Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Le vrai est au coffre

aabsences_laplante.jpgAbsences, Alice Laplante

Avis chrono'

Un livre de plus au genre indéterminé. Sublime plongée dans les pensées d'une femme atteinte de la maladie d'Alzheimer, mais complètement gâchée par le choix d'une intrigue pseudo-policière sans grand intérêt. C'est comme gaspiller une cartouche.


Âpre débat, avec C'era, à propos de ce livre que nous avons toutes les deux reçu en partenariat. Puis avec ma soeur, pour tenter d'avoir un avis extérieur.

Est-ce un thriller? Une citation du New York Times, reportée sur la couverture, nous indique que ce "Roman" transcende le genre du thriller. Transcender, c'est surpasser. Mais si cette phrase signifie qu'il n'appartient pas du tout au genre du thriller, pourquoi ne pas écrire alors qu'il transcende le genre de la poésie pastorale?
Avouez que c'est limite, encore une fois, comme pratique.  Notez la couverture sobre, chaise vide, titre court, fond noir et blanc ainsi que le résumé, qui fait état d'un meurtre et d'une femme mutilée.

Alors, en effet, il n'est nul part écrit que c'est un thriller, mais je peux comprendre qu'on ressente en le lisant une espèce de déception.

D'un autre côté, ce n'est pas un simple roman puisque, comme je l'ai dit, il y a au coeur de l'histoire cette femme, Amanda, retrouvée morte, les doigts amputés. Sa meilleure amie, Jennifer White, est suspectée car elle est chirurgienne orthopédiste.

Ce qui rend l'enquête délicate, c'est que le Dr White est à la retraite, atteinte de la maladie d'Alzheimer... Même elle, lors de ses éclairs de lucidité, ne saurait dire si elle y est pour quelque chose.

Je n'ai pas aimé ce livre, contrairement à C'era. Je me suis ennuyée du début à la fin. Une seule fois, pendant quelques pages, j'ai été "dedans". Un souvenir de journée à la plage, deux couples d'amis. Quelque chose devait me parler dans ce passage. Une dispute, des mots durs très bien rendus. Puis j'ai senti juste après que je reprenais de la distance avec le texte. Brève compatibilité.

C'est vraiment le thème qui m'a déplu. L'écriture était plutôt agréable. J'irai même jusqu'à dire que plonger ainsi à la première personne dans l'esprit d'une personne atteinte d'Alzheimer, c'était magistral. Il ne fait absolument aucun doute que l'auteure a cotoyé cette maladie de très près. Reconstruire ainsi une pensée dérangée, qui saute d'un sujet à l'autre, d'un souvenir très ancien à l'angoisse du présent, à la terreur de ces visages inconnus, de ces étrangers qui disent "Maman", de leur écoeurante compassion tandis qu'elle se sent la talentueuse Dr White, qu'elle croit s'apprêter à entrer au bloc. C'est vraiment brillant.

C'est donc d'autant plus dommage, il me semble, de ne pas avoir réussi à créer, autour d'un thème aussi poignant et aussi magistralement rendu, qui devait lui tenir à coeur, une histoire qui soit à la hauteur.

Dernière chose, je n'ai pas encore évoqué les personnages secondaires. Au malaise de la maladie omniprésente se rajoutent: un mari infidèle, des enfants psychologiquement fragiles, parfois cruels, qui profitent de la situation et surtout, cette fameuse Amanda. Difficile de la regretter, cette amie sournoise, envieuse, provocatrice. Chaque souvenir de Jennifer semble porter sa part de chagrin.

ça fait gloups, un peu, de se dire qu'un jour, on pourrait perdre le contact avec la réalité et baigner durant des années dans des souvenirs douloureux.

C'era pense qu'elle a globalement été heureuse, cette femme. Il me semble que professionnellement, elle a connu la gloire. Mais pour le reste, c'est plus diffus. je suppose qu'on m'objectera que la vie réelle a ce goût là. Quelques moments heureux dans un ensemble morne. Un plaisir fugace et une bonne dose de résignation.

Pas un roman qui fait rêver.

Quoi qu'il en soit, je remercie l'éditeur de me l'avoir envoyé et Livraddict, pour toutes les découvertes et les rencontres que je fais sur ce site.

L'avis de C'era

Lien permanent Catégories : Morgue 4 commentaires

Commentaires

  • Malgré tout, mon envie de lire ce roman reste intacte. Le thème de la mémoire et des souvenirs me fascine. Je suis intriguée à l'idée de plonger dans l'esprit de cette femme malade !

  • Ta curiosité a des chances d'être satisfaite! Lance-toi!

  • Ton ressenti est vraiment à l'opposé du mien :) Mais tu soulignes tout de même toi aussi la maestria de l'auteure à faire vivre par le lecteur la maladie dont souffre son personnage principal. J'ai bien senti que ça n'était pas agréable pour toi de plonger dans cet esprit confus et en perte de repères. Et dans ce qui était autour de ça, rien n'est venu tempérer, te soulager de ce "gloups" que tu as ressenti.
    Peut-être que si de mon côté, j'ai tant aimé c'est que je n'ai pas été gênée, effrayée par la maladie d'Alzheimer. Au contraire, j'ai trouvé ça passionnant, pas dérangeant.

    Ce qu'on apprend des autres personnes qui ont ou qui gravitent encore autour de Jennifer apporte son lot de réactions (agacement, révolte...) oui. Marrant comme tu ne soulignes que l'infidélité du mari -infidélité qu'elle dit avoir fini par parfaitement acceptée d'ailleurs- alors qu'elle garde elle aussi le souvenir vivace d'avoir été adultère.

    Oui, je pense qu'elle a été globalement heureuse cette femme. Je crois qu'elle a composé avec les aléas de la vie, les coups de poignard et les moments heureux pareillement... Comme on le fait tous oui. Elle semble avoir aimé son mari, ses enfants, son amie, son métier, son amant... Et de tout ça, il en reste des souvenirs plus pointus que d'autres. Après de mon côté j'extrapole, je me dis que si le doigt est pointé sur certains douloureux c'est parce qu'en même temps on lui demande de s'attacher particulièrement aux souvenirs qu'il lui reste de sa relation avec Amanda.
    Je pense que dans les moments où elle évoque son mari, ses enfants plus jeunes, sa relation avec son interne il y a du bonheur...

    Et je m'arrête là :p C'est toujours un grand plaisir ces échanges autour de nos lectures communes.

  • Haaann. Comment ça m'énerve... Parce que je sens que tu as raison, que je ne trouve pas de failles pour répliquer. Que c'est agaçant!
    C'est bien la preuve que la lecture est toute faite de subjectivité... Et ça semble, chez moi, particulièrement puissant, au point de déformer même des livres lus il y a très peu de temps.
    ça fait deux fois cette semaine qu'on m'en fait la remarque. Il s'est passé la même chose avec le Bleu est une couleur chaude et quand J. (celle qui aime me parler ^^ ) l'a achetée, elle a dit que ça n'était pas comme je le lui avais raconté, qu'il y avait d'importantes déformations dans mon résumé. J'avais multiplié, dans le souvenir que j'en avais, le nombre des disputes et des séparations. Allongé le temps. Et j'avais fait de la plus jeune une femme hétéro, alors que d'après J. c'est une lycéenne qui n'est encore ni vraiment homo, ni vraiment hétéro.
    Quand je parle de mes lectures, j'ouvre un accès direct sur ce que je suis. Passé, présent... Mais qui en doutait encore? :)
    J. a dit aussi qu'elle allait réfléchir à ce qui avait bien pu me faire pleurer... Mon esprit dérangé va ENCORE passer à la moulinette de l'analyse!

Les commentaires sont fermés.