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Consommation d'énergie

solaire_ian_mcewan.jpgSolaire, Ian McEwan

Par l'auteur d'Expiation, voici un roman magistral qui serpente entre cynisme et grotesque. A la fois portrait d'un homme - c'est bien là tout le drame -  et réflexion contemporaine sur notre politique écologique, Solaire est un roman qu'il faut prendre le temps de déguster, sous peine d'indigestion.


"Il commençait à comprendre que, les accidents mis à part, rien ne changeait dans l'existence. On l'avait trompé. Il avait toujours cru qu'à l'âge adulte arriverait un moment, une sorte de pallier où il aurait appris tous les trucs pour s'organiser [...]. Mais peu après la naissance de Catriona, à l'époque de sa rencontre avec Darlene, il crut pour la première fois entrevoir la vérité : le jour de sa mort, il porterait des chaussettes dépareillées , aurait des mails en retard ... "

Après une telle débauche de B.D., dur dur de plonger dans un roman si sérieux. J'étais un peu frustrée, arrivée à la centaine de pages, par l'absence d'intrigue à proprement parler. Je me sentais étouffée par la personnalité de celui qui est au coeur du roman. En disant "coeur", je suis en dessous de la vérité. Il emplit chaque recoin, il est le corps du roman. L'ensemble de l'oeuvre est son portrait impitoyable.

On ne peut pas aimer Michael Beard. Certes, il a reçu le prix Nobel de physique. Mais c'était il y a des années. Depuis, il se contente de recycler la même conférence, grassement payé, tout en enchaînant les mariages et les liaisons - ces dernières trois fois plus nombreuses que ces premiers.

Justement, sa cinquième épouse, dépitée, lui rend la pareille. Beard, dont la lâcheté excède la libido, en profite pour accepter un tour au Pôle Nord et feint de s'intéresser au réchauffement climatique. En vérité, il s'en fout, de ça, comme du reste, comme de tout ce qui ne concerne ni son pénis ni son estomac.

De cet homme grotesque, Ian McEwan fait l'allégorie de l'Indécence. Son prix Nobel lui donne un certain pouvoir, il l'utilise à des fins personnelles. Il prêche les économies d'énergie mais il est prisonnier de son métabolisme déréglé, avide de nourriture grasse, avide de sexe. Quand il s'empare des travaux d'un autre sur l'énergie solaire, impossible d'être surpris.

Je crois que je lui en veux surtout parce qu'il est humain et agit comme tel. A petite échelle, il existe bien des coeurs purs, de nobles âmes prêtes à se sacrifier pour la cause de l'humanité. A grande échelle, ceux qui décident, ceux qui gouvernent, nous l'oublions parfois, ne sont que des hommes.

Pas spécialement écolo - parce que trop cynique -  je suis les débats sur le réchauffement climatique d'assez loin. Mais un passage m'a marquée, celui dans lequel il est dit qu'il nous est impossible de prendre les menaces climatiques au sérieux, car la situation est tellement critique que si brusquement nous nous en apercevions vraiment, il ne serait plus possible de faire quoi que soit d'autre que d'y penser et de s'en inquiéter, au point de reléguer à l'arrière plan toutes les autres préoccupations mondiales.

Tout au long du texte, Michael est un corps qui enfle et qui n'a même pas, comme la grenouille de la fable, l'excuse de chercher à être autre chose que lui même, pitoyable, mesquin et impuissant.

Une petite claque méritée, ce livre. Un grand merci à Livraddict et aux éditions Folio pour ce partenariat!

Commentaires

  • C'est un peu ce que je reproche à l'auteur, il demande du temps de lecture. Il faudra que je ré-essaye de le lire, pendant des vacances, tiens.

  • Il était déjà à ma PAL mais j'apprécie que tu précises qu'il s'agit d'un livre qui demande du temps et de la concentration !

  • Je viens de le finir pour le part'.
    Quel héros!!! il est super cru en plus.
    Il ne ressemble à rien et les belles femmes l'aiment...c'est dingue,ça!!!
    Une bonne découverte .La dernière ligne m'a fait craqué!!!

  • Eh bien voilà un article tout aussi sérieux que ce livre. Pourquoi l'auteur a-t-il choisi un type aussi détestable pour dire ce qu'il avait à dire sur la politique écologique? Pourquoi un type odieux? Enfin c'est l'impression que j'ai à te lire, que cet ancien prix Nobel est archi détestable...

    Du coup, est ce que ça ne détourne pas le lecteur de la réflexion sur "la défense de l'environnement" (ça parle de ça aussi non le bouquin ou je me trompe carrément?)... En fait, pour toi le fait que ce gars soit au cœur de l'histoire est ce que ça ne t'a pas détournée du sujet de fond?

    Quant au message dont tu parles, je crois qu'on en a conscience de la menace climatique, d'autant plus si on se prend tsunami, tremblements de terre à répétition... je suis pas sûre qu'on oublierait tous les autres problèmes pour autant... On fait juste semblant de croire que ce n'est pas pour tout de suite. On tremble un peu quand on subit des catastrophes climatiques ou qu'on les constate un peu partout aux 4 coins de la planète. Et puis ça passe, on oublie ou on se laisse happer par des préoccupations plus personnelles. A moins qu'on vienne nous dire que la fin du monde est pour demain... Ah mince, on nous a déjà fait le coup ^^ bon ben tant pis...

    Bon je le lirai, obligé maintenant :)

  • @ Alex: Bonne idée.

    @ Ingrid: Pas tellement du temps ou de la concentration. Ce n'est pas difficile à suivre comme intrigue, mais ça a quelque chose de pesant. Je n'aurais pas pu tout lire d'une traite je crois, même si j'avais eu le temps.

    @ Stellade: C'est vrai, je ne l'avais pas formulé en ces termes.... Mais les femmes l'aiment pour le prestige, pour son image d'homme célèbre. Est-ce si peu réaliste? Au fond, quand on interroge ce qui compte vraiment pour nous chez un(e) partenaire... Je ne suis pas sûre que le physique arrive si souvent en premier.
    Et puis le roman insiste sur son côté immature, presque enfantin, qui déclencherait un besoin irrépressible pour les femmes de le materner.
    J'ai relu la dernière ligne ^^ Elle te fait craquer? à ce point là?

    @ C'era: ça ne détourne pas du tout notre attention, au contraire. S'il y a un message, ce serait quelque chose comme "regardez les mecs auxquels on confie l'avenir de la planète" on est mal barrés. La satire est évidente.
    Quant au message écolo, je ne sais pas... Est-ce que le roman est vecteur d'espoir? Les choses avancent quand même, même si les acteurs ne sont pas mus pas les plus nobles pensées...
    Mhhh. Je vais méditer cette question.

    Ce que tu dis dans le dernier paragraphe rejoint au contraire ce que j'ai cité de mémoire du livre. Ce n'est pas prendre conscience que de se dire "c'est pas pour tout de suite". C'est se voiler la face. Comme moi quand je regarde l'état du carrelage. Ou la poussière. On prendra conscience plus tard. Quand qqun annoncera sa visite pour le lendemain et à ce moment on se jettera sur les serpillères, les éponges et les chiffons.
    Espérons que ce sera comme pour moi, réglé à la dernière minute, mais à temps.

  • C'est exactement ce que tu dis "on confie l'avenir de la planète" à des êtres humains, pas des supers héros, des gens comme tout un chacun avec leurs faiblesses... Il faut juste avoir conscience de ça ^^

    Oui oui, c'est bien ce que je dis : "On fait juste SEMBLANT de croire que ce n'est pas pour tout de suite." Peut-être qu'on attend l'urgence, comme toujours, comme souvent, pour réagir ^^
    (tu as raison, recevoir de la visite c'est un bon moteur pour faire le ménage! Rappelle-moi quand tu débarques?... :p)

  • Bonjour, ce que j'ai aimé dans ce roman c'est que Michael Beard n'est pas un personnage sympathique mais on n'arrive à l'aimer (un peu, malgré tout). Voir mon billet du http://dsola.canalblog.com/archives/2011/11/14/22656925.html 14/11/11. Bonne fin d'après-midi.

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