don pour chaque commentaire laissé sur une de mes chroniques ce weekend.

    Dans la limité de l'élasticité de mon portefeuille, bien entendu!

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  • La mémoire qui flanche

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    Un pedigree, Patrick Modiano

    Avis chrono'

    Un récit autobiographique qui ne verse pas dans le sentimentalisme et qui, sans être renversant, m'a touchée.


    note.jpg

    L'imbécile que je suis a rendu le livre (audio) avant d'écrire son billet... Pour les citations, c'est fichu.

    Aujourd'hui, parlons de Modiano. Je vous devine surpris - "Pas son genre ça..." - Si seulement vous saviez! Plus rien de ce que je fais en ce moment n'est mon genre. D'abord il n'y a plus rien qui me tente au rayon livre audio de la petite bibli. Et pour la grande, je n'ai plus le temps d'y aller. Alors voilà, mea culpa, cette semaine, je me suis retrouvée à rouler 30 minutes en écoutant... radio Grand Ciel. Vous ne connaissez pas? Je vous mets sur la piste? Le Ciel, avec un grand 'C'? La méthode de trois 'P' pour faire durer votre couple? (Programmer, Protéger et ... tss j'ai pas assez bien écouté... Pardonner? Parler? Parler ça me semble bien mais ce n'était pas cela). Vous ne voyez toujours pas? Et si j'ajoute des exégèses de textes bibliques, vous y êtes?

    Le plus drôle, c'est que ça n'était pas désagréable. Mais quand même j'ai senti qu'il était temps que je trouve quelque chose à me mettre sous l'oreille, avant d'entrer dans les ordres.

    Début de semaine, donc, avec Un pedigree, de Modiano. Oh mon Dieu (voilà ça déteint déjà...) me suis-je dit après les quinze premières minutes. Ce n'était que succession de noms propres, des femmes, des hommes, de la famille, des villes. Impossible de m'y retrouver.

    Il s'agit d'un roman autobiographique dans lequel Modiano revient sur son enfance et notamment sur la vie de ses parents, après la guerre.

    modiano_boutiques_obscures.jpgJ'avais déjà lu, peu de temps après l'ouverture de ce blog Rue des boutiques obscures, sans trop savoir comment le prendre. Le narrateur courrait d'un bout à l'autre de l'histoire derrière son identité (il souffrait d'amnésie), me perdait lui aussi dans une énumération de noms et de lieux. J'ai détesté. Le seul point positif était ce jeu de piste, cet homme renvoyé comme une bille d'une piste à une autre, d'un témoin à l'autre, ici à cause d'un souvenir confus, là grâce à une photo... C'était très froid comme récit.

    Dans Un Pedigree, j'ai retrouvé avec une grande surprise des noms propres sortis tout droit de ma précédente lecture, là je ne comprenais plus. Fiction? Autobio? J'ai fini par m'habituer, au moins, je me sentais en terrain connu. J'ai même aimé, à la fin. Je n'en lirais pas quinze du même genre, mais ce ton documentaire, ces faits alignés sans trop de sentiments, comme de simples constats, m'ont plu. Sans pouvoir citer les mots exacts, je me souviens d'un moment où il justifie  cette distance et ce ton glacé et objectif.

    Il re-construit une enfance qui n'a rien d'enviable, à mon sens, à partir d'objets récupérés. Comme si ça ne venait pas d'un coeur, mais d'une boite en carton qui sent la poussière. (ça, c'est moi qui le pense).

    Curieuse relation que celle qui l'unit (ou le désunit) à son père. Drôle d'enfance racontée sans entrer dans les sentiments du principal concerné, comme vue de de l'extérieur, comme si les lieux qui se succèdent, les amis de la famille aux noms égrenés, tout cela pouvait suffire à retracer une vie.

    Et ce n'est pas idiot, au fond. Peut-être que cela ne compte pas, ce qu'on peut dire de nous-même, de nos joies, de nos désirs, de notre envie d'aider ou de détruire. D'ailleurs qui entend? Peut-être que tout ce qui doit rester de nous après la mort, ce sont quelques photos, des tickets de train ou de ciné, des adresses. Le concret.

    J'ai songé à Val de Grâce lu cet été, qui parlait aussi d'enfance, de mémoire, qui était plus joyeux et que je n'ai pas aimé.

    Là encore, le lieu était le centre de tout, le centre d'un monde et d'une personnalité.

    Ce narrateur-ci est toujours bringueballé d'une ville à l'autre et ce n'est pas un enfant heureux, ou si peu.

    Le secret du bonheur d'une enfance serait-il de ne jamais déménager?

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  • Sensations et sentiments

    Bronte_Jane_Eyre.jpgJane Eyre, Charlotte Brontë

    Avis chrono'

    Ce mélange entre une psychologie très travaillée, d'un réalisme parfois époustouflant et certains épisodes au romantisme exacerbé, ou pleins de superstition naïve ne manque pas d'intérêt. Un délicieux classique de la littérature anglaise!


    De surprises en surprises

    note.jpgUne lecture multi-supports, étalée sur plus d'un mois. Une vingtaine d'heures d'écoute mêlées de quelques e-pages sur mon reader tout neuf (un avis dans les prochains mois, le temps de m'habituer), le soir lorsque dévorée d'impatience je ne pouvais attendre au lendemain.

    Nouvelle occasion de bénir ma capacité à n'avoir jamais entendu parler des plus grands classiques, sinon par leur titre et leur auteur. Cette Jane m'attendait depuis des années, sans que je sache le moins du monde de qui il s'agissait. Le nom de Brontë m'avait-il influencé? Ma surprise fut grande, au début, de me trouver face à une héroïne enfant. A peine m'étais-je habituée à cette idée que le roman bondissait une première fois en avant dans le temps, pour finalement s'étaler sur la moitié d'une vie.

    Un roman d'une taille conséquente! Autant de parties, autant de tonalités différentes. De l'une à l'autre, le thème et l'intention semblent parfois si dissemblables qu'il m'est arrivé de penser que Charlotte Brontë, de crainte de ne jamais écrire de second livre, avait déversé en vrac toute sa fertile imagination dans celui-ci.

    L'enfance sous la férule d'une tante sans tendresse. L'éducation dans un austère pensionnat de jeunes filles, à souffrir du froid et de la faim, mais où se développe cette personnalité hors du commun, esprit curieux et vif, avide de l'affection de ses prochains. Puis la jeune femme...

     

    De l'amour et de la femme anglaise

    Figure qui par certains côté m'a évoqué l'actuel « féminisme » (dans ce qu'il a de bon), cette Jane là possède une grande force de caractère. Elle résiste quand il faut résister, aussi bien physiquement que moralement. C'est un esprit intelligent et complet, cultivé, raisonnable. J'ai apprécié cette force vive et son amour de la liberté, des grands espaces. Même si, aux côtés de son M. Rochester, elle devient un peu godiche. Mais je peux comprendre.

     

    Mon siècle de prédilection

    Durant la première dizaine d'heures, j'étais emballée. Transportée, c'est le bon mot. Amoureuse, comme je me sens parfois, quand tout va bien, que tout est bon, que je me sens au chaud et à l'abri, avec le livre de mes rêves. La littérature du XIXe, emporte toujours mon adhésion. Française, anglaise, peu n'importe, dans toute sa diversité.

    Là, j'aimais tout, le langage délicieusement désuet et délicat. La voix mélodieuse de la lectrice et sa façon de prononcer tantôt "Djaine", tantôt "Jaine", ou "Jeanne". Je tuerais pour avoir cette voix là, quand vient mon tour de lire, le soir! Le léger fond de religion et de morale, aucunement agressive. La qualité des développements psychologiques, qui me rendait ces personnages si familiers, si consistants.

    Toute seule dans ma voiture, quand mon cd du jour arrivait à la fin, je m'enthousiasmais pour ce que je considérais comme un chef d'oeuvre.

    J'ai le regret d'avoir, depuis, un peu nuancé ces débordements sentimentaux (mais que voulez-vous, par moment c'était si romantique! C'est contagieux, l'amour!). Dans la suite du récit, quelques longueurs épouvantables ont un peu usé ma patience. Le dénouement, que je pensais (un peu à tort, finalement) très prévisible, tardait à venir. Surtout, j'étais gênée de voir les interventions surnaturelles se multiplier.

     

    Fantômes, farfadets et fées-nomènes...

    J'exagère, comme toujours, sans quoi vous ne me reconnaitriez plus. Pas de marraine la fée dans ce roman ni de petits bonshommes verts,  mais de petites touches de superstitions qui me firent beaucoup rire, au début, lorsque la petite Jane se blottissait dans son lit, persuadée d'entendre des fantômes. Puis il y eut le « Gytrash » cette sorte d'esprit que la jeune fille crut entendre. Tout cela me plut beaucoup.

    C'est l'excès de « signes du destin », surtout, par la suite, de coïncidences vraiment grossières, qui m'a dérangée. Pas tant en eux-mêmes que parce qu'à mes yeux, ils juraient avec l'ambiance générale du roman. Dans ce récit, nous rebondissons sans cesse d'un développement attendu à une incroyable péripétie. D'un personnage paisible et froid à une folle furieuse. Du sentimentalisme un peu niais aux réfléxions profondes. Du chaud au froid.

    Mais ce n'est qu'un avis très personnel, aucunement une critique ou un défaut qui devrait dispenser quiconque de se plonger dans ce texte célèbre à juste raison!

    Je vois encore 1000 choses à dire, 1000 thèmes à traiter... Féconde lecture!

    1er livre lu dans le cadre des Baby challenges 2011: catégorie CLASSIQUES.

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  • Je l'aime encore

    coe_une_touche_d'amour.jpgUne touche d'amour, Jonathan Coe

    Avis chrono'

    Tout à fait différent du premier. Moins émouvant, plus conventionnel, mais même plaisir à m'interroger sur le sens profond des évènements. A mettre en haut d'une P.A.L.


    Mon challenge Jonathan Coe se poursuit, avec deux jours de retard je publie mon billet sur ce deuxième roman.

    Difficile d'éteindre la lumière, le soir cette semaine, tant j'avais envie de connaître la fin de ce très bon roman. Autant le dire tout de suite, pas une larme versée, c'était vraiment très différent de La femme de hasard  (avis à lire ici).

    J'aime, dès les premières pages cette impression d'une écriture familière. Pourtant je n'ai aucune facilité à repérer des « styles ». Mais j'ai aimé, bien plus saupoudré que dans le premier roman, retrouver cette façon d'interpeller le lecteur et de tourner en dérision l'écriture même. Les intellectuels sont un peu malmenés...

    «  J'imagine que l'université jouait un rôle important dans votre vie intellectuelle et sociale?

    - Oui, en effet. C'est là que nous achetions nos sandwiches. »


    J'avais compris, à la lecture de la 4e de couv' qu'il serait question de Robin, éternel étudiant, un peu raté, accusé un jour de « s'être exhibé devant un petit garçon ». Je ne suis pas d'accord avec cette façon de présenter l'histoire, mais il faut bien écrire quelque chose au dos du livre... Tâche difficile face à un livre sans véritable intrigue centrale.

    Robin est bien là. Sans doute, c'est de lui qu'il est question le plus souvent. Mais j'ai comme l'impression que chez Coe, ça ne suffit pas à faire un héros, ni même un personnage principal.

    Robin est bien un paumé, qui traine sa déprime et sa thèse de cinq ans d'âge, à peine entamée, sur le campus de Coventry. Mais cette histoire d' exhibitionnisme ne me semble qu'un prétexte à étudier une fois encore les mécanismes obscurs des relations humaines.

    J'aime ces textes plein d'humour. J'aime la scène des copains qui se retrouvent pour parler du bon vieux temps, mais chaque fois, leurs points de vue sur le même souvenir sont diamétralement opposés...

    Soirée de bal vue par Ted:

    « la cornemuse saluait l'aube », « nous étions ensemble tous les trois, à regarder la brume caresser l'eau […] main dans la main, bras dessus bras dessous »

    Vue par Robin:

    « Il était allé à ce bal à contrecoeur […] il s'était trouvé isolé triste et penaud » « Ted se penchait pour vomir dans les eaux boueuses de la Cam ».


    Autre point notable, le texte est découpé en quatre parties, quatre journées, pour être précis. A l'intérieur de chacune, un des personnages entre en possession d'une nouvelle écrite par Robin. Ces récits enchâssés ont leur propre autonomie, j'ai beaucoup apprécié le n°2, "le chanceux", par exemple. Les personnages d'une touche d'amour tentent ensuite de tisser des liens entre la personnalité de Robin et le contenu de ses écrits, qui sont assez semblables, par leurs thèmes, à ceux de Jonathan Coe.

    Est-ce une invitation, pour nous, à faire de même? A deviner une intention, une ligne de conduite, à travers le récit (les récits)? C'est assez dingue comme procédé, et là, ça me donne le tournis...

    J'aime remarquer la récurrence de la déprime, du suicide, des difficultés à communiquer et à nouer des relations durables et sincères... Mais je n'arriver pas à en dégager une thèse nette, facile à résumer. Pourtant, au fond, je sens confusément que le message est limpide est très humain, bien moins sombre qu'il n'y paraît.

    Je crois que c'est là justement tout ce qui me séduit Cela ressemble assez à ma façon d'envisager les choses, tortueuse et complexe en apparence, mais soutenue par un tout petit nombre de postulats sans surprise, dont l'originalité, au fond, est d'être souvent oubliés: Il est impossible d'être heureux seul, le bonheur se mesure à la qualité de nos relations aux autres. Les personnages torturés manquent leur chance faute de laisser parler leurs instincts. « Comme beaucoup de gens, je me plais à cultiver un sentiment de ratage ».

    Les exemples sont nombreux dans La femme de hasard et encore plus dans Une touche d'amour. Je pense au récit n°4, dans laquelle un homme qui cherche à tout contrôler se prend un méchant coup, car il n'a pas su voir en sa femme une personne autonome et libre, à la conduite aléatoire.

    Je pense aussi à Robin, bien sûr. Il contrôle ses désirs, s'empêche de ceci ou de cela, ne regarde pas assez autour de lui (comme Lawrence, le chanceux) et au final...

    J'aime entendre d'autres mots que les miens affirmer qu'une dispute amoureuse est reconnaissable entre toutes.

    « Merde! Fit-elle. Nous sommes amoureux... non? Nous sommes amoureux. Ça, c'est une dispute d'amoureux. Et ce qui m'ennuie vraiment, ce que nous n'avons fait aucune des choses délicieuses que les amoureux sont censés faire entre eux avant de commencer à se disputer. »

    J'aime, encore, ce respect pour le hasard. Parce que je suis adepte du laisser faire, comme ça vient.

    J'ai l'impression que ce M. Coe ne se préoccupe que du bonheur. Que sous un extérieur assez sombre, il y croit profondément. Le bonheur est peut-être le seul domaine dans lequel on se doit d'être extrême... D'être d'une rigoureuse exigence. Mais cela n'engage que moi et je déborde du texte.

    «  Vous voulez dire qu'on peut se contenter d'une quantité modérée de vérité, d'honnêteté, de justice ou de bonheur? Vous voulez dire que tant qu'on est modérément protégé du danger de famine, de la menace de torture […] on doit s'estimer heureux? »

    Donc, j'aime. J'adore. Je vous laisse lire. Si jamais vous voulez revenir en discuter après, ce sera avec plaisir. J'aime ces romans aux antipodes de la limpidité, qui donnent matière à discussion.

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  • L'amour? Voyez avec la tombe d'à côté.

    mazetti.jpgLe mec de la tombe d'à côté, Katarina Mazetti

    «  Parfois, j'ai l'impression que je suis en train d'essayer d'apprendre son corps par coeur, comme si j'avais peur qu'il disparaisse. »

    Je ne m'explique pas comment ce « roman d'amour tendre et débridé » (C'est la 4e de couv' qui le dit) est entré chez moi. Vraiment pas mon genre.

    La composition est simple: les deux personnages principaux se rencontrent dans un cimetière, et prennent la parole, un chapitre chacun. Procédé qui pour une fois n'est pas creux et attire notre attention sur les différences de perception d'un même évènement.

    Lui, Benny, est un agriculteur suédois. Il aime ses vaches et les napperons de feue sa maman.

    Elle, Désirée, est bibliothécaire. Son mari était un écolo gentil comme tout mais chiant à mourir: la preuve, il s'est fait renversé à vélo.

    La voilà jeune veuve. Quand, à la page 23, elle s'est mise à parler en ces termes «Assis, pas bouger!» à ses ovules...  j'ai tout de suite compris qu'on allait pas s'entendre elle et moi.

    Désirée, (dite La Crevette) se définit elle-même ainsi :

    «  Je n'ai jamais été un être sensuel, la vie avec Orjan me l'avait fait comprendre. Je le prenais avec philosophie , ou allez savoir si je n'en tirais pas une certaine fierté, comme si cela faisait de moi un être de raison, élevé au-dessus des comportements plutôt bestiaux. »

    Si la partie psychologique me semble plutôt bien traitée, le thème central, lui, me laisse perplexe. Car entre ces deux-là, c'est le «choc des cultures» dans ce qu'il a de plus caricatural. Benny, qui avait de bonnes notes à l'école mais qui ne pense plus qu'aux (posters de) tracteurs et ronfle au théâtre. Désirée, l'intello qui ne peut survivre sans trois bouquins dans son sac et qui ne sait pas faire cuire un steak.

    Je ne connais rien de rien à la Suède d'aujourd'hui, mais les traits semblent un peu forcés, non? Autant Benny a l'air de savoir où il va et surjoue son rôle de paysan inculte car il sent bien qu'elle ne voit que le fossé entre eux, autant la jeune femme semble vraiment pédante, agaçante, instable. Détestable, bien que parfois lucide.

    «  L'existence est devenue tellement physique, je sens que je suis en train d'en perdre le contrôle. »

    Amour tendre... mouais... s'ils le disent. Débridé? Ah non, là non!

    A lire pour se faire une idée. Matière à débat.

    Quelques articles de lecteurs plus emballés que moi:

    Lecture-addict , M-book-M.

    ou pas :

    Carnet de liaison, Héclea.

    Lien permanent Catégories : Morgue 9 commentaires