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rédemption

  • Noir c'est noir il n'y a plus d'espoir

    meurtres-redemption-giebel.jpgMeurtres pour rédemption, Karine Giebel

    Marianne. Prénom bien choisi et qu'est devenue la mienne, hein? Egarée dans les limbes bretonnes... les miennes. Qu'importe, il faut bien entrer dans les livres par les portes du souvenir.

    Lors de la dédicace, j'ai entendu C'era demander à Karine Giebel comment elle pouvait porter en elle autant de noirceur et, de son article, j'ai retenu l'extrême violence d'un roman en univers carcéral. Un an et 1000 pages plus tard, fin du roman et je souffle, râle sourd de chagrin, de rage, de frustration.

    Elle m'a touchée cette jeune femme... C'est bien beau de fantasmer une sécurité proportionnée à la quantité de barreaux qu'on pourra placer autour des monstres, encore faut-il savoir les distinguer. Marianne est une boule de rage pure. Elle a tué un pauvre vieux pendant un cambriolage, tiré sur un flic, handicapé à vie une femme enceinte...

    Vous vous êtes déjà retrouvé en état de rage? Vraiment disjoncté? Hors de vous? J'envie celui qui n'a jamais connu cela, croyez moi, c'est une autre porte que celle des souvenirs... d'un genre qu'on voudrait voir à tout jamais barricadée. Pire que les monstres des placards d'enfants.

    C'est peut-être pour cela qu'on lui pardonne, à elle, vite. Qu'on la comprend. Elle a besoin d'être désamorcée, voilà tout. Qu'on renverse un peu la vapeur, les décennies de rejet, de carences affectives. Ce qui n'arrive pas, bien sûr. Si ce livre est sombre, c'est parce qu'il sonne juste. Un monstre à la surface. Rien qu'un monstre à abattre.

    La perpétuité, c'est le coup de masse qui achève cette pauvre gamine et moi, par la même occasion. Dès le début, la sensation d'oppression est impressionnante... Jamais plus sortir, jamais plus la rue, la ville, la forêt. Jamais plus l'amour, la peau d'un homme. Jamais plus de vie en dehors des barreaux. Elle le mérite? Si on est à la place de la famille de ses victimes, sûrement oui.. Sinon ... c'est bien compliqué.

    Daniel m'ennuie encore davantage. Gardien de prison, un parmi une horde de brutes, complices de violence, trafiquants de drogues, violeurs... Les surveillants pénitentiaires en prennent pour leur grade. Daniel commence par se dire "tiens, cette fille est pas cool, si je la tenais en respect en exerçant sur elle un chantage à base de relations sexuelles contraintes et de promesses de doses d'héro?". Un gros connard et je me sens trahie lorsque le récit tente de me forcer à l'apprécier, quand il prend de la place dans la vie de Marianne.  Belle élection que celle qui ne présente qu'un seul candidat...

    L'une des surveillantes est encore pire. On en vient à la souhaiter morte, de toute notre âme... Ou pire. C'est dire si je me sens une gentille lectrice bien sage et morale, après ça.

    Conclusion, un roman qui ressemble à un combat de boxe, coup sur coup sur coups, sans répit, pas le temps de souffler. L'outsider part avec le handicap des mains liées dans le dos, même si elle se défend comme une furie, on se range de son côté, on tente d'y croire...

    Il y a de la folie dans ce bouquin, la folie du désespoir, comme on dit. Et une grande violence qui n'est pas tant dans les mots ou les scènes décrites - même si on ne nous épargne rien - que dans l'ordure humaine qu'il nous balance à la figure. Very bad trip, mes amis.

    Le rédemption ? ( Petit rire sarcastique ). A-t-on souvent l'occasion de pardonner, dans notre vie? Pardonner au sens catholique, passer l'éponge sur une chose grave. Effacer une erreur qui n'est pas la nôtre. Il me faudrait tout un concile de rédempteurs, si on commençait à mettre le nez dans ma vie... 

    Je comprends ce que tu voulais dire, C'era. Si chaque roman de Karine Giebel remâche cette angoisse d'une possible rédemption...

     

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  • A la source du mal

    Mystic_river_lehane.jpgMystic River, Dennis Lehane

    Avis chrono'

    Un roman noir, sombre comme les eaux de la Mystic River. Polar psychologique sur le thème de la rédemption et de la difficile communication avec ceux que l'on aime.


    (C'est en entendant des collègues parler du film l'année dernière que j'ai eu envie de le lire. Je vais donc tenter de me regarder ça dès ce soir.)

    1975 – Trois garçons se retrouvent pour jouer ensemble. Un jour, une voiture s'arrête. Dave accepte de monter à bord. Il disparaît, enlevé par les Loups. Il sera retrouvé, mais pour lui, plus rien ne sera jamais pareil.

    2000 – Les enfants ont grandi. Jimmy est un ex-malfrat, rangé, père de famille. Sean est devenu flic. Dave a lui aussi femme et enfant et lutte contre ses démons personnels.

    Leurs trois vies vont à nouveau se rejoindre lorsque la fille de Jimmy est retrouvée sauvagement assassinée.

    « L'homme ou la femme que vous aimez est rarement à la hauteur de votre amour. Parce que personne ne peut être à la hauteur de sentiments aussi forts, et au fond, peut-être que personne ne mérite de supporter un tel fardeau »

    Un roman policier si sombre qu'il m'a fallu, pendant le R.A.T, le mettre de côté à la nuit tombante.

    Le meurtre en lui-même semble relégué au second plan par l'aspect psychologique du récit. Les trois personnages masculins occupent le devant de la scène, chacun semblant rivaliser de regrets, d'amertume et de souffrance. De vide.

    « Il aurait voulu […] expliquer ce qu'elle avait signifié pour lui et ce qu'il avait ressenti à presser le visage contre sa nuque dans ce même lit, à entremêler les doigts aux siens, […] à s'asseoir à côté d'elle dans une voiture , à l'entendre bavarder ... »

    Difficile de trouver là-dedans une lueur d'espoir. Même ce qui pourrait être positif (je pense à l'évolution de Sean) me semble incomplet, entaché, voué à l'échec.

    Mon personnage préféré est sans doute Jimmy. C'est une sorte de Bad Boy à l'envers. Un homme qui croit avoir laissé le plus sombre derrière lui et qui met beaucoup de temps à s'apercevoir qu'il s'est peut-être oublié lui-même dans ce renoncement.

    Quant à Dave, c'est un personnage très difficile à saisir. Il est au centre des deux épisodes. D'abord victime, mais victime ratée, si l'on peut dire. Il était considéré perdu et son retour, finalement, déroute tout le monde, à commencer par ses proches. Il grandit dans la culpabilité, songeant qu'il n'aurait jamais dû échapper à ses ravisseurs. Se pose alors à nous la question de la parole et de la cicatrisation. Il enferme ses secrets, il se tait. Il devient un homme hanté par les sévices sexuels subis dans son enfance. Dévoré.

    " Car à certains moments, Dave n'était pas Dave. Il était le Petit Garçon. Le petit Garçon qui avait échappé aux Loups. Mais pas seulement. Il était le Petit Garçon qui avait échappé aux Loups et Grandi. Or, cet être là n'avais presque plus rien de commun avec Dave Boyle."

    Ce grignotage de sa personnalité était sans doute déjà entamé, le meurtre de Katie réveille ses démons comme il réveille ceux de Sean et de Jimmy, car qui dit meurtre dit enquête et questions. Par une répercussion inéluctable, chacun se retrouve face à ses pires interrogations: qui suis-je pour moi? Qui suis-je pour les autres?

    A mon sens, c'est un récit qui porte sur la parole, sur ce que l'on choisit de dire et à qui. Ce que l'on préfère taire. Ce que cela coûte. Les personnages féminins en sont pour moi l'illustration.

    « Je crois qu'elle m'aime toujours, elle aussi. (Il écrasa sa cigarette.) Elle me téléphone tout le temps. Elle téléphone, mais elle ne dit rien.

    - Elle fait...quoi?

    - Je sais.

    - Elle vous téléphone, mais elle ne dit pas un mot?

    - Mouais. Ça dure depuis huit mois. »

     

    Dennis Lehane est aussi l'auteur de Shutter Island. Je suis presque allée voir le film! Je crois que je vais tout à fait me laisser tenter par le roman, même si j'ai manqué la lecture commune en septembre.

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