Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Un docu à tomber raide!

macchabees_mary_roach.jpgMacchabées, Mary Roach

Avis chrono'

Un documentaire génial, bourré d'humour, qui mêle à une réflexion sur l'au-delà terrestre du corps - et dieu sait qu'après la mort, on peut encore en faire, des trucs! - des anecdotes historiques très instructives. Formation des chirurgiens, thanatopraxie, dons d'organes, industrie automobile... Vous passerez avec plaisir par bien des thèmes inattendus.


"les analogies tirées de l'étude d'oeufs de poules butèrent sur l'objection que l'homme n'est pas un poulet."

Que vous soyez mort ou non de votre plein gré, découvrez tout ce qui vous reste à faire avant de mériter le repos éternel.

Mathématiquement, si l'on tient compte de la probable régression de l'espérance de vie (ondes diverses, tabagisme, nourriture de m****, stress lié à la crise) et, conjointement, de l'allongement de la durée des cotisations retraite, il se trouvera bien un moment où il faudra songer à travailler après sa mort!

Vous, vous avez quoi de prévu, pour l'au-delà? Je ne parle pas de l'après spirituel, celui avec les petits anges, la bonne bouffe, le pinard et les vierges offertes. Je parle de celui, on ne peut plus terrestre, de votre corps. Si vous n'avez pas vu plus loin qu'une petite concession peinarde sous un if, ou un gros barbecue du genre où il n'y a rien à manger puisque tout part en fumée, voilà un livre qui pourrait vous plaire!

Ce documentaire, rédigé par une journaliste dotée d'un solide sens de l'humour, d'un estomac solide, et d'une fâcheuse tendance à poser des questions embarrassantes est un véritable bijou. Sans nul doute mon coup de coeur du printemps. Suis tombée nez à nez avec lui à la médiathèque. Je n'avais rien lu de scientifique depuis des mois et j'ai eu du flair...

Donner son corps à la science. L'expression vous dit sans doute quelque chose, mais avez-vous déjà sérieusement réfléchi à son sens? Je ne vais pas pouvoir m'empêcher de partager mes passages préférés. (j'ai pris 4 pages de notes!)

Parmi les thèmes évoqués: Le seuil de tolérance à la douleur qui était plus élevé, auparavant, à tel point que le patient s'asseyait simplement, même pas attaché, pour subir des manipulations atroces, réalisées par des types qui ne devaient leur titre de professeur qu'à de solides relations...
L'époque où la pénurie de cadavres était telle, pour les étudiants en médecine, qu'on embauchait des équipes spécialisées en pillages de tombes.
Au XVIIe siècle, W. Harvey qui finit par se résoudre à se faire la main sur son père et sa soeur décédés.
Les livres reliés en... peau humaine (Pas courant. Pas récent.)
Le moment où l'on a eu l'idée d'ajouter à la peine de mort, décidément peu dissuasive, la punition suprême: la dissection. Qui vous privait pour toujours du paradis et de la résurrection.
La nécrophilie, ou comment les lois n'avaient pas, au début, prévu ce cas de figure.
La mode des cercueils sécurisés, qui ralentissent la décomposition du corps... Il y a vraiment des acharnés du non-vieillir!!

Peut-on, aujourd'hui, former des chirurgiens sans recourir à de véritables cadavres? Au fond, on a la 3D, des tonnes de bocaux, de documents, on peut modéliser... Mais disséquer, regarder, c'est aussi être pour la première fois en contact avec la mort. Etape symbolique qui ne peut se réaliser devant un livre. Blagues de carabins ou stage de sensibilisation au respect dû aux défunts? Comment apprend-on, au XXIe siècle, la distance nécessaire?

Le livre évoque aussi les célèbres fermes de cadavres et leurs hôtes, se décomposant à perte de vue, surveillés par des batteries de scientifiques cherchant à déterminer avec de plus en plus de précision l'heure d'un décès en cas de crime, que le corps soit à l'air libre, dans l'eau, sous terre, habillé ou nu, gros ou maigre...

J'ai particulièrement apprécié le chapitre qui s'interroge sur le don d'organe et sur ce que les familles veulent savoir, ou préfèrent ignorer. Donner un coeur, ok. Mais savoir que la peau de feu votre mari, votre père, va se retrouver à servir à une augmentation pénienne? Ou que votre femme morte va être lâchée du haut d'un immeuble pour s'écraser en bas et qu'on puisse ensuite mesurer les lésions?

Sans pudeur excessive, la journaliste évoque ainsi ses visites dans les laboratoires des industries, qui utilisent corps entiers, ou morceaux pré-découpés, plus maniables, pour tester divers équipements de sécurité (vous savez, les crash-test).  Est-il, là encore, possible d'utiliser des mannequins de plus en plus perfectionnés? Pas toujours...

Autre thème, les catastrophes aériennes. Cette fois, le cadavre n'est pas donné à la science, il arrive sur la table suite à un accident. Un chapitre entier est consacré à toutes les observations qui permettent aux spécialistes de déterminer les causes d'un crash selon la localisation des blessures et leur nature. Assez pointu, très instructif. Remonter à la cause par l'analyse des conséquences. Tout un programme. Savez-vous que si vous chutez d'un avion éventré, pour tomber dans l'eau, c'est d'une rupture de l'aorte que vous aurez le plus de chance de mourir?

La guillotine - je sais, c'est passé de mode - est-elle plus douce que l'électrocution? Passage mémorable racontant les travaux de cet homme de science qui tâchait de soudoyer les bourreaux pour obtenir une tête très très très très fraîche pour savoir si elle souffrait encore, si elle était consciente.

Avez-vous déjà goûté de l'homme mélifié (organes préparés à base de miel) ? Une autre façon de servir après votre décès, c'est de passer à la casserole. Urine, salive, sang menstruel... Vive le recyclage!

J'ai découvert encore une autre chose, une alternative à la crémation nommée "digestion tissulaire". C'est moins polluant, on peut ensuite vous utiliser comme engrais (un ti arbre commémoratif! C'est mignon comme idée, non?) ça vient des pays du Nord, je crois. Et sérieusement, ça semble pas mal du tout. Au lieu de brûler, vous passez dans une grande machine à laver.

N'oublions pas, USA obligent, le chapitre dédié à l'armée et aux armes à feu. C'est que c'est compliqué de concevoir une arme à forte puissance d'arrêt. Celle qui mettra le balaise de l'équipe d'en face à genoux, direct, avant qu'il ait pu riposter. Chapitre où nous découvrons la délicieuse recette, à faire en famille, de la gélatine substitut de chair humaine (pssssst, ne le répétez pas trop fort, mais elle est fabriquée par la même usine qui vous fournit la guimauve, ou les gélules de vos médocs. Simplement ils ne le crient pas sur les toits) quand vous tirez dessus, ça réagit comme la chair de vos mollets, sauf que personne ne crie "Ouille".

Et pour finir, un petit coucou au petit Jésus: les cadavres servent aussi à démontrer le fondement (ou l'absence de) des théories sur la crucifixion du célèbre charpentier juif. Vous imaginez? Papy a donné son corps à la science et on le retrouve à jouer à cochon pendu... Position des mains et des pieds, traces potentiellement laissées sur le suaire... Sur la croix, meurt-on par asphyxie? la position est d'un inconfort...!

Et le poids de l'âme? 21 grammes? Et son emplacement?
Les ex-malades demandent-ils à conserver leur vieux coeur, après une transplantation?
Les cellules de nos joues sont-elles télépathes?
Peut-on modifier, par une greffe, le comportement sexuel du receveur?

Je n'ai bien sûr pas tout dit de ce remarquable ouvrage, très dense, moins de 300 pages je crois.

Est-ce un plaidoyer pour le don du corps après la mort? Oui. Mais bien plus, c'est un livre pour les curieux, un livre pour naviguer entre passé et présent et réfléchir à tout ce qui fait l'homme.

"S'il est pour de multiples raisons, pertinent de tracer une frontière légale au niveau de la mort cérébrale, cela ne signifie pas que ce soit réellement une frontière. Entre la vie et la mort il y a un état de quasi-mort, ou de pseudo-vie. Et la plupart des gens ne veulent pas de cet entre-deux."

Penser à sa vie, après la mort, rappelle l'auteur, c'est vouloir continuer à être là. Peut-être ne faut-il rien souhaiter du tout.

Lien permanent Catégories : Urgences 5 commentaires

Commentaires

  • Elle me plait bien ta chronique, je suis curieuse maintenant !
    Wild PAL forever ^^

  • Je ne suis pas trop branchée vulgarisation scientifique mais ton billet enthousiaste non seulement montre que ce titre est à la portée de tout un chacun mais qu'il peut aussi être drôle à lire et intéressant. Maintenant que ma curiosité est réveillée, j'essaierai de me le procurer ^^

  • @ Tite' : Merci! C'est vrai que vous pourriez aimer aussi des livres un peu plus scientifiques! Si vous avez des ouvrages de vulgarisation à me conseiller, d'ailleurs, je prends. ça me changerait un peu.
    @ C'era : Tu n'auras qu'à l'emprunter un jour où tu seras ici ! Je pourrais même aller te le chercher avant. Il est quand même d'une taille conséquente, faut prévoir un bon we intensif de lecture, ou une semaine entière!

  • Ah bah ce titre va finir dans ma pal c'est sûr ! Il a l'air intéressant et passionnant.

  • Il l'est vraiment, si tu es curieuse!

Les commentaires sont fermés.