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Morgue

  • My heart will go wound

    couverture, coe, coeur angleterre, brexitLe coeur de l'Angleterre, Jonathan Coe

    Ce titre peut se lire seul, bien qu'il fasse suite à Bienvenue au Club et au Cercle fermé, dont les personnages reviennent ici. Oeuvres qui ne comptaient pas dans mes favorites, je préfère le Jonathan Coe plus poétique, plus drôle, plus romanesque. 

    Je relis pour la 3e fois le dernier paragraphe, histoire d'imprimer que ça semble finir sur une note positive mais j'ai du mal à m'en convaincre, tant ce livre m'a pesé, bien que je n'aie cessé de sourire aux réparties des uns ou des autres, ou devant la pertinence de certaines remarques.

    C'est un récit très politique et social, ancré dans la réalité de 2010 à 2018, c'est presque un docu-fiction sur le Brexit, ses causes, les forces en présence dans la société, le mécontentement croissant, les difficultés économiques, le racisme rampant, le politiquement correct vécu comme un muselage du peuple et de ses préoccupations. Que ça soit vécu par des personnages que l'on connait déjà (ce n'est pas mon cas, je les avais tous oubliés, je n'ai presque pas eu de réminiscences) n'y change rien, ni que ça soit mêlé à leurs histoires de couple.

    Je n'ai pas eu le sentiment qu'on me proposait une nouvelle approche, une mise en lumière ou à distance. J'ai eu la sensation de me plonger dans la chronique d'évènements trop proches, dont les pires éléments sont toujours bien présents et ces forces, qui coupent en deux l'Angleterre, comme sur la couverture, qui favorisent inexorablement la montée de l'extrême droite, à quoi bon les lire, quand nous les vivons ?

     

  • Mort aux VIH !

    psychotiques-coupland.jpgToutes les familles sont psychotiques, Douglas Coupland

    Psychotique, d'après mon dictionnaire, c'est relatif à la psychose et hop colonne d'avant, la psychose est une altération profonde de la personnalité dont le sujet n'est pas conscient. Aucun des personnages ne semble répondre à ces critères. Même avant de vérifier, j'avais senti que ce titre était pourri. Probablement une contagion par contact avec la couverture...

    C'était vraiment vraiment mauvais toute la première moitié. J'ai vaguement commencé à m'intéresser aux personnages après mais notez bien la mise en valeur de l'adverbe.

    Tout ce petit monde groupé sous le terme "famille" se retrouve à l'occasion du départ pour l'espace de la fille astronaute. Elle a deux frères, l'un est un voyou, l'autre un raté dépressif, ils ont des femmes adultères ou enceintes qui veulent avorter ou vendre leur gosse, des parents séparés et de mauvaises fréquentations. Ils ont pour projet de vendre au marché noir une lettre de la couronne britannique. En bonus, la moitié d'entre eux ont le SIDA, avec d'originales variations dans les modes de contamination.

    Il n'y a pas d'histoire, pas de message, pas de tension, pas d'humour, mais quand même un peu d'action... Vraiment je ne vois pas quoi en tirer de plus, hormis une place de 2,4mm de large sur mon étagère.

  • DO NOT ENTER

    chose en soi.jpgLa chose en soi, Adam Roberts

    Le titre me fait penser à l’ambiguïté qui m'avait marquée (favorablement) avec Une machine comme moi de McEwan. La chose en elle-même ou en nous-même? L'option retenue est la première, ça au moins je l'ai compris... J'ai dû abuser de la science-fiction, j'ai comme des symptômes d'overdose. Il n'était même pas sur une liste ! Il était juste "beau", à la bibliothèque. Pour me punir de ma superficialité, je me suis forcée à le finir.

    Il y a de la philo là-dedans, au point que ça devrait faire l'objet d'une barre Nutriscore sur la couverture. On serait dans du "E / Rouge". Dès la première page, on oublie de me prendre pour une imbécile, paradoxe de Fermi par-ci,  paradoxe de Fermi encore et penserait-on à me faire un encadré de cours ? Qui doit se relever à poil à une heure du matin pour trouver son portable égaré et vérifier sur Google ?

    Pour éviter que ce soit vous, même si l'idée n'est pas forcément déplaisante : Fermi se demande où sont les extraterrestres, puisqu'il serait improbable que l'on soit la seule planète avec de la vie. Je ne comprends même pas qu'on puisse se poser cette question... Entrer en contact avec des entités à ce point différentes? Quand on n'est même pas foutus de dialoguer avec des chèvres, qui sont des mammifères et avec lesquelles on partage la même planète depuis des milliers d'années.? Autant dire des copines d'enfance. Faudrait voir à commencer petit, mais ça n'est qu'un avis personnel. Après il y aura les méduses. Puis les lombrics. Et les (j'allais faire une plaisanterie politique. Je ne fais pas trop de plaisanteries politiques d'habitude, si ?)

    Tiens... je ne saurais même pas dire s'il y avait des extraterrestres au final dans ce livre... Je ne crois pas. Mais Kant, oui, avec une pensée presque compréhensible : notre esprit est conditionné à voir les choses d'une certaine manière, par exemple avec des prismes de temps et d'espace, mais rien ne garantit que le monde réel soit ce que nos sens perçoivent. D'où la "chose en soi" que des scientifiques veulent approcher en utilisant une intelligence artificielle qui serait délivrée de nos biais. Et au milieu de ce vaste bordel, d'humains qui s'entretuent, d'apparitions et de téléportations,  il y a des scènes dans le passé et dans le futur (pourquoi ? quel lien avec l'histoire?), un couple de mecs qui voient des choses étranges, un gars qui couche avec un fantôme, de la banquise, dieu. La moitié du temps je n'ai rien compris. L'autre moitié j'ai détesté.

    Mention archi-spéciale à ce qu'il ne faut pas me faire, mais alors jamais, jamais, jamais plus: SOIXANTE pages écrites à l'ancienne avec tous les "s" remplacés par un s long, ce "s" étiré en hauteur au point de ressembler au f.  Un petit rechercher/remplacer et hop pour l'auteur c'était fini. Mais nous ? Nous on le lit ce livre ! Aucune raison valable de faire ça. Pur sadisme.

    Je ne dirai rien des filles dont le principal argument pour vous embaucher est de passer dans votre chambre le soir. Pour la dernière RH que j'ai connue, je me serais barricadée.

    Semaine foutue pour foutue, j'ai aussi regardé "Cloclo". Je me confirme à moi-même que Claude François est mon Rousseau de la musique.

    Pour nous réconforter, rejouons avec l'autre Claude en commentaire !

     

  • Le soufflé finit toujours par retomber

    Landfall.jpgLandfall, Ellen Urbani

    Je ne sais pas où j'étais en 2005 - ou plutôt si, je devine, j'étais jeune et amoureuse - mais je suis passée complètement à côté de l'ouragan Katrina. Si j'en ai entendu parler, je ne me souviens toutefois pas d'avoir vu la moindre image, ni entendu parler d'un scandale teinté de racisme dans l'organisation des secours.

    Voili voilou, je pense que j'ai fait le tour du seul apport de ce livre, m'informer d'un vieux truc d'il y a 20 ans. J'en attendais sincèrement plus, parce que j'apprécie les romans de Gallmeister. Le magnifique poster envoyé par la maison d'édition fait d'ailleurs partie de mes pertes lourdes du dernier divorce. On aurait peut-être dû le déchirer en deux - après tout on l'a bien fait pour les gosses.

    Je m'arrêterais bien là pour aller me coucher, surtout qu'en ce moment je fais des rêves sympas, mais il n'est même pas 21h et j'ai du boulot en retard devant lequel je suis obligée de passer si je quitte le canapé pour mon lit.

    Alors J'ai demandé à Claude, mon nouveau test GPT de la semaine, de me rédiger l'article mais l' IAnimal est déjà trop développé pour être sensible à mon humour, il a décrété que j'étais "narquoise" et "irrévérencieuse" et si je le laisse choisir le titre, ce sera "Katrina, Bourrasque en Rafale sur les Non-Dits". C'est archi-nul, non?! Je peux faire mieux. Je vais faire mieux! Je suis sur le coup (depuis deux jours). Ok pour l'instant je sèche mais je vous parie une soirée en tête à tête que je fais mieux, avant minuit.*

    Le petit résumé maison que vous attendez toutes ! Un ouragan célèbre. Une fille et sa mère qui partent porter trois couvertures et deux conserves. Une autre fille et sa mère, sur place, qui sont des victimes. La mère du premier groupe écrase avec sa voiture la fille du second groupe. Deux mortes (M1 et F2). Après quoi la fille du premier groupe cherche qui est la fille du deuxième et pourquoi elle avait comme par hasard leur adresse dans sa poche. Bric-à-brac chronologique, longs développements sur les relations mère-fille, coïncidences qui font grincer des dents la scientifique contrariée que je suis et enfin dénouement surprise !! [bruit de langue-de-belle-mère, le truc qui se déroule quand on souffle dedans].

    Le tout sans beaucoup d'émotions, pour un livre qui a pour fond une catastrophe naturelle et des relations familiales dysfonctionnelles.

    Non, ce roman il...comment dire...il manque cruellement de piquant quoi. J'ai l'impression de me faire engueuler par une de ces vieilles chouette à lunettes qui t'expliquent la vie. Oui oui, Katrina c'était très moche, les autorités ont merdé, y'a eu du racisme, tout ça. Mais ça reste tellement...plat comme récit. Pas une seule graine de folie ou de cynisme.

    Parlerons-nous des deux filles, qui s'appellent l'une Rose et l'autre Rosie ? Exprès pour que je passe mon temps à me planter? Est ce que ça m'aide que l'une soit blanche et l'autre noire puisque je ne les vois pas... c'est un livre !

    * Je m'aperçois qu'il faudrait vraiment que je retrouve des lecteurs à ce blog, parce que je n'arrive pas à me départager. Ce n'est clairement pas mon meilleur titre de l'année. Un truc avec vent, se prendre un vent ? Mais la relation mère fille ? Calendrier de l'à-vent?  Quant souffle le vent du sort, mais il faut connaître une romance girly d'il y a quinze ans, ou alors tempête et quelque chose de Shakespearien ?  ça reste quand même mieux que les sottises de Claude, j'espère, pour mes espoirs de diner.

    On joue un peu ? l'un des paragraphes est 100% l'oeuvre de Claude, qui a eu pour consigne de se glisser à ma façon au milieu de mon article. Réponse au prochain numéro :)

  • Vous reprendrez bien un peu de dissert'

    laure murat,proust,aristocratie française,histoire de familleProust, roman familial, Laure Murat

    Je suis malade comme un chien depuis une semaine, c'est tombé en même temps qu'un boulot monstre, des journées de quinze heures et une redoutable envie d'écrire et qu'on m'écrive - j'ai un compte débiteur de 26mn et envie de tout claquer comme à Vegas - j'ai le cou coincé, un phare grillé et pas trace de mauvaise humeur, ce qui en soi est hyper suspect. Je suis flottante de différentes fièvres, un état dont je me méfie comme de la peste mais dont j'ai appris à sortir par l'action : ce livre va se faire bouffer tout cru.

    Avez-vous déjà couché avec une agrégée en lettres ou en histoire ? Moi non plus, mais au cas où l'occasion devrait se présenter, je pensais que ce serait le sujet de conversation idéal pour un premier date, c'est tout plein de Proust! Ah, ça, Laure Murat ça n'est pas Mireille Calmel, celle qui promet des bateaux dont on ne voit pas la poupe. Là on en a pour notre argent, surtout moi qui l'ai emprunté à la bibli. Mais j'espérais autre chose, j’espérais vraiment que ce serait brillant, que ça me rappellerait des souvenirs, que ce serait agréablement intellectuel. C'était intellectuel, point. Et tellement personnel surtout... Elle avait des choses à dire à sa famille, des comptes à régler, c'est dur à lire, ce qui a été écrit pour d'autres. C'est pourtant cela que j'ai préféré, merci mon âme voyeuriste.

    Laure Murat est issue de ces grandes familles de l'aristocratie que Proust fréquentait et sur lesquelles il a bâti nombre de ses personnages. Elle a lu la Recherche comme un album photo, s'étonnant juste d'invités surprise. A de rares moments, ça fonctionne vraiment, on comprend ce qu'elle a pu ressentir devant une œuvre littéraire, patrimoniale mais dans laquelle, elle, elle trouvait sa famille, tonton, mamie, ses habitudes, ses codes, tout le contraire d'une fiction. 

    "Lorsque, encore adolescent, mon père comprit en lisant A la recherche du temps perdu que sa grand-mère avait connu Proust, il la pressa de questions "Ah oui, répondit-elle évasivement, ce petit journaliste que je mettais en bout de table..."

    Mais ce milieu est tellement éloigné du mien, que ces moments-là ont été de délicieuses, certes, mais infimes étincelles. Je sentais ce qu'elle voulait partager et tout de suite après, je me débattais dans une copie de licence jargonnante comme si elle n'arrivait pas à accepter d'être dans l'émotion et se servait de Proust comme d'un pare-feu.

    "Toute la Recherche peut être lue comme une investigation sur l'inadéquation des mots et des choses qui implique, à terme, une démonétisation inévitable des Noms, de leur pouvoir extravagant et trompeur, et d'une relativisation de la fonction référentielle".

    Qui a envie de lire ça, sans être payé pour ?