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Sur un petit nuage

terre de brumes cindy van wilder.jpgTerre de brume - Le sanctuaire des dieux, Cindy Van Wilder

Nous sommes vraiment à la frontière de ce que je peux écrire ici... Pire que les auteur·es non-décédé·es, voici les auteur·es non-décédé·es qui échangent régulièrement avec une personne que je connais. Je me demande comment font les journalistes, les chroniqueurs d'émission, pour émettre un avis sur un bouquin dont ils rencontrent l'auteur·e... ça me paralyse et pourtant je ne la connais pas personnellement, je ne l'ai que croisée.

Dans ces moments-là, je me sens hyper mal à l'idée de tous ces livres dont je me suis allègrement moquée sur ce blog. C'est quand même autre chose que de discuter d'un roman entre amis pendant un dîner. S'il y avait la moindre chance qu'un·e auteur·e me lise, j'édulcorerais tout, c'est évident.

Bref (j'essaie d'user parcimonieusement du "bref", mais souvent, il s'impose).

C'est un roman jeunesse. Il part donc avec un handicap. Mais c'est aussi l'auteure de La Lune est à nous, le roman le plus bienveillant et réconfortant de mon année... Jusqu'à un éventuel prochain roman contemporain queer-friendly, convenons ensemble que ses autres œuvres seront de toute façon moins à mon goût. Sur cette échelle secondaire, Terre de Brume arrive en tête, devant Memorex, que j'avais trouvé décevant.

Je commence par les points positifs. C'est un univers très attirant, un imaginaire qui me parle. J'aime ce doux cataclysme qui prend la forme d'une épaisse nappe de brume venue recouvrir et empoisonner un monde entier, ne laissant que quelques survivants, sur des îlots émergés. L'image me plaît. Émotionnellement, c'est équilibré, c'est assez proche du conte dans la structure, avec ce motif des parents morts, disparus, ou non-mentionnés, qui  placent en quelque sorte les deux héroïnes à un point de départ.

Ce sont deux jeunes femmes, affirmées, audacieuses, indépendantes et complémentaires puisque l'une pratique la magie de l'eau, l'autre celle du feu. Au départ elles ne se connaissent pas mais des créatures qui émergent de la brume vont les faire converger l'une vers l'autre.
Le symbole de la réunion de ces deux éléments suffit à démontrer que ça n'est pas que mon imagination: il se dégage des scènes où elles se battent ensemble une forme de sensualité plus ou moins explicite qui est très agréable.

J'en connais (au moins une, mais qui milite pour dix) qui souhaitent qu'une romance se déclenche entre les deux héroïnes dans le volume suivant et je reconnais que... moi-même... quand je m'autorise... C'est que j'ai un faible pour les scènes de premier baiser. Et encore plus pour toute la tension qui précède cet instant où l'on sait que ça va arriver. Un premier baiser réussi et mon cœur est conquis à tout jamais. Qu'on se le tienne pour dit.

Finalement, ma seule critique*, c'est que c'est de la fantasy jeunesse et que ce n'est pas mon genre favori. J'ai un peu trop d'attentes, ça me semble souvent manquer de complexité, de densité. Je suis chiante, je sais. Mais je ne peux pas retrouver mon regard d'enfant. J'en suis incapable. Quelqu'un a le mode d'emploi ?

Je lirai bien sûr avec plaisir le tome 2 mais si elles finissent l'une ou l'autre avec un jeune homme... :(

 

* Ah et aussi le choix de l'alternance des points de vue, un coup une fille, un coup l'autre, à la première personne. Il faut que je creuse la question, mais je dois aussi avoir un problème avec les récits à la première personne.

Commentaires

  • Je vais sortir de l'anonymat pour revendiquer mon envie de voir la relation d'Hera et Intissar aller plus loin. J'ai confiance !
    J'ai trouvé qu'en moins de 300 pages, l'univers était vraiment habilement construit. On apprend déjà beaucoup de choses quand on y réfléchit ! Et non, ce n'est pas parce que je suis *totalement* partiale en ce qui concerne l'autrice ! ;)

  • Je ne te jette pas la pierre ^^ il y a des femmes comme ça qui font perdre toute objectivité ! Trêve de plaisanterie j ai oublié de te tagguer sur la conversation d hier avec condie rais. C etait une bonne qst de savoir si mettre un texte à dispo gratuitement était ou non une bonne promotion poir son auteur.e . Sur la fin un type qui tient un blog est intervenu et ça a glissé sur ça justement, il echange avec elle régulièrement et du coup il se refuse à critiquer ses textes. Dès que tu as parlé même seulement par messages écrits à un auteur c est mort. Tu ne peux plis rien ecrire de la même façon. Tu peux tâcher d avoir qd même un regard critique. T appliquer. Ms ça n aura jamais le même ton que si ça reste un nom sur une couverture.

  • Je reconnais que le fait de connaître et d'échanger avec un auteur ou une autrice font aborder la lecture du roman de façon différente. Parce qu'on va faire attention à des détails particuliers, ou qu'on va le lire avec une certaine émotion.
    Mais je crois qu'il reste possible de garder une certaine objectivité. Il y a des choses que je n'apprécierais pas, même dans le texte de quelqu'un que j'adore. Là, par exemple, dans le tome 2, je serai sans doute déçue si l'attraction ne va pas plus loin ! Mais je ne resterai pas fâchée longtemps ! ;)

  • Tu dévies la question. Ce n'est pas la même chose, regretter que l'intrigue n'ait pas suivi telle ou telle route et trouver un vrai défaut au roman.
    Si tu connais l'auteur.e et que c'est mauvais, pas horrible, juste très bof. Tu lui dis quand même que c'est bien ? Pour encourager ?
    ça ne doit pas être confortable.

    Pour Intissar et Héra, je ne serai pas déçue si ça reste à l'état de tension latente. C'est romantique aussi, non? ça marche justement parce qu'on le perçoit quand même. C'était parfaitement dosé dans le premier tome. Si on veut le voir, on le voit. Si on veut l'ignorer, on peut. Et puis pour l'instant c'est un roman jeunesse, même pas tellement un young adult. C'est peut-être pas une priorité d'y inclure une romance.
    Mais je vote pour quand même :) Un baiser, un baiser !

    Il nous faut un autre avis. Qu'a dit Sia à ce sujet ?

  • Vous m'avez demandée, votre honneur ?

    Concernant le regard d'enfant, pas de mode d'emploi. Mais quand je lis de la jeunesse, je ne l'aborde pas comme un roman adulte (je vais être plus ou moins critiques sur certains points suivant le public cible). Déformation pro, je crois...

    Concernant les deux personnages, j'attends (incroyable mais vrai !) que ça se développe dans la suite. Mais soyons claires : s'il n'y a pas de romance, cela m'ira fort bien aussi. En général, quand il y a romance entre les deux protagonistes, ça me gonfle profondément, mais je n'ai pas encore beaucoup lu de romans de fantasy avec romance gay/lesbienne (j'ai concrètement un seul titre qui me vient en tête, donc je pars du principe, sans doute biaisé, que ce n'est pas hyper répandu), d'où sans doute cet effet d'attente dû à la nouveauté ;)

    Et pour le débat "peut-on critiquer un auteur qu'on connaît ?", je suis très partagée sur la question. J'arrive tout à fait à critiquer objectivement l’œuvre d'un auteur que je connais et avec qui j'ai échangé (boulot oblige), mais si je m'en sens trop proche (ou que je sais qu'il/elle lit mon blog), si j'ai des choses désagréables à dire, je préfèrerais m'abstenir d'écrire.
    Ceci étant dit... je ne suis vraiment proche d'aucun auteur/e, donc je me sens encore assez libre de déblatérer tranquillement dans mon coin :p

  • Les romances LGBT sont d'autant moins répandues quand il s'agit de livres pour la jeunesse. Je suis très contente chaque fois que je trouve (c'est à dire, quand Solessor trouve) un éditeur qui s'y risque !
    Est-ce que les enfants ont les mêmes critères que les adultes, quand ils jugent un livre ? Même sans pouvoir forcément le formuler ? Une écriture de qualité, des personnages qui ne sont pas des caricatures, représentatifs de la diversité du monde et non de ses clichés...
    Si on m'avait demandé à l'époque, j'aurais dit que j'aimais le Club des cinq pour "l'aventure". Après coup, je me dis que j'aimais que Claude soit la leader de la bande. Avec son caractère qualifié de "garçon manqué", elle était pour moi une fille très réussie !

    Que disent les enfants de leurs raisons, quand ils n'ont pas aimé un livre ? Il faudrait que je fréquente un peu plus de ces petites choses...

  • C'est très variable, mais ça peut être (en élémentaire) "J'ai pas aimé ce livre parce qu'un personnage harcèle un autre"ou "parce que Machin n'est pas gentil avec Truc".
    L'an dernier, j'ai bossé sur une pièce qui évoque le racisme (Je peux savoir pourquoi je suis noir ? de Julie Rey) avec des 6e et au début, c'était épidermique, ils détestaient la pièce parce qu'ils pensaient que la dramaturge et les persos étaient racistes. Alors que c'était l'histoire d'un petit gars confronté au racisme. Après on a parlé de son autre pièce, Dans la famille, jamais !, qui traite de l'homosexualité et là la classe était hyper clivée : les garçons répétaient consciencieusement les clichés entendus de leur entourage (ça va détruire l'humanité - LOL - c'est contre nature, et autres bêtises du même acabit) alors que les filles étaient beaucoup plus dans la bienveillance. Ceci étant, la pièce parlait de deux garçons et je ne sais pas si les réactions auraient été identiques s'il s'était agi de deux filles. Je te dis tout ça mais les 6e, c'est encore des bébés :)

    Je pense que l'important, c'est aussi montrer dans la littérature que le monde ne se limite pas aux petites filles blanches, blondes et aux yeux bleus, ou aux garçons hétéros. Généralement les enfants prennent le truc comme il vient, sans se demander si c'est vraiment représentatif du monde et de la société ; en revanche, ils intègrent inconsciemment le schéma. Donc c'est important de montrer plein de schémas différents :)

  • Je suis completement d accord ! Je pense meme que ça entre pour beaucoup dans ma sévérité. Quelque part écrire un mauvais livre pour un adulte ça aura moins d impact. Les esprits sont dejà formés.
    Avec tous les enjeux en ce moment... Mais je sais qu il ne faut pas perdre de vue la lecture plaisir. Tout recit n est pas militant.

  • Heureusement la représentativité s'améliore en littérature jeunesse, et certains tabous sont levés par des auteurices qui osent, et Cindy Van Wilder en fait partie.

    En fantasy, on commence à voir davantage de diversité sexuelle (Les Seigneurs de Bohen, Six of Crows, Arachnae... si je ne dis pas de bêtises). En littérature blanche un peu aussi, avec des romans tant sur l'homosexualité que sur les transgenres. Je parle bien en jeunesse, je suis moins au courant en litt adulte.
    Bon, il reste du chemin à parcourir, dans la plupart tout est très clivé, la bisexualité par exemple n'est qu'anecdotique.
    La sexualité commence à être abordée également, timidement. Ce sont des choses qui tendent à évoluer. Heureusement, parce qu'on part de loin !

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