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Médecine générale - Page 4

  • Pour vivre heureux vivons ...?

    Trademark-baret.jpgTrilogie "Trademark", Jean Baret

    BonheurTM, VieTM et MortTM comme autant de marques déposées, tels sont les titres des 3 volumes de cette série, que j'ai beaucoup appréciée, pile dans ma veine favorite en SF, celle qui dépeint le futur à des fins politiques ou philosophiques. Nous pouvons les lire dans n'importe quel ordre, paraît-il, il s'agit en fait de différents points de vue sur la même société. Autant Bonheur et Vie se complètent à merveille, autant je n'ai pas bien saisi l'apport du dernier, Mort, je l'ai trouvé redondant.

    Dans Bonheur, les protagonistes vivent dans une société idéale, où tout est possible, où tous les souhaits peuvent être exaucés, devenir un démon en se faisant poser des prothèses, se shooter de toutes les drogues possibles, épouser un robot, où votre corps est à sculpter à volonté et où tout, ou presque, est autorisé, puisqu'après tout, n'importe quoi est une occasion de profit. La consommation tient lieu de dieu à cette société sans morale, sans jugement, où la liberté individuelle prime. A condition de consommer, ce qui une obligation légale. Les personnages portent le nom de la société qui "sponsorise" leur vie et sont littéralement noyés de publicités toutes la journée, sans y trouver à redire.

    Même chose pour Vie, qui nous projette de l'autre côté du monde, dans une deuxième organisation sociale, qui méprise les consommateurs de l'autre partie du monde et se fixe elle aussi pour but le bonheur de ses citoyens, en se fondant sur des principes complètement différents : cette fois, tous sont parfaitement égaux, ils vivent dans le même petit appartement carré dont il ne sortent jamais, leurs besoins vitaux satisfaits par un sorte de distributeur de tout/imprimante 3D, qui fournit, la nourriture, les médicaments et tous les objets de la vie courante, spartiate. Pour le reste, leur véritable vie, dès le matin, se passe dans un univers virtuel. Là, leur temps de vie sont précisément décomptés, tant de minutes à consacrer au travail (des tâches ineptes, faire tourner des cubes sur eux mêmes, aligner des cylindres, reconstituer des mots) tant de minutes pour la vie sociale, à faire danser leurs avatars, tant pour le sexe sous toutes les formes possibles.

    Le dernier volet se passe à moitié dans le dernier quartier, celui où le bonheur se définit par la foi, un vrai marché aux dieux et croyances, des plus communes aux plus excentriques, avec sa police de la foi.

    Tout cela s'accompagne, dans chaque livre, d'une sorte de trame à suspense, le petit grain dans l'engrenage.

    La qualité des récits, qui traitent de la façon de définir le bonheur, est indéniable, quand on aime ce genre, c'est intelligent, trash et brutal. Ils laissent une large part à l'interprétation, les conclusions ne sont pas livrées sur un plateau et c'est appréciable.

     

  • La faim justifie les moyens

    couverture-kressing-chef.jpgLe chef, Harry Kressing

    Agréable amuse-gueule, ce roman qui a tout d'un conte même si je cherche encore pourquoi, depuis que j'y ai trouvé une bicyclette. Sans le vélo, on avait tous les ingrédients, un petit panel de personnages aux allures aristocratiques, partagés en deux familles à la rivalité étouffée par le temps, une temporalité floue, un château convoité et un très étrange cuisinier, autour duquel les choses s'arrangent et s'organisent pour servir ses plans.

    Bien que prévisible, l'évolution de la situation est amusante, il n'y a que la fin qui m'a déçue, mais comme ça doit faire vingt ans que je n'ai pas aimé la fin d'un livre (je dis ça au hasard, pas une seule fin satisfaisante ne me vient à l'esprit ce soir) n'en parlons plus.

    Mais ce vélo... ça ne va pas. Les héros des contes n'arrivent pas à vélo, j'en suis presque certaine, ça ne colle pas.

     

     

  • Frapper vite et Thor

    Si j'avais un marteau oooo, mythologie, gaiman, viking, asgard, moins policé que Marvel, plus authentiqueLa mythologie Viking, Neil Gaiman

    Neil Gaiman, le fameux, que je ne connais guère encore et qui n'avait rien d'époustouflant dans ce petit volume tout indiqué pour découvrir la mythologie Viking, certes tardivement, je ne sais pas pourquoi il n'y en a que pour les dieux grecs et romains, ceux-là sont bien les mêmes, égoïstes, roublards et noceurs.

    C'est Loki qui fait le sel de ces récits, Loki le poil à Gratter de l'Olympe viking, toujours à tramer de sales coups, à voler et mentir et toujours à se faire tirer les oreilles par Thor, le gros balèze.

    C'est de la mythologie, quoi, ça se lirait comme des contes, pour les enfants, si ce n'étaient quelques inévitables viols et meurtres.

    Vous l'aurez compris, c'était agréable, sans plus. Je viens de faire les comptes pour l'année précédente, j'ai lu presque 50% de très bons livres, alors je me permets de commencer 2022 en faisant la difficile !

     

  • La langue qui ne devait jamais fourcher

    roman estonien,homme savait langue serpent,kivirahkL'homme qui savait la langue des serpents, Andrus Kivirähk

    Rhaaa quel dommage de n'avoir pas su garder jusqu'à ce soir ma belle humeur de hérisson en boule de ce matin ! Je suis toujours plus productive quand on m'a un peu éperonnée. Au lieu de quoi j'ai pris ce soir une demi-heure pour une petite promenade en bordure de champs et me voilà paisible. Bovine. Et devant la même page qu'hier soir. Sous le regard d'une énorme licorne en peluche. Avec une tablette de chocolat. Ce n'est pas que je manque de choses à dire ! Il y a largement de quoi faire, d'ailleurs le premier mot d'hier (effacé) était "protéiforme". Voilà ce qui arrive quand on ne peut pas sortir de chez soi, on se lance dans des romans estoniens bizarres ! A 50 pages, j'étais conquise. C'est idéal pour un ado bon lecteur me disais-je. J'ai ensuite barré ado. Ou alors un ado bien dans ses baskets, confiant en l'avenir et imperméable au spleen.

    A quoi bon développer un argumentaire pour un récit qui dégage une telle impression de nuit d'automne mélancolique ??

    Leemet vit dans la forêt, avec sa sœur et sa mère. Il connait la langue des serpents, qui permet non seulement de discuter avec eux mais aussi d'asservir bon nombre d'autres animaux moins évolués. L'élan vient de lui-même s'asseoir dans votre assiette et le loup vous servir de monture. Mais Leemet est le dernier de son époque. Les autres familles quittent peu à peu la forêt, attirées comme des papillons stupides par le village, qui promet à tous une vie de labeur derrière la charrue, à servir les caprices des hommes de fer, à écouter les chants des moines, tout ceci, fourche et miche de pain, étant le must de la modernité. Le petit sauvage dans sa forêt est un sujet de moquerie, quand on peut rêver du pape à Rome et de rattraper les nations civilisées.

    Le côté conte, langue des serpents, rêve de Salamandre mythique, croyances païennes m'a énormément plu.  Et c'était extrêmement drôle parfois ! Comme ces ours libidineux et benêts, qui ne peuvent s’empêcher de draguer les femmes mariées et de soupirer après les jeunes filles du village. Ou encore la manière de peindre l'opposition forêt / village, et de nous vendre Jésus et les chevaliers comme des gadgets à la mode. Ou la placidité désespérée de Leemet devant la sottise de ses anciens copains, qui crèvent de faim mais avec la consolation de savoir dire amen.

    Leemet est pleinement conscient qu'il n'a pas sa place au village. Et pleinement conscient que son mode de vie est dépassé et va s'éteindre avec lui. La postface dit "pamphlétaire". Mouais. Les postfaces tissent du lien et expliquent tout. Comme si je ne faisais pas déjà bien trop ça toute seule...

    Bien sûr qu'il y a une forte dimension satirique, une réflexion très intéressante sur l'évolution des sociétés et l'état "entre deux".  Ce n'est pas une glorification du passé, de l'harmonie avec la nature. Bien des choses déconnent aussi dans la forêt, c'est le propre de tout ce qui décline. Peut-être que c'était bien avant et qu'on aurait souhaité que ça reste comme ça mais enfin, c'est passé, c'est déjà autre chose. Le mouvement est lancé. Un mouvement général qu'on peut accepter, pourquoi pas. Mais vu avec les yeux de l'individu qui aura été le dernier à rester sur place.

    Un roman original, fascinant par bien des côtés, mais difficile à conseiller car crépusculaire.

  • La serpe Jaenada

    La_Serpe.jpgLa serpe, Philippe Jaenada

    Un titre étrangement sobre au regard de la personnalité de l'auteur, ou du moins de l'image que je m'en suis faite. La serpe est une contre-enquête qui s'intéresse à de vieux meurtres (1941), ceux de Georges Girard, de sa sœur et de leur bonne dans leur domaine familial en Dordogne. Meurtres qui ont immédiatement été imputés au fils de Georges, Henri, pas tout à fait un inconnu : il est l'auteur, sous le pseudonyme de Georges Arnaud, du Salaire de la peur.

    Un avis succinct : habilement construit, enquête intéressante, mais trop long, trop bavard.

    Toute la première partie, qui nous présente le gars depuis les drames de sa tendre enfance pour arriver (quand on désespère d'y arriver) au moment des meurtres, est solidement documentée. Les preuves sont innombrables, Henri est odieux avec son père, odieux avec sa tante, ça fait 20 ans qu'il les dépouille. Les preuves sur la scène de crime sont pires qu'accablantes, au matin de la découverte des corps par lui-même, il se promène dans le château, il propose des clopes aux flics, joue du piano, il était seul enfermé à l'intérieur, le maquillage en cambriolage est risible etc etc. Je n'ai même pas douté de sa culpabilité. Arrive alors le récit du procès, une mascarade, un juge arriviste qui se déclare dès le départ en faveur de l'accusé... 

    Toute l'adresse de l'ouvrage réside dans le basculement qui s'opère, dans une seconde partie, à partir pourtant des mêmes citations des dossiers, des mêmes témoignages, mais placés sous un éclairage différent et d'un coup, nos conclusions ne sont plus les mêmes. C'était très habile, ça donne une idée de ce que peut être un procès, quand on prend le temps d'écouter les deux parties. 

    Par contre bon sang que c'est long... mais long... Et puis l'auteur se promène là-dedans, dans le récit, partout comme chez lui, il fait le pitre, avec ses anecdotes personnelles (sa femme, son petit déjeuner, ses clichés sur la province, la découverte par son fils adolescent du thermomètre rectal). C'est marrant, dans un groupe, un boute-en-train. Sauf que là, il est tout seul dans le groupe et à force, c'est un peu usant. 

    Rhââ, ça m'agace, parce que peut-être bien que ça n'aurait pas été si habilement ficelé avec moitié moins de pages et que ce ton de petit comique apporte effectivement quelque chose.