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  • Le lion au corps

    la lune est à nous, cindy van wilder, mieux que la coke, LGBTQQI2SAAP, le lion au corps, une locomotive dont le confucteur est pas en grèveLa lune est à nous, Cindy Van Wilder

    Le titre me plaît énormément, il est à l'image du roman, plein de mordant et d'assurance. Pour l'avoir rencontrée à l'occasion d'un petit salon de l'imaginaire, où les auteur.e.s étaient particulièrement accessibles, je sais qu'il est aussi à l'image de son auteure. Même sans lui parler directement, j'ai senti chez C. Van Wilder le même rayonnement bienveillant.

    Etre ado, être gros.se et s'en prendre plein la tronche, voici le coeur de ce roman jeunesse, décliné au féminin avec Olivia, qui s'épanouit au travers de son blog jusqu'à ce qu'un connard déclenche une tempête, et au masculin avec Max, complexé, qui doit faire face au divorce de ses parents et à un déménagement imposé en Belgique.

    C'est un tour de force d'obtenir un texte aussi cohérent en abordant tout ce qui peut faire souffrir : cyber harcèlement, grossophobie, homophobie, non représentation des personnes racisées dans les médias, la culture, le marketing, sexisme, conflit avec les parents, pression des réseaux sociaux, adoption...

    J'ai aimé l'analyse de la portée des réseaux sociaux et des moteurs de recherches, qui sont à la fois des algorithmes insensibles qui conduisent au formatage des contenus et à l'hyper-exposition des stéréotypes mais aussi le lieu où trouver des représentant·es, des modèles, des groupes communautaires et du soutien quand on appartient à une minorité ou qu'on est isolé·e.

    Si le roman soulève tout ce qui peut faire mal, c'est pour nous inonder ensuite de baume. Il est beaucoup question d'amitié et d'amour. Et pour une fois, personne n'est oublié, on s'aventure même un peu au delà des deux premières lettres de LGBTI. Ça fait un bien fou.

    J'ai été profondément émue. Ce livre ne rouvre pourtant pas chez moi des cicatrices d'adolescence. J'étais alors quelconque, cisgenre, blanche, lunettes, appareil dentaire, cheveux longs raides et moches, je n'ai jamais été particulièrement moquée ni embêtée. Ce que le livre chatouille ou grattouille, c'est plutôt mon identité d'adulte, mal sortie de son cocon, le conflit larvé qui m'oppose à mon corps, le mec aviné à Lorient qui m'a abordé dans la rue pour me demander si j'étais "lesbienne ou quelque chose comme ça", qui m'a fait peur et auquel je n'ai rien su répondre d'intelligent. Ma position incertaine sur tout un tas d'échiquiers, quand je ronchonne contre mes semblables, mon hésitation entre repli résigné et combativité. Savoir lâcher même dans ces moments où on se sent comme perfusé d'énergie, parce que le combat n'a pas vocation à être emporté. Savoir au contraire dénicher un peu d'enthousiasme pour raviver une journée morose...

    Ce livre en est une, de perfusion d'enthousiasme. C'est un roman lumineux, humaniste, plein de peps, qui invite à l'amour, à l'amitié, à la solidarité et à la lutte.
    La lune est à nous. A nous.