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folie - Page 2

  • J'ai trouvé mon tueur charmant

    Un énorme merci aux éditions Le livre de Poche et à Livraddict pour ce partenariat de qualité!

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    theorie_six_jacques_expert.jpgLa théorie des six, Jacques Expert

    Avis chrono:

    Halte! Vous ne voulez lire qu'un thriller cette année? (quel dommage, mais on ne sait jamais!) C'est celui-ci! Un chef d'oeuvre de bonne humeur, une intrigue bien ficelée, concoctée par un narrateur-assassin très attachant.


    Six poignées de main vous séparent de n'importe quel humain sur la terre. Cette incroyable, mais néanmoins très sérieuse théorie du hongrois Frigyes Karinthy fait l'admiration de Julien Dussart, fonctionnaire, célibataire, en congé sabbatique, trentenaire, bien sous tout rapport, propre, soigné et soigneux... C'est aussi un fils aimant. Et un tueur en série d'une grande délicatesse, il choisit méticuleusement ses clientes, avec tableau des « pour » et des « contre »  et s'inquiète sincèrement de leur sécurité:

    «  Je pouvais comprendre sa prudence car il y a tellement de malades sur Internet »

    Cinq victimes, cinq maillons, pas un de plus. Le défi est lancé. Julien parviendra-t-il à faire le lien entre le n°1 un malheureux SDF Marseillais choisi au hasard et sa véritable cible, le n°6?

    Quatre soirs, c'est ce qu'il m'a fallu pour dévorer ce court roman que j'aurais aimé pouvoir faire durer un peu plus tant le ton est original. En effet, le narrateur n'est autre que Julien Dussart et il me fait fondre, je ne peux pas le dire autrement. Il émane de lui un tel enthousiasme, c'est contagieux, on sourit en le lisant, cette théorie lui tient tellement à coeur! Il mérite de réussir. Qu'importent quelques cadavres? Cela lui ferait si plaisir! Autant qu'un café-tartines-miel.

    « Vous reconnaîtrez avec moi que, avoir le destin d'un homme et d'une famille entre ses mains, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner, il ne peut rien y avoir de plus plaisant. »

    Trois ou quatre petits défauts ne peuvent m'empêcher de l'adorer! Alors, c'est vrai, il est un peu raciste. Mais il aime la poitrine généreuse de sa serveuse chinoise. Et il a quelques tocs, il passe son temps à compter ses pas et les marches d'escalier. Mais il déborde de compassion pour les pauvres familles en deuil et ne manque jamais de venir les consoler. Il a aussi une fâcheuse tendance à planter son couteau dans quelques êtres humains. Mais... il est si gentil avec sa maman!

    Deux femmes viennent enrichir encore ce récit déjà succulent, vérifiant encore une fois qu'un excellent roman doit beaucoup à ses personnages secondaires. La première s'agrippe au très convoité poste de commissaire divisionnaire comme un chien à son os. Dieu qu'elle est détestable! Elle déborde de méchanceté gratuite. Elle est grossière souvent dans ses propos. Tout le contraire de ce gentil Julien! Heureusement, son mépris et son complexe de supériorité l'aveuglent, elle passe à coté de tous les indices que lui présente sa meilleure enquêtrice qui n'est autre que sa secrétaire! Leur duo est folklorique!!

    Un thriller à ne pas manquer. Tout est bon là dedans! Quel dommage que la quatrième de couverture ne soit pas à la hauteur et ne laisse rien deviner de ces personnages, de cette écriture, de ce ton, enfin, si pleins d'humour! Sans le partenariat, je serais peut-être passée à côté de ce bijou!

     

    ESPACE LECTURE COMMUNE:

    Parce que c'est tellement plus sympa d'échanger, ce livre a donné lieu à une lecture commune et chacun a pu proposer une petite question aux autres! Voici mes réponses, n'hésitez pas à aller lire celles des autres membres en cliquant sur leur pseudo!

    Lisalor - Quand avez vous commencé à comprendre l'intrigue ?

    Je n'ai pas eu l'impression d'avoir peiné à comprendre... Dès le début, je trouve que le ton est donné! Si la question porte plutôt sur la résolution de l'énigme, je ne peux pas dire que j'avais vraiment deviné. Mais j'hésitais entre deux hypothèses, à 30 pages de la fin et l'une des deux était la bonne!

    Fée_tish - Qu'est-ce qui vous a le plus dérangé/perturbé dans cette lecture ?

    Rien du tout. Le personnage tient des propos racistes, mais c'est bien dans le personnage, ce n'est pas à prendre au premier degré, je pense. Tout le reste est délicieux! Je ne culpabilise pas une seconde d'adorer ce type!

    Hylyirio - Qu'est ce qui, au fil du livre, vous a donné l'envie de continuer à le lire page après page?

    Une terrible envie qu'il parvienne à ses fins! Je rageais chaque fois que l'enquête progressait! Je me demandais: va-t-il réussir? Va-t-il se faire attraper?

    Lise  - Quelle est votre opinion sur le personnage de Julien Dussart?

    Comme je l'ai dit dans ma critique, je trouve que l'écriture à la première personne le rend très attachant. Je profite de ta question pour préciser qu'il ne s'agit pas pour moi d'une fascination pour les tueurs en série mais d'une admiration pour le style de l'auteur. Ce qu'il nous montre, au fond, c'est une image de la folie et à quel point la démence peut constituer un univers en décalage, mais cohérent et complet. J'aime tout ce qui traite des désordres psychiques.

    Lecturevvv - Que pensez-vous du personnage de Sophie Pont ?

    Elle est odieuse! Bonjour l'image de la police dans ce roman! Mais je pense qu'il s'agit ici plutôt d'humour que de satire. Elle est mauvaise, méprisante, égoïste, incompétente... Ajoutez le harcèlement de sa secrétaire... Je me suis bien amusée avec elle.

    Soundandfury - Vous avez craqué? Vous avez tenté de jouer à la théorie des six? Racontez!

    Pas une seconde. Je connaissais déjà cette théorie et je n'avais jamais tenté de me l'appliquer à moi même, car qui connaît ma vie monacale sait qu'en six poignées de main, j'ai peu de chance d'être ne serait-ce que sortie de ma maison!

    Mais... mais j'ai tellement adoré ce bouquin que j'en ai parlé à mon père. Lequel, pris au jeu, m'a démontré en deux minutes que j'étais bien à six poignées de main du pape...

    Zut alors... je préfèrerais être à une seule poignée de main d'une personne plus sexy!

     

    Enfin, une critique de Merkillia, et une de Flof13, qui n'ont pas participé à l'échange de questions, et qui n'ont pas du tout aimé cette lecture!

    Ne manque plus que Myrddin, que nous encourageons car elle est débordée de travail!

  • Stratégie à revoir

    Zweig_joueur_echecs.jpgLe joueur d'échecs, Stefan Zweig

    Une petite révolution dans ma vie: une audio-lecture. Il faut bien remplir les interminables heures de route. Sans en garder un grand souvenir, j'avais bien aimé la confusion des sentiments. Il s'agissait donc de mon second Zweig (qui tombe à pic pour le challenge ABC).

    Est-il bien légitime de parler de « lecture », alors? me suis-je interrogée. Cela change-t-il quelque chose? Vais-je en garder le même souvenir? Je n'ai pas eu les noms des personnages sous les yeux... Pas senti « l'objet livre ».

    Je n'ai pas encore tranché et si certains d'entre vous pratiquent, j'aimerais beaucoup avoir leur avis.

    Au début j'ai pensé que j'allais forcément être moins attentive. Mais la route est droite, monotone. Et il m'arrive aussi en lisant de manière traditionnelle de « décrocher » quelques lignes, de penser à autre chose.

    Un roman court (nouvelle?) dont j'avais déjà entendu parler et qui dans mon esprit était associé au thème de la guerre, allez savoir pourquoi... D'où ma surprise, au début, de me voir entraînée dans une intrigue finalement bien plus en rapport avec le titre.

    Au cours d'une traversée entre New York et Buenos Aires, le narrateur fait la connaissance d'un passager déplaisant dont il apprend qu'il s'agit du champion du monde d'échecs, Czentovic, jeune homme prodige, tout droit sorti de sa campagne, taciturne, mal aimable, préoccupé seulement de vendre son talent.

    A ce moment de l'intrigue, j'étais persuadée qu'il s'agissait là du joueur d'échecs mentionné dans le titre.

    Or, un jour, tandis que ces messieurs, dont le narrateur, disputent une partie contre le champion, un autre passager, dont nous ne connaitrons que les initiales, s'invite dans le jeu et met le grand Czentovic en déroute. Qui est cet homme qui joue si bien mais déclare n'avoir pas touché un échiquier depuis plus de vingt ans?

    Son récit nous fait plonger dans les pratiques de l'occupation. (ah! Je savais bien... la voilà ma guerre) Mr B., avocat autrichien, fut arrêté par la Gestapo qui lui fit subir la plus atroce des tortures: l'isolement complet, des mois durant. Au bord de la folie, il découvrit un manuel d'échecs et s'y plongea. Corps. Et âme surtout.

    Je ne suis pas convaincue par ce joueur d'échecs. Il dénonce la dictature, oui, soit. Si ça suffisait pour faire un bon livre... J'ai aimé certains passages comme celui des premiers temps de la détention. Je suis sensible à ce thème de l'isolement, de la folie qui peut en naître.

    J'ai remarqué aussi (et admiré, au début), le goût prononcé de l'auteur pour la description. Le long portrait de Czentovic qui ouvre le récit est un vrai bijou. De même, durant la partie finale, je trouve le face à face fascinant, très vivant.

    Mais sur le long terme, toutes ces descriptions, cela finit par faire un texte très statique.

    J'ajoute que la fin est on ne peut plus décevante. Tout s'arrête, juste comme … ça.

    Abc.jpg

  • Gros sur le coeur

    Coetzee_coeur_pays.jpgAu coeur de ce pays , J.M. Coetzee.

    J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans ce roman, très éloigné de mes précédentes lectures. Une écriture austère, compacte. Une forme pour le moins singulière: l'oeuvre n'est pas découpée en chapitres mais en 266 « blocs » de paragraphes (sur 186 pages) que j'aurais tendance à qualifier de versets mais cela n'engage que moi.

    Comme je peinais à atteindre les trente pages lues, l'idée m'a traversée, chose rarissime, d'abandonner et de passer à autre chose. Puis vint ce moment où je ne compris plus rien du tout: un personnage mort à la page précédente, qui se promenait comme si de rien n'était trente lignes plus loin..

    Je vérifiai que je n'étais pas revenue en arrière sans y prendre garde. Que je n'avais pas mal lu... Non. Je devais vraiment être stupide.

    Petit coup d'oeil sur la biographie de l'auteur. Prix Nobel de littérature (oups, ah bon?). Tout s'expliquait. Résignée à une lecture sans doute résistante jusqu'à la dernière ligne, je décidai néanmoins de persévérer mais sans aucun entrain. Mécaniquement.

    Il fallut attendre un soir de déprime particulièrement intense, pour comprendre que ce qui résistait le plus, dans cette histoire, c'était moi, par crainte de m'identifier à quelque chose dans ce récit sombre et pessimiste, par refus de me laisser porter. Le moral déjà dans les chaussettes il me fut bien plus facile d'entrer cet l'univers inconfortable et je dévorai en une nuit d'insomnie l'intégralité du roman.

    La narratrice se nomme Magda. Elle vit dans une ferme isolée d'Afrique du Sud, avec son père qui ne lui prête guère attention et quelques serviteurs Noirs. Les 266 passages constituent un monologue, une sorte de journal de sa souffrance: solitude dévorante, délires autour de l'image de son propre corps et surtout de son sentiment d'être incomplète, vieille fille laide et mal aimée, vierge.

    Se déroulent ainsi des fantasmes sexuels incestueux, des scènes de violence sauvage, de meurtres, de viols, sans que le lecteur ne puisse jamais distinguer ce qui est rêvé de ce qui est vécu par la narratrice puisqu'au terme de longs développements de plusieurs dizaines de pages, des contradictions apparaissent qui nous font douter de la « réalité » du récit. Le père mort est à nouveau vivant. Il n'est plus fait mention de la femme arrivée au début du texte, etc...

    Roman de l'incohérence, c'est une plongée finalement assez fascinante dans les rouages de la folie. Au huis-clos géographique répond un huis-clos littéraire: ce récit au point de vue unique se referme peu à peu sur lui-même, en étau, broyant au passage toutes les certitudes du lecteur qui referme le livre en se demandant si finalement quelque chose d'autre est arrivé dans la vie de Magda que simplement mourir de solitude, de manque d'amour et de frustration.

    Extrait:

    " Nous ne sommes qu'un tissu de caprices: un caprice succède à l'autre. Pourquoi ne reconnaissons-nous pas que nos vies sont vides, aussi vides que le désertque nous habitons, acceptant dès lors de les passer à compter des moutons ou à laver des tasses, le coeur joyeux. Je ne vois pas pourquoi il faudrait que l'histoire de nos vies soit intéressante. "

    Littéraires: Voir ici pour les références à Kafka.

    Ce roman est le premier titre de ma trilogie estivale :

    voir l'article de présentation.