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fantastique

  • Le cerveau de l'histoire

    fin_temps_murakami.jpgLa fin des temps, Haruki Murakami j'aime.jpg

    Avis chrono'

    J'ai adoré ces deux mondes improbables qui se dérobent à notre compréhension et la poésie diffuse qui imprégne tout le récit. Alors que nous attendons de les voir se rejoindre, les surprises se succèdent, les rencontres et les interrogations métaphysiques se multiplient. Magnifique roman, captivant dès les toutes premières pages.


    Un livre imposant, dense (500 pages tout de même et rien de léger). Il m'a fallu presque un mois pour en venir à bout, mais qu'importe? J'ai lu lentement, par petits morceaux, j'ai tout bien savouré. Signe de mon enthousiasme: j'ai relevé des tonnes de citations, j'ai mis des marque-pages partout. J'en ai perdu la moitié en cours de route, bien sûr.

    Fascination immédiate, en moins de 20 pages, avec cette abracadabrante histoire d'ascenseur de la taille d'un studio, immobile, silencieux. Puis l'intervention de la grosse fille en rose qui bouge les lèvres sans qu'il en sorte aucun son.

    J'ai su tout de suite que ce serait un coup de coeur.

    Le récit est bâti sur l'alternance entre deux récits distincts à la première personne.

    Dans l'un, le narrateur, informaticien à la solde d'une grande firme, rencontre dans un mystérieux souterrain un savant qui lui offre un crâne de licorne. A partir de ce moment, sa petite vie tranquille de célibataire va être méthodiquement sacagée. Il va se trouver au centre d'un conflit entre deux puissantes firmes et être menacé par des créatures nommées "Ténébrides".

    Cette partie intitulée "Pays des merveilles sans merci", est traitée avec beaucoup d'humour. Il est malaisé de définir le caractère du héros. Il se laisse porter par les évènements et sans avoir de réaction vraiment absurde (alors que tout es absurde autour de lui) il n'agit jamais exactement comme on s'y attendrait. Très déroutant.

    Les autres personnages, le savant, sa petite fille, tous dénués de noms (j'avais déjà constaté cela dans un autre excellent roman japonais, Le musée du silence ) sont délicieux, décalés.

    L'autre monde verse complètement dans l'onirisme. Challenge_japon.jpg

    Le narrateur vient d'arriver dans cette ville entourée de hautes muraille, de laquelle il est impossible de sortir. Ses pupilles sont fendues pour lui permettre de devenir le Liseur de rêves, en imposant ses mains sur des crânes. Son ombre lui est arrachée et il ne peut lui rendre visite que sous la surveillance du Gardien, qui s'occupe aussi des licornes.

    Cette seconde partie est plus lente, pesante, glacée. C'est "La fin des temps". Les petits détails ne prendront sens qu'à la fin du récit, lorsque enfin se rejoindront les deux intrigues jusque là parallèles.

    Les personnages ne cessent de bouger, d'être en quête plus ou moins immédiate de quelque chose. D'eux-même, sans doute.

    Quelques citations:

    " Il me semblait que j'avais passé mon temps à perdre des choses, des gens, des émotions. Les poches du manteau symbolisant ma vie étaient pleines des trous de la destinée, et aucune aiguille, aucun fil ne pouvait plus les raccommoder. En ce sens, si quelqu'un avait brusquement passé la tête par ma fenêtre pour me crier "ta vie n'est qu'un zéro!", je n'aurais pas eu grand-chose à lui opposer."

    "J'avais déjà couché avec pas mal de filles dans ma vie mais avec une bibliothécaire c'était la première fois. Cela devait être sa façon de me remercier pour le dîner. Mais finalement comme je viens de le dire, mon sexe refusa de m'obéir. Quand je pensais à la nourriture fourrée dans son estomac et en plein processus de digestion, cela enlevait toute force à la partie inférieure de mon corps."

     

    Au final, une réflexion assez aboutie sur ce que peut-être le sens d'une vie, sur le bonheur individuel et la conscience. Et aussi, même si c'est à un degré moindre à mon sens, sur l'évolution de la science.

    Magique. J'ai beaucoup souri et j'ai beaucoup rêvé.


    Ce livre pour...?

    Un lecteur adulte, endurant, qui ne sera pas rebuté par l'aspect fantastique voire absurde par moment, ni par les créatures imaginaires.

    Pourtant, un fan de science fiction sera déçu. Celui qui aime l'action sera rebuté par les développements quasi métaphysiques sur la conscience, la vie, et par l'attitude souvent contemplative du héros.

    Pas facile hein? Autour de moi... je ne vois pas...

    Et vous, vous avez quelqu'un en tête?

     

    Ce livre est mon troisième titre du challenge In the Mood for Japan. Décidément, que du bon!

  • On the rodéo again!

    Proulx_wyoming.jpgNouvelles histoires du Wyoming, Annie Proulx.

    Il s'agit d'un recueil de nouvelles, genre qui m'attire très peu d'ordinaire, d'où ma surprise: un gros coup de cœur!

    Les meilleures nouvelles:

    Le trou de l'enfer: Un brin de fantastique pour ouvrir l'appétit. Creel, le garde-chasse, trouve une façon original de se débarrasser de la paperasserie.

    L'effet ruissellement: Quand un ivrogne se voit confier le transport d'une précieuse cargaison.

    L'homme qui rampait hors de la forêt: Ou comment réussir son intégration dans le Wyoming.

    Le concours: A celui qui aura la plus longue. Barbe.

    Le loup de Wamsutter: Sur le plaisir de revoir, adulte, le costaud qui vous cassait déjà les pieds à l'école. (Où l'on apprend aussi qu'il est possible de cuisiner avec du sirop contre la toux) .

    Bon pour la décharge: Autre nouvelle fantastique. L'histoire d'Aladin revisitée, avec bouilloire en guise de lampe.

    En location: Amanda aux prises avec les vaches sadiques du ranch voisin. Suspense garanti.

     

    Mon avis:

    Pour revenir sur un débat récent entre lectrices: en voilà, des nouvelles sans chute finale! Ce qui ne gâte rien.

    Couverture très sobre avec un paysage montagneux sur le tiers supérieur et un fond blanc. Rien de folichon. Joli quand on aime.

    Me suis plongée dans la première histoire (voir ci-dessous) : hum, pas mal.

    Ensuite j'ai eu le malheur, voulant lire à haute voix, d'en choisir une autre, sans suivre l'ordre (sacrilège!), parce qu'elle était courte. Et pas de chance j'ai choisi "Le jeu du blaireau" et ni moi ni mon auditorat n'avons rien compris mais alors rien du tout (help! âmes charitables: n'hésitez pas à m'éclairer). Quelque métaphore animale, je devine... Mauvaise pioche.

    Ensuite, je suis revenue à l'ordre normal des choses et j'ai été vite conquise: toutes les nouvelles prennent pour cadre le même petit coin du Wyoming, nous retrouvons donc des personnages de l'une à l'autre.

    Le thème de la famille ou du couple est récurent, ( « Reconstitution des guerres indiennes », « Quels meubles choisirait Jésus ? » ) d'où des débuts parfois lents, qui déroulent les héritages successifs sur quatre générations.

    Chaque nouvelle éclaire un pan de la psychologie des habitants. Du garde-chasse orphelin, dont on ne connaîtra le passé qu'en assemblant les indices disséminés dans plusieurs histoires, à la tenancière de bar, en passant par les « étrangers » qui arrivent de New-York et viennent de s'installer dans un ranch...

    J'aime ce genre de « catalogue » méthodique avec variation des points de vue.

    Mes connaissances en géographie sont dérisoires, je n'ai presque jamais voyagé... Je n'ai des Etats-Unis qu'une image très vague, plus fantasmée que réaliste, autour des grandes villes. J'ai adoré ce dépaysement, cette région peinte à la fois effrayante et attirante.

    Écriture très adroite et très intelligente. On comprend à la lecture comment un recueil peut être doté d'une logique interne. Peu à peu, l'ensemble se met à former un tout compact et cohérent, une image précise se dessine de cette région plutôt hostile. Ce qui ne semblait qu'un détail, qu'un élément de contexte dans la première nouvelle, à force de répétition, devient un trait distinctif du Wyoming. La sécheresse, les difficultés des éleveurs...

    Par deux fois, en tombant sur une allusion à un ordinateur ou à un micro-ondes j'ai été surprise de me sentir « recadrée », tant on se sent hors du temps.

    Annie Proulx est aussi l'auteure de la nouvelle Brokeback Mountain. Voilà qui me donne envie de découvrir le texte!

  • Tu baves, mamour? Ah non, pardon, c'est ton oreille.

    lamaisonenragee.jpg

     La maison enragée, Richard Matheson

    La maison enragée est un recueil de sept nouvelles publiées dans les années 50.

    L'américain Richard Matheson (Auteur de nombreuses nouvelles, et de romans dont Je suis une légende, adapté plusieurs fois au cinéma, dont très récemment avec W. Smith), y navigue entre fantastique et science-fiction.

     

    . Quand le veilleur s'endort:

    En l'an 3850, les rues sont presque désertes, les hommes réduits à l'état de larves molles. Pour en tirer quelques minutes d'activité, des médecins procèdent à de mystérieuses injections qui font rêver.

    . L'habit fait l'homme:

    Le narrateur, qui s'est éclipsé sur une terrasse lors d'une soirée, doit subir les élucubrations d'un convive ivre qui déclare avoir été témoin d'un phénomène extraordinaire: un homme aurait vu sa personnalité peu à peu dissoute et dévorée par son costume devenu vivant.

    . La chose:

    Dans un futur amélioré, sans maladie (et sans vaisselle à faire), mais tristement aseptisé, quelques familles tentent de transmettre à leurs enfants la mémoire d'une époque révolue en allant clandestinement contempler « la chose ».

    . Avis à la population:

    Un écrivain s'aperçoit un jour que les actualités ressemblent étrangement aux brouillons de science-fiction qui dorment dans ses tiroirs et s'inquiète d'une possible invasion extra-terrestre.

    . Mamour:

    Ou comment devenir fou sous les assauts incessants d'une logeuse extra-terrestre poisseuse, baveuse, gluante et difforme, tombée amoureuse de vous et capable pour votre plus grand malheur d'envahir au sens propre vos pensées.

    . La maison enragée:

    Un professeur aigri, écrivain raté bourré de regrets laisse sa colère envahir sa vie, tandis que tout semble se liguer contre lui: sa femme excédée le quitte, il passe son temps à se couper, se cogner, se prendre les pieds dans les tapis... Cercle vicieux de la frustration, qui se referme petit à petit sur lui.

    . Une résidence de haut-vol:

    Le narrateur, écrivain (encore), se moque gentiment de sa femme qui lit trop de fictions et se fait des films au sujet du gardien de l'immeuble qui aurait trois yeux et de portes secrètes dissimulées dans la cave, tout cela parce que le loyer est vraiment vraiment trop modeste pour être honnête.

     

    Mon avis

    Assez de variété pour que chacun trouve son bonheur.

    Les amateurs de science-fiction se pencheront sur ces mondes futurs peu enviables, peuplés de créatures déplaisantes.

    Ceux qui comme moi préfèrent l'intrusion fantastique dans des cadres plus réalistes se tourneront vers les autres nouvelles et s'attacheront (ou non!) aux personnages masculins souvent ratés, frustrés ou malmenés. Mais pour être équitable, signalons que les femmes n'en mènent pas large non plus, nunuches ou fades (La chose), réduites à des objets de fantasmes (Quand le veilleur s'endort), vamps monstrueuses, pleurnichardes...

    Quelques procédés adroits pour tenir le lecteur en haleine, le mettre sur la piste ou le surprendre, comme le choix de l'énonciation dans Quand le veilleur s'endort.

    Ma préférence ira à Mamour, malgré (ou pour...) sa peinture de la femme-sangsue cauchemardesque, collante au possible dont on ne peut se débarrasser.

    L'habit fait l'homme et Une résidence de haut-vol me conviennent aussi, avec leurs chutes originales qui arrivent presque à me surprendre!