Les cerfs-volants de Kaboul, Khaled Hosseini
Avis chrono'
Il est difficile de s'identifier au héros de ce récit, sauf à être particulièrement maso... C'est déjà un coup de force de parvenir à nous faire aimer un récit en dépit de son principal protagoniste, mais ça l'est encore plus de faire de la culpabilité le thème du roman. Sous des dehors un peu austères, un beau récit.
Célèbre, ce livre, non? J'ai en tout cas l'impression d'en entendre parler depuis des années. Ce n'était pas si mal même si je tâtonne encore un peu pour savoir ce qui m'a plu. Je me demande s'il ne s'agit pas d'une sorte de conte... Peut-être que j'y pense parce que ce qui m'en reste en mémoire, avec le recul, c'est ce sentiment d'attente.
Le titre original est The Kite-runner. Le titre français conserve donc le cerf-volant, pour sa valeur symbolique dans le roman (présent au moment de la faute morale et après l'acte rédempteur) mais le passage au pluriel fait disparaître la singularité de ce cerf-volant précis et pire encore, efface complètement Hassan. J'aime comparer les titres ^^ ici je trouve qu'on perd beaucoup du sens, mais qu'on gagne infiniment du point de vue commercial.
Chaque fois que je regarde les titres en v.o., ça me renvoie à ce jour - à la fac il me semble - où j'ai vraiment pris conscience que certains livres étaient traduits. Et tout ce que ça implique. Vertigineuse pensée... même maintenant, ça me trouble encore, cette incertitude: est-ce que je lis bien ce que l'auteur voulait me faire lire?
Mais je prends les choses dans le mauvais sens, j'ai oublié de résumer. Ce personnage principal peu sympathique est un enfant, Amir. Orphelin de mère, il tente par tous les moyens de s'attirer l'affection de son père, un homme important et influent à Kaboul. Amir grandit auprès d'Hassan, le fils du serviteur de la maison. Les deux garçons sont inséparables, mais s'agit-il d'amitié véritable? Car Hassan est chiite. Lui et son père sont régulièrement malmenés, insultés ou moqués.
Hmm je sens que je m'embourbe dans ce résumé. Le roman a pour toile de fond les conflits en Afghanistan, l'arrivée des talibans, la guerre. Amir quitte avec son père le pays pour gagner les Etats Unis, il grandit là-bas, étudie, se marie. Mais le véritable sujet du roman, c'est la culpabilité. Amir n'a rien fait pour Hassan lors d'une scène terrible et toute sa vie, il porte cette faute en lui. C'est un lâche. Lorsqu'il retourne au pays ce n'est même pas pour se racheter, mais parce qu'on l'y force. Ce qui le rend si peu sympathique à nos yeux, c'est qu'on voit bien que le roman veut le conduire à la rédemption, mais qu'il renâcle pire qu'un âne.
La culpabilité. Formidable sentiment, aussi universel que l'amour. Je me demande si l'espèce d'hostilité qu'on ressent (enfin, je ne sais pas, ce n'est peut-être pas le cas pour chaque lecteur) envers Amir ne tient pas à ce qu'il choisit la pire des positions. Il reste au purgatoire, il traîne son boulet d'une page à l'autre.
Hassan est une figure de sagesse. Une figure idéalisée du pardon. On comprendrait Amir s'il oubliait, s'il minimisait. Ce n'était qu'un enfant. On comprendrait tout. Mais il tient à son péché, il s'y accroche presque jusqu'à la fin. Peut-être trop tard pour qu'on le pardonne d'être plus honnête que nous.
A Kaboul, autrefois, avant les talibans, il y avait des batailles de cerfs-volants. Amir disputait le combat, et Hassan était son Kite-runner. Il aurait été son ami, peut-être, dans un monde différent du leur.