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De l'or en barre

faux_monnayeurs_gide.jpgLes faux-monnayeurs, André Gide

Le mot de Sound'

Comme vous ne tarderez guère à vous en apercevoir, c'est une plume différente de la mienne qui intervient aujourd'hui sur Tale me more. Je prête mes pages, pour la seconde fois et avec grand plaisir. Il fallait bien cela pour faire honneur au talent d'André Gide. Après une lecture plus ou moins commune, c'est Jeanne qui a relevé le défi. Je l'en remercie. Je ne manquerai pas de commenter et vous invite à faire de même.


extenso.jpgA ce jeu de conter les ratés, les rendez-vous manqués, les paroles jamais dites à en crever, les regrets sublimes et les passions adolescentes qu’on a le droit d’éprouver y compris à 35 ans (l’un des héros est ainsi un adulte patenté !), j’appelle le roi, le maître, l’orfèvre, j’ai nommé : Gide, André, Gide. Faux Monnayeurs, Les faux monnayeurs.

Coup de foudre de mes 23 ans (une de mes rares éditions à avoir été annotée), coup de foudre dix ans et des poussières plus tard. Comme quoi, un chef d’œuvre ne vieillit pas, sinon pour gagner en maturité, et devenir plus touchant encore. Est-ce possible pourtant qu’à 23 ans je sois passée à côté du thème principal de ce roman : l’homosexualité de certains personnages masculins ? Je suis bien en peine en effet de parler de manière critique de ce récit qui m’a bouleversée et me bouleverse encore, mais je sais dire qu’il ne m’en était rien resté, en dix ans, sinon cette certitude d’avoir aimé, d’avoir aimé de tout mon cœur, à en pleurer peut-être, oui, très sentimentalement, niaisement, sincèrement, dans le creux de mon oreiller. Des thèmes, donc, rien, des personnages, rien non plus, à part une vague reconnaissance à l’énoncé des noms « Olivier Molinier », « Bernard Profitendieu », « Edouard », autant de sésames à présent que je voudrais ne pas oublier et préserver dans mon cœur jusqu’à la prochaine décennie. De l’histoire ? Rien non plus, à tel point que je me suis presque sentie manipulée par l’auteur, à travers ce titre qui ne m’évoquait pas plus de choses, pour m’empêcher encore davantage de faire émerger quelques palpables souvenirs. Car de faux monnayeurs il n’est que peu question ici, sinon dans le dernier tiers du roman, et du moins est-ce de manière annexe, je dirais, en arrière-plan. Mais là encore le doute s’insinue en moi, et de même que j’avais (peut-être) été incapable de lire l’homosexualité des personnages (par pruderie ? naïveté ? sottise plus certainement, car on ne voit que ça en fait !), de même le suis-je peut-être encore à croire que le thème des faux monnayeurs n’est que secondaire, prétexte au récit des amours contrariées de nos personnages.  Des cours bien sûr (oui, car je suis étudiante à temps partiel !) éclaireront certainement ma lanterne à ce sujet, et achèveront certainement de me confondre dans mon aveuglement !

Tout cela est bien beau, mais en somme, de quoi s’agit-il, qui remue tant et bouleverse tant ? Rien d’autre somme toute qu’un banal feuilleton amoureux des affres de l’adolescence huppée, arrogante un poil, conquérante à n’en pas douter, du début XXe. Sans doute les avertis et curieux d’Histoire liront-ils ici et là quelques clins d’œil aux avant-gardes et créations de revues (NRF) dont Gide fut en sa jeunesse l’un des créateurs. Pour ma part, ce n’est pas ce qui m’a le plus captivée. Les personnages, des jeunes blancs becs pour les deux principaux, apprentis écrivains, apprentis aventuriers, apprentis dans la vie, s’y jettent à corps perdu avec une audace, une effronterie et une fougue que l’on retrouve dès les premières pages du roman, dans la lettre que Bernard écrit à son père, après avoir découvert que celui-ci n’est justement pas son père :

« Monsieur, j’ai compris à la suite de certaine découverte que j'ai faite par hasard cet après-midi, que je dois cesser de vous considérer comme mon père, et c'est pour moi un immense soulagement. En me sentant si peu d'amour pour vous, j'ai longtemps cru que j'étais un fils dénaturé; je préfère savoir que je ne suis pas votre fils du tout.» (pages 24, 26)

La malice et l’arrogance des personnages évidemment n’auraient pas de quoi nous tenir en haleine, s’il n’y avait le style de Gide, propre à nous faire aimer ces personnages, aussi imbus soient-ils, pour leurs défauts justement davantage que pour leurs qualités. C’est tout l’art de l’écrivain que de nous dresser le portrait d’une jeunesse qui se trompe, se cogne, s’aveugle, recommence et ce faisant nous renvoie un miroir de nos propres vicissitudes. Beau à en pleurer vous dis-je.

Car j’ai parlé de feuilleton, et il me semble bien tenir là quelque chose, dans ce que ce genre aurait de propre à peindre la psychologie des personnages, à ne faire que cela peut-être. Pourquoi n’a-t-on pas alors la sensation d’être dans un roman de gare ? Un roman à l’eau de rose (car tout finit bien, en plus de cela…) ? Car Gide dit et exprime avec une sensibilité inouïe les non dits, les paroles toujours refoulées, par orgueil mal placé ou simple timidité. D’orgueil il est souvent question dans ce roman, qui traite avec emphase*  de la question de l’honneur. Mais les personnages sont tellement souvent ramenés à l’expression la plus sincère de leur médiocrité, que la grandiloquence des uns, l’aspiration à de beaux grands idéaux un peu ridicules, est toujours gentiment égratignée, moquée, par la faculté des autres à faire tomber les masques, à voir au-delà des apparences. Et savez-vous quels personnages sont les plus à même de dire, de voir, de sentir et d’admettre ? Les femmes bien sûr : Laura d’abord, la divine Laura, jouet et victime de l’inconstance d’un jeune amant l’ayant mise dans une position délicate (voudrais-je imiter Gide que je n’en garderais que les traits les plus ridicules! Comprenez donc : l’ayant mise enceinte !), très capable de pardonner, de comprendre, de se sacrifier enfin :

« Mon ami,
La dernière fois que je vous ai vu – c’était, vous en souvenez-vous, à St James Park, le 2 avril, la veille de mon départ pour le midi – vous m'avez fait promettre de vous écrire si je me trouvais dans l'embarras. Je tiens ma promesse. A qui d'autre que vous en appellerais-je? […] vais-je oser vous avouer à vous ce qu'à Félix je ne puis dire? Le moment est venu que je devrais le rejoindre. Hélas, je ne suis plus digne de le revoir. Les lettres que je lui écris depuis quelque temps sont menteuses et celles que je reçois de lui ne parlent que de sa joie de me savoir mieux portante. Que ne suis-je demeurée malade! que ne suis-je morte là bas! … Mon ami, j'ai dû me rendre à l'évidence: je suis enceinte; et l'enfant que j'attends n'est pas de lui. J'ai quitté Félix il y a plus de trois mois; de toute manière, à lui du moins, je ne pourrai donner le change. Je n'ose retourner près de lui. Je ne peux pas. Je ne veux pas. Il est trop bon. Il me pardonnerait sans doute et je ne mérite pas, je ne veux pas qu'il me pardonne. ( pages 72) »

Et surtout, cet autre personnage féminin, nullement dupe et clairvoyante au contraire, la sœur d’Edouard, Pauline, dont on croit un temps qu’elle est elle-même la dupe de son entourage, pour apprendre, d’autant plus ému, qu’elle a en réalité tout compris, tout saisi, depuis le début, concernant son mari, ses fils, jusqu’à l’homosexualité de son frère, leurs faux-semblants et les efforts qu’ils font pour « l’épargner ». Je n’en finirais pas de vouloir vous citer des passages où sa sensibilité et son intelligence surgissent de manière frappante, mais je me contenterais de celui-ci :

« On dirait qu'il a peur de moi. Il a bien tort. Depuis longtemps je suis au courant des relations qu'il entretient... je sais même avec qui. Il croit que je les ignore et prend d'énormes précautions pour me les cacher; mais ces précautions sont si apparentes que plus il se cache, plus il se livre. Chaque fois que, sur le point de sortir, il affecte un air affairé, contrarié, soucieux, je sais qu'il court à son plaisir. J'ai envie de lui dire: ' Mais mon ami, je ne te retiens pas; as-tu peur que je sois jalouse? ' J'en rirais, si j'en avais le coeur. Ma seule crainte, c'est que les enfants ne s'aperçoivent de quelque chose; Il est si distrait, si maladroit! Parfois, sans qu'il s'en doute, je me vois forcée de l'aider, comme si je me prêtais à son jeu. Je finis par m'en amuser presque, je vous assure; j'invente pour lui des excuses; je remets dans la poche de son pardessus des lettres qu’il laisse traîner ». (p272, 273)

Oh et je me rends bien compte à présent que je ne dis rien, je n’ai toujours pas résumé de quoi il s’agit : à la vérité, je suis bien piètre critique de ce roman. Qu’en dire en fin de compte, qui vous fasse aller y voir de plus près ? J’échoue et je rends les armes (à celle qui m’a fait cette commande empoisonnée !), il n’est pas dit que 10 ans après ma première lecture je sache seulement mieux en parler, ni plus clairement. Au moins aurez-vous senti mon enthousiasme, seul fil conducteur de ma piètre lecture. S’il faut vous fier à cela seulement, alors oui, lisez-le, chanceux qui l’avez oublié ou ne l’avez pas encore découvert !

Et pour le plaisir, ce dernier passage :

— Je voudrais savoir si tu éprouves pour Laura … du désir ? »
Bernard devint brusquement très grave.
« C’est bien parce que c’est toi…, commenca‐t‐il. Eh bien ! mon vieux, il se passe en moi ceci de bizarre, c’est que, depuis que je la connais, je n’ai plus de désirs du tout. Moi qui, dans le temps, tu t’en souviens, m’enflammais à la fois pour vingt femmes que je rencontrais dans la rue (et c’est même ce qui me retenait d’en choisir aucune), à présent je crois que je ne puis plus être sensible, jamais plus, à une autre forme de beauté que la sienne ; que je ne pourrai jamais aimer d’autre front que le sien, que ses lèvres, que son regard. Mais c’est de la vénération que j’ai pour elle, et, près d’elle, toute pensée charnelle me semble impie. Je crois que je me méprenais sur moi‐même et que ma nature est très chaste. Grâce à Laura, mes instincts se sont sublimés. Je sens en moi de grandes forces inemployées, je voudrais les mettre en service. J’envie le chartreux qui plie son orgueil sous la règle ; celui à qui l’on dit : ‘‘Je compte sur toi.’’ J’envie le soldat… Ou plutôt, non, je n’envie personne ; mais ma turbulence intérieure m’oppresse et j’aspire à la discipliner.

C’est comme de la vapeur en moi, elle peut s’échapper en sifflant (ça c’est la poésie), actionner des pistons, des roues ; ou même faire éclater la machine. Sais‐tu l’acte par lequel il me semble parfois que je m’exprimerais le mieux ? C’est… Oh ! Je sais bien que je ne me tuerai pas ; mais je comprends admirablement Dmitri Karamazov, lorsqu’il demande à son frère s’il comprend qu’on puisse se tuer par enthousiasme, par simple excès de vie… par éclatement. »

Un extraordinaire rayonnement émanait de tout son être. Comme il s’exprimait bien ! Olivier le contemplait dans une sorte d’extase. « Moi aussi, murmura‐t‐il craintivement, je comprends qu’on se tue ; mais ce serait après avoir goûté une joie si forte que toute la vie qui la suive en pâlisse ; une joie telle qu’on puisse penser : Cela suffit, je suis content, jamais plus je ne … »

Mais Bernard ne l’écoutait pas. Il se tut. À quoi bon parler dans le vide ? Tout son ciel de nouveau s’assombrit. (p265)

 Jeanne

*rectificatif : ce sont les personnages qui sont emphatiques et mélodramatiques dans leur manière de voir le monde, non l’écriture, me semble-t-il en fin de compte, qui reste elle, toujours limpide et pure.

 

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Commentaires

  • Lorsque j'ai vu Sound lire "Les Faux Monnayeurs" je me suis souvenue combien j'avais aimé ce roman mais, tout comme toi Jeanne, il ne m'en était resté qu'un vague, très vague souvenir... des noms que tu cites, Edouard, oui... J'avais 19 ou 20ans.
    Curiosité attisée. Cet article enthousiaste certes (un brin mélancolique aussi non?) me donne encore plus le désir de découvrir (redécouvrir???) toutes ces émotions qui ont dû me traverser à la première lecture et confirmer je l'espère cette exaltation dont je garde une indicible trace...

  • Mélancolique? Ah oui, peut-être. Je suis mélancolique avec les livres que j'ai aimés, il faut croire! Sans doute parce qu'ils constituent des marque pages de ma vie et qu'à l'instar des films vus - dont je conserve encore aujourd'hui, ridiculement, chaque ticket, y compris si le titre du film n'est pas dessus - ils témoignent quelque peu douloureusement du temps qui a passé. Aussi est-il plus facile de se souvenir des circonstances d'une lecture que du contenu du livre, non? D'où ma mélancolie, sans doute.
    Mais tant mieux si cela ne t'arrête pas et te donne au contraire le désir d'y revenir!
    Les indicibles traces sont toujours celle qu'il est le plus plaisant de ranimer...!

  • A l'inverse de vous je l'ai tellement vu dans la bibliothèque de mon père et j'en ai tellement entendu parler à la fac que j'étais persuadée, à tort, de l'avoir déjà lu! Mais c'est tant mieux, j'en ai profité, d'autant plus que j'avais déjà lu ton texte avant de finir le roman.

    Je te plains presque de devoir suivre des cours... ça gâche toujours le plaisir, de décortiquer un tout en morceaux aussi brillants soient-ils. En procédés, en techniques, en "trucs".
    Surtout quand l'oeuvre est aussi pleine de vie, d'élan, de fougue que celle-ci. On aimerait croire longtemps que ce n'est fait que d'une seule impulsion. Les meilleures choses n'arrivent-elles pas d'elles-même, à l'instinct?

    "N'avez-vous pas remarqué, dit alors Hildebrant, que les actions les plus décisives de notre vie, je veux dire: celles qui risquent le plus de décider de tout notre avenir sont le plus souvent des actions inconsidérées?" (je n'ai pas noté la page).

    D'ailleurs, mon passage préféré (dans ce que tu as écrit) est celui-ci "Les personnages, des jeunes blancs becs pour les deux principaux, apprentis écrivains, apprentis aventuriers, apprentis dans la vie, s’y jettent à corps perdu avec une audace, une effronterie et une fougue que l’on retrouve ... "

    Et tu écris que tout n'est qu'histoire de cœur - c'est le propre de la jeunesse? ou le propre de ceux qui se laissent encore aller à l'aventure? - et que tout finit bien. Tout finit bien...? Je suis restée un peu embarrassée, face à cette remarque, qui vient balayer la note sombre de la fin. Pourtant, je ne peux pas dire que je suis en désaccord, sans pouvoir l'expliquer. Peut-être parce que ça n'est pas vraiment la fin? Que tout court encore, mais sans créer de frustration.

    Je te rejoins sur ce point: c'est sublime, cette façon d'exprimer la relation naissante entre Olivier et Edouard sans qu'eux mêmes n'arrivent rien à dire. Ce sont des rencontres qui créent quelque chose de spécial en moi. De mordant. D'émouvant. Je suis presque déçue de l'évolution dans la dernière partie. Finir bien n'est pas toujours finir beau.

    En revanche, j'ai été moins satisfaite que toi des personnages féminins. Dans leur perfection ou leur façon d'envisager leurs fautes, elles ont quelque chose de la Madone - Se sacrifier... mmmh ? - qui me dérange un peu. Un côté "intouchable", une aura sacrée ? Je préfère les égratignures et les bords cabossés des garçons.
    Laura n'est rien, elle ne me fait rien, à peine un prétexte à une intrigue secondaire et au retour d'Edouard.
    Pauline, oui, est émouvante. Elle éveille une envie de la protéger. Elle a sa clairvoyance pour elle, son intelligence, mais de bonheur... point . On voudrait la sortir délicatement de sa position et la transplanter ailleurs ou elle pourrait refleurir.

    Mélancolique, donc, ce sera le mot de la fin? Que la littérature est dangereuse...

    Je préfère l'idée d'aller ranimer quelque trace indicible et secrète! Je suis aussi de celles qui se souviennent bien plus des contextes que des contenus.
    Par contre, j'ai cessé l'année dernière de conserver mes tickets de cinéma. J'ai gardé ma collection, mais je n'y ajoute plus aucune pièce.

    Pour finir, ma propre citation préférée des faux-monnayeurs:
    "Chacun d'eux se dépitait à ne sortir de soi rien que de sec, de contraint; et chacun d'eux, sentant la gêne et l'agacement de l'autre, s'en croyait l'objet et la cause. De tels entretiens ne peuvent donner rien de bon, si rien ne vient à la rescousse.
    Rien ne vint."

  • J'étais à peu près sûre que mon avis sur ce happy end relatif d'"embarrasserait" (euphémisme, non? Avoue que tu n'es pas du tout d'accord).
    Il faut croire que j'ai volontairement occulté la cruauté et l'extrême tragique d'une part du récit ayant trait à l'enfance. Trop dur, inconcevable, et si vrai. Les faibles - comprends : les sensibles, les timides, les gentils - ne me semblent pas avoir leur place en ce monde, impitoyable pour eux, et je tremble d'en avoir enfanté au moins un!
    Pour le reste, que puis-je dire? Je suis d'accord avec toi: Laura insignifiante, Pauline moins, mais que l'on voudrait voir ailleurs. Quant à ce passage préféré que tu cites, évidemment, ne te l'avais-je pas également donné comme mien préféré?
    La justesse de tes commentaires est de nature à me dissuader de jamais m'essayer de nouveau à l'exercice: j'aurais toujours l'impression, en tapant vaguement juste à certains endroits, de manquer l'essentiel.

  • "Ils témoignent quelque peu douloureusement du temps qui a passé." Douloureusement, peut-être oui, parfois... :)
    Ils témoignent aussi parfois de notre évolution pour peu qu'il y ait un certain nombre d'années écoulées entre les lectures. Je présume qu'à l'époque où j'avais lu pour la première fois "Les faux monnayeurs", une part de moi s'identifiait à cette jeunesse fougueuse, cette "jeunesse qui se trompe, se cogne, s’aveugle, recommence" comme tu le dis si bien. Aujourd'hui qu'en restera-t-il? ^^

    Et puis, tout ce qui ramène au passé, en tout cas à ces instants de vie précieux, à ce moment où tu te dis un sourire "mélancolique" aux lèvres "je me souviens", que ce soit un livre, un film, une musique, une odeur, un rire, une voix, un lieu (ces traces de nos vies) mérite effectivement d'être ranimé (peu importe si au fond quelque part cela fait un peu "mal").

    Rien, Jeanne, dans ce que tu as dit ne m'a freinée, j'ai simplement hâte maintenant de tenir ce livre entre mes mains.

  • Urgence médiathèque, j'écoute! Ne paniquez pas, c'est à moins de 3mn en trottinette. On ne livre pas le dimanche par contre.
    Sinon, il y a sûrement une librairie dans un rayon de 60 km...

  • Tout à fait d'accord: même si ça fait un peu mal, ça mérite d'être ranimé. Il faut simplement veiller à ne pas trop se complaire dans le passé.
    Sans doute m'étais-je aussi identifiée à la jeunesse fougueuse du roman, avec en plus un je ne sais quoi de complexe d'infériorité face à ces jeunes si sûrs d'eux, si entreprenants, si sûrs d'avoir la vie devant eux (je pense au personnage de Bernard)...

  • @ C'era: S'il y a de la mélancolie à ranimer quelque chose, c'est parce qu'il y a regret de ce qu'on a laissé s'éteindre, non?

    @ Jeanne: Grrr tu m'énerves à n'être jamais satisfaite de ce que tu dis/écris... on (je) n'ose plus poursuivre la discussion de peur de te froisser. Mais peut-être est-ce le but? Je vais déjouer tes plans machiavéliques et répondre en long en large et en travers!

    Tu te trompes complètement, je ne trouve pas du tout la fin tragique ou dramatique, ce n'est pas un euphémisme, ce qui m'embarrassait (me surprenait, simplement?), je crois, c'est que ça sonne comme une évidence, pour toi. Je ne veux pas en dire trop, parce que qqun ici compte le lire prochainement, mais je n'ai pas été particulièrement touchée par ce qui relève, à la fin, de l'accident. Sans doute, dans les causes objectives, il y a de ce que tu nommes la cruauté, mais ça ne relève pas du meurtre, pour moi, mais d'une certaine grandeur d'âme digne d'une bonne tragédie classique. A ce moment, Boris n'est pas, ou n'est plus faible à mes yeux. Il est conscient. Le méchant, lui, n'est qu'un petit con.

    C'est un roman, on peut se permettre d'en penser ce qu'on n'oserait pas en penser (en dire surtout) dans la vie.

    Plus j'y réfléchis, car mes remarques de tout à l'heure étaient assez brouillonnes, et plus j'ai envie de revenir sur ce que je disais. Il faudrait lire plutôt:
    Tout finit bien...? Je suis restée un peu embarrassée, face à cette remarque, car autant la fin
    malheureuse d'une des intrigues ne pèse pas assez pour contaminer le bilan de l’œuvre, autant je ne vois pas de pendant positif significatif.
    Et je reviens à ce que je disais tout à l'heure, sauf que je vois mieux où je voulais en venir: tout court encore.

    Si je cherche à imaginer quelle fin m'aurait semblé la plus heureuse possible, je n'en trouve aucune. Il me semble même qu'il ne peut pas y en avoir, à aucun récit dont les protagonistes sont aussi jeunes. C'est trop tôt. On peut toujours se projeter plus loin et se dire "oui, mais après? Et si le vent tournait?"
    Et ce qui est bien, c'est que ça marche dans l'autre sens, il n'est jamais trop tard pour terminer par une happy end.

    Donc, vivent les héros de 80 ans! Ou de 100, tiens, comme dans le roman suédois de C'era (celui dont elle n'arrive pas à achever la critique ^^ ).

    Olivier est un tendre et Bernard brûle. Il est fort, si on doit s'en tenir à cette opposition réductrice. Je pense que les timides, les sensibles et les gentils ont leurs propres armes, leurs propres leviers pour agir sur le monde. Ils sont simplement plus lents, plus insidieux. - Enfin... c'était la conclusion d'un long débat très ardent avec Jocelyne :)

    Mais mais mais... j'ai beau croire tout ceci... je préfère quand même Bernard à Olivier!

    Et comme ça, tu es vraiment d'accord avec moi? Ta divine Laura est devenue insignifiante? Ce revirement mérite une explication... ^^

    "j'aurais toujours l'impression, en tapant vaguement juste à certains endroits, de manquer l'essentiel." ... Au contraire, c'est à force de coups aveugles et de confrontations qu'on avance. Le stérile monologue de ce blog me pèse... Il faut de la bataille et de la contradiction, on ne s'élève jamais seule.
    Si je pouvais revenir en arrière et appliquer ce que je viens tout juste de comprendre à mes années d'étude... ahlàlà.
    Arf, mais voilà que je me complais, comme une faible, dans le passé!

  • Si la citation est ta citation, alors je te la laisse ^^
    Je me suis posé la question, en effet. J'ai vérifié sa présence dans mes notes, vérifié qu'elle ne figurait pas dans ton article... C'était dans un mail, peut être?
    Ne nous battons pas. Les grands esprits ont droit de se rencontrer, ou de s'accorder et puis ce passage est magnifique.

  • @Sound : >:) Ce sont dans ces moments-là que je m'agace de ne pas savoir où j'ai pu perdre certains de mes livres... Donc, urgence, oui il y a urgence parce que je n'aime pas rester sur ma faim et me répéter "j'ai aimé" sans plus trop savoir pourquoi. Il FAUT que je sache donc merci de te dévouer pour combler ma frustration.

    @Jeanne : "ne pas se complaire dans le passé"... Est-ce seulement possible?
    Je ne m'y complais pas toujours mais j'y suis attachée, profondément. En partie à cause de mon rapport aux autres, de ces liens privilégiés et absolus développés à cet âge où l'on sait pouvoir trouver dans l'amitié ce qui nous manque par ailleurs. Et parce que cette amitié nous conduit dans les entreprises les plus belles, les plus folles, parfois les plus dangereuses.
    Est-ce pour ça que j'avais aimé Les faux monnayeurs? Une forme de réciprocité.
    Ah que c'est frustrant de ne pas me rappeler le contenu du roman...

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