Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

laferriere

  • L'oiseau de malheur

    oiseaux,fous, laferriere,academicien,couverture,zulmaLe cri des oiseaux fous, Dany Laferrière

    De l'Académie française.  Heureusement que c'est écrit en dessous de son nom, car le seul Académicien que je pouvais citer est mort. Comme ça je peux le remplacer. C'est toujours utile de connaître un Académicien.

    "Ce ne sont pas les gens qui subissent une dictature qui devraient la combattre (les affamés et torturés qui viennent tout juste de sortir de prison). On devrait charger d'un tel boulot des troupes fraîches de gens qui n'ont jamais connu la torture, la prison, la mystification, la faim ou l'angoisse de disparaître du jour au lendemain, de gens qui se spécialiseraient bénévolement dans des opérations de déracinement de dictateurs."

    Je suis un peu gênée avec ce roman. Il fait plus sérieux que ce que je lis d'ordinaire. Je me sens comme quand je mets une robe... Quelqu'un que je connais à peine me l'a offert, sans raison. Pas d'anniv, pas noël, je ne pars pas à la retraite, je n'ai pas accouché. Conséquence de notre échange autour de Winterson et de La tâche de P. Roth. Une de ces situations sociales illisibles pour moi... Et le pire c'est que ça tombe juste, j'ai beaucoup aimé. Tandis que mes propres deux derniers choix se sont avérés mauvais (pires même...).

    Récit sérieux, politique, écriture littéraire, très agréable. Le narrateur est un jeune homme haïtien. Son ami journaliste est assassiné par les miliciens du pouvoir, les tontons macoutes. Sans doute lui-même menacé, il est supplié par sa mère de partir en exil, comme son père avant lui.

    Commence alors une nuit de déambulation dans la ville. Une sorte de visite guidée, le tour d'adieu à un lieu auquel il est terriblement attaché et qu'il doit bientôt quitter, sans pouvoir le dire à personne. Chaque ami rencontré doit être traité comme s'il devait être revu le lendemain. Chaque étape, du bordel au bar, de la représentation d'Antigone par des étudiants au repaire des assassins est une occasion d'aborder l'histoire du pays, le régime politique ou l'aspiration de la jeunesse à pouvoir vivre sans que la dictature soit au centre de toutes les discussions.

    "Je suis simplement contre l'idée qu'il faut passer sa vie à toujours parler de la même chose : la dictature. Comme s'il n'existait que ce seul sujet de préoccupation. La pire prison est d'accepter cette limite."

    Fil rouge de ses pérégrinations, la femme. Les femmes. "La sainte ou la putain", comme il le dit lui-même. Je ne suis pas fan du discours sur les femmes dans le récit, mais rien de comparable avec P. Roth, alors comme j'ai déjà beaucoup râlé la dernière fois... Je m'en tiens là. En dehors de la distribution très idéalisée des images féminines, y compris celle de la mère, il y a de beaux passages.

    J'ai beaucoup aimé l'ombre de mythologie vaudoues, aussi.

    Conclusion, le rythme n'est pas trépidant mais l'intérêt est soutenu par la variété des lieux et des rencontres et par les réflexions du narrateur qui oscillent entre mémoire personnelle et considérations collectives. C'est presque un coup de coeur... Il ne doit pas manquer grand chose. Peut-être simplement une inclination plus spontanée chez moi pour les récits historiques. Un livre que je sais parfaitement à quel public conseiller, en tout cas.

    P.S. Je n'ai pas vu les oiseaux. C'était une métaphore ?