La servante écarlate, Margaret Atwood
L'adaptation récente en série m'a été beaucoup vantée - je ne l'ai toujours pas vue - j'en déduis que les scénaristes ont dû prendre des libertés avec la trame du roman, lent dans son évolution, lent dans sa façon d'apporter les réponses sans pour autant susciter de véritable suspense.
Ecrit dans les années 80, le roman présente une évolution alternative de l'histoire, un monde futuriste dans lequel la fertilité des êtres humains est en chute libre. La solution choisie conduit à un régime totalitaire : privation de libertés pour tous, intégrisme religieux pour se justifier, exécutions publiques et petit bonus pour les femmes qui n'ont plus le droit de travailler et sont désormais réparties en trois castes.
Prenez une femme au foyer modèle de la génération de votre grand-mère et distribuez à trois personnes différentes ses attributions sociales, domestiques et sexuelles.
Les épouses ne font rien de palpitant, elles jardinent et se visitent les unes les autres en attendant un enfant qu'elle ne peuvent pas elles-mêmes concevoir. Toutes semblent appartenir à une sorte d'aristocratie, leurs époux ont des postes à responsabilité. Le roman n'évoque pas vraiment le sort des masses, du peuple. Est-il soumis au même découpage ?
Une autre caste, celle des marthas, fait le service, la cuisine, le ménage, la lessive, etc. Elles ne sortent quasi jamais de la maison.
Les dernières, les servantes écarlates car tout de rouge vêtues, sont des utérus féconds, qu'on se passe de maison en maison le temps d'avoir un enfant, et qui changent d'ailleurs de nom à chaque fois, prenant celui du nouveau maître : Defred (servante de Fred), Deglen etc...
La quatrième possibilité, c'est le rebut, pour les vieilles et les rebelles quand elle ne sont pas pendues directement.
Quelque part autour de cette nouvelle société, c'est la guerre, ou on le prétend.
Roman du flou, qui laisse une large part à l'imagination et éveille difficilement un sentiment de révolte. Mais je pense que cela n'a guère d'importance. Le récit est en quelque sorte protégé par son thème.
C'est assez révélateur de notre société, qui consomme à outrance des ressources non renouvelables, se fout globalement de la condition des femmes, de la pérennisation de l'état d'urgence, de la liberté de la presse -voire de toutes les libertés - et du sort de toute population qui vit à plus de 200km. Mais va spontanément protéger et mettre en avant, parfois plus que mérité, toute oeuvre culturelle qui alerte sur ces mêmes thèmes. Inconséquence, quand tu nous tiens.
J'ai eu l'impression que le récit se concentrait surtout sur la vie affective et sexuelle de la narratrice, qu'en absence de toute liberté, c'était cela qui ressortait avec le plus de cruauté et cela qu'elle espérait en priorité, retrouver le droit d'aimer librement. De même, lorsque le roman présente un lieu de "résistance", ce qu'on y trouve, c'est du sexe.
" Pourquoi les lapins sont-ils supposés être sexuellement attirants pour les hommes ? "
Après discussion, je suis un peu revenue sur mon opinion. Elle parle aussi un peu du travail qu'elle avait autrefois, de l'interdiction de lire.