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étrange

  • En rouge et noir

    emily the strange.jpgEmily the Strange, Tome 1: Les jours perdus, Rob Reger

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    Un univers très particulier, envoûtant, des illustrations magnifiques qui accompagnent un récit-énigme où tout se goupille bien, pourvu qu'on soit assez large d'esprit et prêt à mettre dans le même grand sac un robot, un bar gothique, un jeu de poker spécial, un médium pré-pubère, des paris stupides et quelques chats énigmatiques.

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    Un passage furtif... C'est la panne sèche, comme vous avez pu le remarquer. J'ai lu Emily the Strange il y a déjà plus d'un mois, autant vous dire que ce billet va avoir des relents de poisson pas frais...

    C'était chouette, en tout cas, je vous le conseille. J'ai eu l'impression de retourner en enfance et de lire une de ces histoires de détective dont on a hâte de connaître la solution. (Quitte à tourner un tout petit peu la page suivante pour au moins regarder les images).

    100_1304.JPGEmily , qui ne sait pas qu'elle est Emily, car elle a perdu la mémoire, est assise sur un banc, dans la petite ville isolée de Blackrock. Elle n'a pas la moindre idée de ce qu'elle fait là et entreprend de tenir un journal intime pour y consigner ses découvertes.

    De rebondissements en rebondissements, il est très difficile au lecteur, même perspicace, de savoir comment tout cela va se terminer. Surtout parce que c'est souvent délirant et bizarre. La fille est bizarre... L'atmosphère est bizarre... On frôle la science fiction. Et le rêve éveillé.

    Le genre de bouquin qu'il faut à tout prix piquer à nos enfants pour passer un bon moment. Si vous avez réussi à échapper à l'obligation de procréer, j'ai le livre, moi, et je suis dispo à l'adoption. Maison avec vue sur la mer bienvenue.

    100_1306.JPGIl paraît que le tome 2 n'est pas aussi bon. A voir. Un jour. En attendant je vais me regarder un film romantique, on sait jamais, ça fait du bien parfois...

    Autre renseignement d'importance sur Emily: elle a exactement la même coupe de cheveux que moi à son âge. Ah! Et le personnage, semble-t-il, est super connu! (J'ai découvert lors d'une précédente plongée dans la haute-culture cinématographique qu'un poster d'Emily ornait la chambre du gamin dans Freaky Friday).

     

    P.A.L à 87 --> 81

  • Chant de force

    trois_femmes_puissantes_ndiaye.jpgj'aime.jpgTrois femmes puissantes, Marie Ndiaye

    Avis chrono'

    Un énorme coup de coeur pour ma première lecture de l'année! En raison de l'étiquette "roman", je ne m'attendais pas du tout à ces trois récits qui se frôlent, baignés d'étrangeté. Tout pour me séduire. Avec une écriture à tomber amoureuse...


    Grosse pression... On me croyait guérie. Je me croyais dans une douce période de rémission. Voici qu'à nouveau je suis muette et craintive à l'idée de mettre à plat mes impressions. C'est qu'il est sacrément bien écrit ce livre. Ce serait sacrilège de le traiter trop légèrement. Puis, le(s) sujet(s) ne s'y prête pas.

    Un roman qui donne envie de bien écrire, en soi, c'est déjà une réussite, non?

    De découvertes en découvertes:

    La segmentation, tout d'abord,  de ce "roman" en trois récits successifs qui se font écho subtilement. Il existe bien un lien... à vous de le découvrir.

     

    Le premier récit est celui de Norah qui laisse en France sa fille et son compagnon pour rejoindre en Afrique un homme, à sa demande. Cet homme est presque un étranger. Cet homme l'impressionne. Elle en urine de crainte. Cet homme est son père.

    Terrible histoire de famille, d'abandon, de retrouvailles amères.

     

    Le second nous dépeint la femme de loin, à travers les yeux de son mari. Lequel est en souffrance, au bord de la folie. Eux ont fait le chemin inverse, du Sénégal vers la France. Elle était professeur, elle ne peut plus enseigner. Lui végète, employé médiocre d'un cuisiniste qui a l'ennuyeux défaut d'avoir couché avec sa femme.

    Un récit d'errance, de trouble, que j'ai énormément apprécié. Comme le précédent, il attaque in media res. Une plongée vertigineuse dans la conscience boursouflée d'un homme qui doute.

     

    Le dernier est celui de Khady. Elle, n'est pas encore déracinée. Elle en prend le chemin. Khady est une femme-fantôme. Jeune veuve, elle se fait discrète, transparente, muette, dans la famille de son défunt mari. Un jour, elle est mise à la porte sans rien d'autre qu'un coin de papier. Une adresse en France. Trop peu d'argent pour gagner l'Europe.

    Ma légendaire lâcheté me tient en général bien proprement à l'écart des récits ancrés dans la déchirante réalité de notre société. J'ai tenu bon, car celui-ci méritait tellement d'être lu... Terrible destinée d'une femme qui avait presque cessé d'exister. Et qui s'en portait presque mieux.

    Enfin, chaque partie s'achève sur un "contrepoint", c'est à dire un court passage qui nous offre un autre point de vue sur ce qui vient d'être conté.

    Je ne peux décider de ma préférence pour l'un ou l'autre, chaque morceau est d'une intensité à couper le souffle, dans un style impeccable, envoûtant. Plus que par l'une des parties, j'ai été séduite par des passages, par des détails. Surtout ceux un peu étranges, lorsque je me suis demandée s'il fallait prendre la chose au sens propre ou si ce n'était que symbolique. L'homme-oiseau. Les souvenirs-mirages de Norah. Les diables sur le ventre. La sculpture de Rudy, ses anges et son oiseau-vigile...

    Toutes ces choses que je ne suis pas sûre d'avoir bien "expliquées" avec ma manie de vouloir tout analyser, tout creuser, tout comprendre, tout relier...

    Si vous êtes disposés à un  échange approfondi sur cette oeuvre, ce serait avec grand plaisir! Il est riche, ce livre, et je suis loin d'en avoir épuisé la signification.

    Ahlàlà c'est fou, je crois que je pourrais en parler des heures! J'arrête.

    Trois femmes puissantes a reçu le prix Goncourt en 2009.

     

    Ce livre pour...?

    Ce n'est pas un livre tout public, c'est certain. Il lui faut un lecteur minutieux, un amoureux, à ce roman là. Amoureux des immersions périlleuses dans l'intériorité des personnages. Amoureux des belles écritures et des récits qui par leur force vont nous laisser une cicatrice.

    Vous avez bien un lecteur comme ça qui hante vos bibliothèques?

    Un livre pour celui qui me l'a offert: mon père.

     

    Et pitié... dites-moi que pour une fois il reste moins de cinq fautes d'orthographe!